Après un mois d’interruption après le second coup d’État au Mali, la France va donc reprendre ses opérations conjointes avec les forces armées maliennes. Pas de surprise pour le site d’information malien Maliweb : « Comment cela pouvait-il en être autrement avec les intérêts stratégiques que Paris a au Mali et dans le Sahel en général ? », s’exclame Maliweb. « Quid des gisements aurifères en passant par les exploitations d’hydrocarbures dans le septentrion malien, au Tchad, jusqu’aux mines d’uranium du Niger, la France n’est-elle pas attachée aux mamelles nourricières sahéliennes ? Comment alors la France pourrait-elle ne pas se résigner à collaborer avec un régime militaire, fût-il sans “légitimité démocratique” ? »
Réalisme conjoint
Pour Le Pays au Burkina, « Maliens et Français ont fait preuve de réalisme, et cela dans la défense de leurs intérêts respectifs. On sait que la France ne peut se passer durablement du Mali où, en plus des liens historiques nés de la colonisation, elle a d’importants intérêts économiques. Mieux, toute la région sahélienne constitue pour elle un important enjeu stratégique dans un contexte de rivalités avec des pays comme la Russie, la Chine ou les pays du Golfe qui convoitent la région. Et puis, on ne le dira jamais assez, pointe encore Le Pays : les portes de la sécurité de la France se trouvent au Sahel. La bouderie n’était donc qu’un coup de bluff destiné à mettre la pression sur les autorités maliennes. »
C’est « une bonne nouvelle dans la lutte contre le terrorisme dans le Sahel, renchérit WakatSéra, et singulièrement au Mali où quatre soldats viennent encore de tomber, pris pour cibles par les forces du mal. Aucune force ne sera de trop pour mettre hors d’état de nuire ces hommes sans foi ni loi qui endeuillent armées et populations civiles au quotidien. Surtout qu’ils sont en train d’étendre progressivement leur terrain de chasse à toute l’Afrique de l’Ouest. Dans le même temps, relève encore WakatSéra, il faudra aux États africains de se préparer au départ de la force française Barkhane, annoncé par Emmanuel Macron. C’est, sans aucun doute, l’occasion pour ces pays de réfléchir sur la prise en main de la défense de leur intégrité nationale, véritable domaine de souveraineté nationale. »
Quoi après Barkhane ?
Justement, Le Monde Afrique s’interroge sur la fin annoncée de Barkhane : « Comment convaincre aujourd’hui ses partenaires que la transformation profonde et “la fin de Barkhane en tant qu’opération extérieure” ne cache pas un sauve-qui-peut opérationnel ? “Le but de l’annonce est sans doute de soumettre les autorités maliennes à un électrochoc pour les pousser à accélérer les réformes de gouvernance et dans le secteur de la sécurité, mais la France doit expliquer aux Maliens et à ses partenaires quel dispositif elle maintiendra sur place”, explique un diplomate européen en poste à Bamako. Une autre source européenne évoque le risque de “démobilisation”. “La plupart des partenaires de la France sont à sa remorque”, ajoute-t-elle. Or le désengagement français créera un vide, au mieux temporaire. Actuellement, estime encore Le Monde Afrique, ni Takuba – qui tarde à prendre son envol – ni les armées locales, ne peuvent prendre le relais des opérations françaises, alors que des sources au ministère des Armées évoquent la fermeture de plusieurs bases militaires dans le nord du Mali et une réduction de moitié du contingent de Barkhane à l’horizon 2023. »
La Minusma renforcée ?
C’est dans cette optique que Drissa Traoré, coordinateur national de l’Association malienne des droits de l’homme, appelle, dans Jeune Afrique, au renforcement de la présence de l’ONU au Mali.
« Aujourd’hui, le contexte sécuritaire est toujours volatil en dépit de l’engagement des Casques bleus et d’autres forces internationales, nationales ou régionales. Et si certains réclament le départ des forces étrangères, il ne faut pas se leurrer, estime Drissa Traoré, l’armée malienne n’est pas encore prête à faire face, seule, aux défis sécuritaires. Nous avons besoin des casques bleus : même s’ils ne sont pas aussi efficaces qu’on pourrait l’espérer, ils constituent une force de dissuasion. Mais, conclut le coordinateur national de l’Association malienne des droits de l’homme, le mandat de la Minusma doit être renforcé, non seulement sur le plan militaire, mais aussi sur le plan civil et politique avec comme priorité la protection des populations civiles, car ce sont elles qui continuent à payer le lourd tribut de ces conflits ».