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Accord pour la paix et la réconciliation : Alghabass Ag Intalla menace de reprendre les armes si la République ne se soumet pas à ses désirs

Fidèle à une tradition de chantage utilisée en stratégie de défense d’intérêts particuliers, les leaders de la Coordination des mouvements de l’Azawad (CMA), ont encore  fait parler d’eux en marge des travaux de la 6e session du Comité de suivi de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali (CSA). Élu à la tête de cette coordination controversée depuis le 17 juillet 2022, Alghabass Ag Intalla a indirectement menacé de reprendre les armes si le gouvernement n’agit pas dans le sens de leurs intérêts. Et curieusement, personne n’a réagi à cette menace non voilée au moment où les autorités ont pris des décisions importantes en faveur des ex-combattants.

 

«Si le gouvernement du Mali ne veut plus de l’Accord pour la paix et s’il pense qu’il y a mieux que cet accord, qu’il nous le dise très clairement. De notre côté, nous sommes prêts à s’adonner à l’exercice qu’il aurait choisi…» ! Une déclaration attribuée à Alghabass Ag Intalla, président en exercice de la Coordination des mouvements de l’Azawad (CMA) en marge de la 6e session de haut niveau du Comité de suivi de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali (CSA) tenue à Bamako le 2 septembre 2022.

Autrement, ils sont prêts à la paix comme à la guerre en fonction de la satisfaction de leurs exigences aux dépens de la nation. Ainsi, Alghabass Ag Intalla n’exclut pas implicitement de reprendre les armes pour assouvir ses désirs funestes. Une crainte qui ne fait plus peur aux Maliens. Et cela d’abord pour deux raisons essentielles. Primo, parce que le Malien lambda n’est plus dupe du double jeu des responsables des ex-combattants qui n’ont jamais véritablement déposé les armes. Secundo, la rébellion est devenue un fonds de commerce pour cette poignée de Kidalois qui se prélassent dans le luxe de la capitale alors que les populations au nom desquelles ils prétendent se battre broient souvent du noir.

 

Des sacrifices toujours minimisés par les leaders de l’ex-rébellion

En depit des efforts du gouvernement et les concessions faites lors de la réunion de niveau décisionnel tenue à Bamako du 1er au 5 août 2022 par ce dernier, Alghabass Ag Intalla et compagnie continuent de douter encore de sa bonne foi.

Le gouvernement ne veut pas de l’APR, il a pourtant concédé l’intégration (en deux phases) au sein des structures de l’État malien, y compris les Forces de défense et de sécurité (FDS), de 26 000 ex-combattants ; la mise en place d’une Commission ad hoc pour formuler des propositions concrètes et réalistes sur la gestion au cas par cas de la situation des cadres des Mouvements signataires, y compris en relation avec la question relative à la chaîne de commandement. Et il est question de leur accorder un quota de 15 % à l’Ecole nationale d’administration (ENA), une intégration directe.

Les autorités du pays ne veulent pas de cet accord, mais elles cautionnent 16 projets de développement déjà validés et dont la Convention de financement a été signée entre le ministère de l’Économie et des Finances et les représentants des collectivités territoriales en novembre 2021. Le gouvernement est opposé à la mise en œuvre de l’APR, mais le ministre de la Réconciliation a reçu, le 18 août dernier, les représentants de la CMA, de la Plateforme et des Mouvements de l’Inclusivité avec la Commission de rédaction de la nouvelle Constitution.

La liste des concessions faites aux ex-combattants ces derniers temps n’est pas exhaustive. Mais, leurs leaders sont insatiables et profitent de chaque événement important pour procéder à l’intimidation, au chantage afin de mettre tous les atouts de leurs côtés. Cela avait déjà commencé avec la signature de l’APR. A la dernière minute, les leaders de la CMA avaient sorti des griefs fantaisistes. Ainsi, si l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali a été signé le 15 mai 2015 par le gouvernement, la Plateforme et la médiation internationale, il n’a été paraphé que plus d’un mois plus tard (20 juin 2015) par les ex-groupes armés de la CMA.

Ainsi, pour Alghabass Ag Intalla et compagnie, la présence du ministre algérien des Affaires étrangères (Chef de fil de la Médiation internationale au Mali), M. Ramtane Lamamra, était l’occasion rêvée pour faire monter les enchères. D’ailleurs, ce dernier a échangé avec les ex-groupes armés en prélude de cette 6e session de haut niveau du CSA. Cette stratégie d’intimidation et de chantage est donc une seconde nature chez les dirigeants de la CMA.

Mais, il est surprenant que cette attitude n’ait pas été dénoncée et condamnée par les participants à la 6e session de haut niveau du Comité de Suivi de l’Accord (CSA). En tout cas, cela ne ressort nulle part dans le communiqué final que nous avons reçu. Tout comme nous n’avons vu ni entendu une condamnation du gouvernement qui ne cesse de faire des concessions au risque d’avoir l’opinion nationale sur le dos. La classe politique n’a pas non plus relevé cet affront à la République.

Naby

Ex-combattant ou cerveau du terrorisme actif ?

Le chantage est intolérable de la part de Alghabass Ag Intalla qui aura encore du mal à nous convaincre qu’il est résolument engagé en faveur de la paix, de la réconciliation, de l’unité et de la cohésion sociale. Député à l’Assemblée nationale du Mali avant la rébellion de janvier 2012, il a abandonné le Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA) au profit d’Ançar Dine d’Iyad Ag Ghali afin de prêcher la Charia et l’extrémisme violent.

Considéré comme «le visage politique d’Ançar Dine», il a représenté ce mouvement terroriste lors des négociations de Ouagadougou (Burkina Faso) à la fin de l’année 2012. En janvier 2013, quelques jours après le début de l’Opération Serval, constatent des observateurs,  il quitte Ançar Dine pour fonder le Mouvement islamique de l’Azawad (MIA). Quelques mois après, le 19 mai 2013, il dissout le MIA pour se rallier au Haut conseil pour l’unité de l’Azawad (HCUA), fondé par son frère, Mohamed Ag Intalla.

En juillet 2014, Alghabass Ag Intalla devient le secrétaire-général du HCUA et prend la tête d’une délégation de 30 personnes (MNLA, MAA et HCUA) lors des négociations d’Alger ayant abouti à la signature de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali le 15 mai et le 20 juin 2015 à Bamako.

Considérée comme une figure centrale et controversée de la rébellion touareg de 2012, Alghabass (toujours secrétaire général du HCUA) a repris la présidence tournante de la CMA, le 17 juillet 2022, succédant ainsi à Bilal Ag Acherif. On avait assisté au même passage de témoin le 16 décembre 2016. Visiblement, ce sont les deux qui ont réellement la main mise sur la CMA.

En tout cas, ils sont nombreux les observateurs qui pensent qu’ils manipulent cette coordination en fonction de leurs propres intérêts et font peu d’efforts en faveur de la paix et de la cohésion sociale. Les liens étroits entre le HCUA d’Alghabass Ag Intalla et  Iyad Ag Ghani, aujourd’hui leader du Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (GSIM), ne sont qu’un secret de polichinelle.

Autrement, l’actuel président de la CMA adore pêcher en eaux troubles en naviguant sans gênes entre ceux qui font la paix et ceux qui la torpillent par des actes terroristes. Certains pensent d’ailleurs que ce sont ses accointances avec les extrémistes violents qui ont amené son défunt père, Intalla Ag Attaher (décédé le 18 décembre 2014), à ne pas le choisir pour lui succéder comme Amenokal des Ifoghas.

Kader Toé

Source : Le Matin

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