Pendant dix ans, ils ont versé, chaque mois, les frais qui leur sont exigés par le contrat de bail. Pourtant, à partir du 11 juin prochain, des propriétaires de logements sociaux perdront leurs maisons. Au profit d’Ecobank. Constitués en collectif, les habitants de la Cité IFA Baco hausse le ton. Ils ont organisé une conférence de presse, ce mercredi, à la Maison de la presse.
«Nous avions pensé que dans le foncier, avec l’Etat au moins, tout était officiel. Nous n’avions pas imaginé un seul instant qu’un tel problème pouvait nous arriver», s’indigne Sarmoye Mahamadoun, président du collectif. Comme lui, 28 autres propriétaires de logements sont sous la menace d’une expropriation de leurs logements sociaux suite à un contentieux opposant Ecobank Mali à la société Immobilière Franco-Africaine BACO (IFA BACO).
Que s’est-il passé?
Nous sommes en juillet 2007, le président de la République, à l’époque Amadou Toumani Touré, dans une ambiance festive, remet officiellement les clés des 160 logements IFA-Baco aux heureux bénéficiaires. C’est à Sébénikoro, sur les berges du fleuve Niger. Les maisons de type F3 et F4 ont été réalisées par la société Immobilière IFA-Baco et cédées à l’Etat à 2,6 milliards de FCFA hors taxe. L’Office Malien de l’Habitat (OMH), organisme public de gestion des logements sociaux, s’est engagé à rembourser ce montant sur trois ans à IFA-BACO. De leur côté, chaque bénéficiaire de logement s’est engagé à payer à l’Etat la somme de 26 100 000 FCFA sur 25 ans. Echéance à laquelle, et à condition s’être entièrement acquitté de cette somme, chacun aura son titre de propriété.
Sauf qu’en août 2012, pendant que les bénéficiaires croyaient bientôt être propriétaires, la saisine des immeubles sur de 40 titres fonciers appartenant à IFA-Baco a été déclenchée par Ecobank à travers un «Bon Pour Pouvoir». Là, les habitants de la paisible Cité IFA-Baco commencent à découvrir l’arnaque de Mohamed Oumar Traoré, Président directeur d’IFA-Baco. En effet, pour la réalisation d’un second lot de logements que l’Etat lui avait accordé, l’entrepreneur s’endette auprès d’Ecobank Mali en hypothéquant des titres en sa possession. Constitués en collectif, les habitants de la Cité introduisent une requête en justice. Après un périple judiciaire de quatre ans, la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA) de la CEDEAO, en février 2017, casse et annule l’arrêt de la Cour d’appel de Bamako en faveur des victimes.
Dans quelques jours, soit le 11 juin 2018, Ecobank procèdera à la vente aux «enchères publiques au plus offrant et dernier enchérisseur des immeubles objets desdits titres fonciers». Face à cette situation et surtout face à l’incapacité de l’OMH de leur donner une réponse satisfaisante, le Collectif des habitants de la Cité IFA-Baco en appelle à la responsabilité du Chef de l’Etat pour éviter à leurs familles l’humiliation de dormir dans la rue, surtout en ce début d’hivernage.
Roulés dans la farine…
Après la conférence de presse hier, Maliweb a rencontré le Directeur général de l’OMH et son adjoint. Le DG actuel de l’office, Modibo Dianka, reconnaît que les habitants de la Cité IFA Baco ont été victimes d’un entrepreneur sans scrupule. A entendre le DG, ils ne sont pas les seuls. L’Etat aussi a été roulé dans la farine, à l’époque. Car, c’est après s’être acquitté de sa dette vis-à-vis de la société IFA Baco que l’OMH s’est rendu compte que ses titres étaient en hypothèque. Cependant, Modibo Dianka de l’Office ne souhaite pas entrer dans les détails d’une «affaire transversale» tant que son ministère de tutelle n’a pas encore statué là-dessus. Ce qui ne saurait tarder selon lui.
Diantre! Où est donc passé Mohamed Oumar Traoré, l’homme d’affaire aux méthodes de ‘’Les Arnaqueurs VIP’’ du nom de la série britannique à succès? Personne ne le sait. Son numéro de téléphone sonne dans le vide et il n’a daigné répondre à aucun de nos messages. Jusque-là.
A suivre…
Mamadou TOGOLA