Hier en séance plénière, les membres du Conseil national de Transition (CNT) ont examiné le rapport de la commission ad hoc mise en place pour l’examen des contours de l’interpellation et de l’arrestation d’Issa Kaou N’Djim. Ils ont adopté une résolution demandant la suspension de sa détention.
Issa Kaou N’Djim, 4è vice-président du CNT, est poursuivi en procédure de flagrance pour atteinte au crédit de l’état et de ses institutions. Le CNT s’est penché sur cette affaire en se basant sur l’article 44 de son règlement intérieur qui dit que : «il est constitué, pour l’examen de chaque demande de levée d’immunité parlementaire d’un membre du Conseil national de Transition, de chaque demande de suspension de poursuites déjà engagées ou de chaque demande de suspension de détention d’un membre du Conseil national de Transition, une commission ad hoc, dont la taille et la composition sont fixées par la plénière».Sur cette base, une commission ad hoc de 15 membres a été mise en place pour l’examen des contours de cette affaire qui défraie la chronique depuis la semaine dernière.
Dans son rapport présenté en plénière, la commission a indiqué que selon la note technique d’information du procureur de la République, Issa Kaou N’Djim est poursuivi pour «atteinte au crédit de l’état et de ses institutions». Le rapport précise que cela se traduit par «des attaques personnelles, des dénigrements gratuits, des invectives et diatribes vexatoires et injurieuses dirigées directement ou indirectement et via les médias sociaux contre certaines personnalités et certaines actions judiciaires en cours».
D’après le rapport, l’arrêt n°2020-07/CC du 18 décembre 2020 de la Cour constitutionnelle reconnaît l’existence de l’immunité parlementaire au bénéficie des membres du CNT. Ledit rapport souligne que les circonstances qui autorisent l’application de la procédure de flagrance sont objectives et ne peuvent donner lieu à aucune interprétation subjective. Mieux, il soutient que les agissements reprochés à Issa Kaou N’Djim n’ont été commis dans aucune des circonstances prévues à l’article 65 du Code de procédure pénale. Aussi, la commission estime que le recours à la procédure de flagrance ne semble avoir été opéré que dans le dessein unique de faire échec à l’immunité dont bénéficie l’intéressé en sa qualité de membre du CNT.
Par ailleurs, le document indique que l’atteinte au crédit de l’Etat est une infraction spécifique instaurée afin de combattre les comportements susceptibles d’ébranler la confiance des citoyens relativement en ce qui concerne l’économie, notamment la monnaie, les impositions, les contributions et les taxes.
Le rapport signale qu’il s’agit essentiellement d’une infraction économique. Et en foi de cela, il est difficile d’établir un lien entre les charges retenues contre Issa Kaou N’Djim et l’infraction «atteinte au crédit de l’état». Selon la commission, laprocédure correctionnelle conduite contre lui pèche tant dans sa forme que dans le fond. C’est pourquoi, elle a recommandé à la plénière, l’adoption d’une résolution demandant la suspension de sa détention.
Dans cette résolution, la commission a rappelé que l’article 62 de la Constitution permet à l’organe législatif de requérir et d’obtenir la suspension de la détention ou de la poursuite d’un de ses membres. Les membres du CNT ont invité le gouvernement à instruire aux autorités d’enquêtes et de poursuites, le respect scrupuleux des lois de la République notamment en ce qui concerne l’immunité conférée aux parlementaires par la Constitution.
Après l’intervention d’un orateur pour et en l’absence d’orateur contre, conformément aux textes, la résolution a été adoptée par 101 voix pour, 7 contre et 5 abstentions. à l’issue du vote, le président de la commission ad hoc Dr Souleymane Dé a indiqué que le document adopté compte deux points. En premier lieu, ils ont demandé au gouvernement d’instruire aux enquêteurs et aux poursuivants de scrupuleusement respecter les dispositions constitutionnelles consacrées en matière d’immunité des membres du CNT.
Et en second lieu, la demande de suspension de la détention d’Issa Kaou N’Djim.
Pour Dr Souleymane Dé, il est extrêmement difficile d’établir la flagrance dans ce dossier. Mais aussi de faire un lien entre ce qui est reproché à Issa Kaou N’Djim et l’article 167 du Code de procédure pénale qui porte sur les crimes économiques. Même si dans la résolution, les membres du CNT ont demandé la suspension de sa détention,Dr Dé a précisé qu’ils n’ont pas souhaité la suspension des poursuites pour laisser la justice faire son travail.
Par un communiqué, le Syndicat autonome de la magistrature (SAM) et le Syndicat libre de la magistrature (SYLIMA) ont déclaré avoir eu connaissance de la résolution du CNT demandant la suspenssion de la détention de Issa Kaou N’Djim, «incarcéré pour des faits d’atteintes au crédit de l’état et à ses institutions, faits prévus et punis par les dispositions combinées des articles 58 et 67 du code pénal». Ce pendant les deux syndicats rappellent à tous le respect du principe sacro-saint de la séparation des pouvoirs, gage d’une justice forte.
Lors de la plénière du CNT, le gouvernement était représenté par Dembélé Madina Sissoko, ministre des Transports et des Infrastructureset par son collègue Youba Bah, ministre délégué auprès du ministre du Développement rural, chargé de l’Élevage et de la Pêche.
Dieudonné DIAMA
Source : L’ESSOR