Tout est allé vite le vendredi dernier ! Une délégation de la plateforme « An tè, A bana. Touche pas à ma constitution » est reçue à Koulouba par le président de la République, Ibrahim Boubacar Keita, en présence de notabilités et de religieux de la capitale. Dans la soirée, le chef de l’Etat lors d’une allocution à la télévision annonce sa décision de « sursoir » à la révision de la constitution de 1992. Ainsi, prend fin un bras de fer entre le pouvoir et le mouvement « An Tè, A Bana » qui conteste cette révision. Le samedi dernier, la plateforme a aussitôt transformé sa marche projetée sur l’Assemblée nationale en meeting de victoire, pour célébrer la fin ( ?) de deux mois (juin-août 2017) de combat. Alors A Bana !
Après deux mois de grandioses manifestations (marches et meetings) organisées par la plateforme « An Tè, A Bana-Touche pas à ma Constitution ! » qui ont mobilisé plusieurs centaines de milliers de personnes à Bamako, dans les régions et à l’extérieur, le chef de l’Etat, Ibrahim Boubacar Keita a finalement décidé de « sursoir » à son projet (controversé) de révision constitutionnelle. Celle-ci menaçait la stabilité politique, institutionnelle et sociale du pays. Ce meeting a été décidé pour remplacer la grande marche sur l’Assemblée décidée le mardi dernier, à l’expiration de l’ultimatum lancé au chef de l’Etat…
Ainsi, le samedi matin, ils étaient plusieurs milliers de personnes à prendre d’assaut l’avenue de l’indépendance pour participer au meeting de la plateforme « An tè, A Bana .Touche pas à ma constitution !».
Le samedi, à la Bourse du travail, les slogans étaient : « On a gagné ! », « Fiers d’être maliens !» ou encore « le combat continue !». Pour certains, la décision du président de sursoir au référendum n’est pas suffisante, il faut un retrait pur et simple. D’autres soutiennent que le moment est venu de tenir de larges concertations inclusives afin d’amender la constitution du 25 février 1992.
La mobilisation des partisans du NON est le signe de leurs engagements à rester vigilants pour la défense des acquis démocratiques. Plusieurs manifestants ont souhaité que le rassemblement du jour marque le début d’une nouvelle ère pour un véritable changement citoyen.
D’autres combats à mener…
Des responsables du mouvement et politiques ont, tour à tour, pris la parole. Il s’agit notamment du vice-président de « An tè, A Bana », du chef de file de l’opposition, Soumaïla Cissé, Tiébilé Dramé du Parena, Oumar Mariko de Sadi, Hamadoun Amion Guindo, président de la Confédération syndicale des travailleurs du Mali (Cstm) , Youssouf Ali Bathily (Ras Bath)…
Amadou Thiam, 1er vice-président de « An tè, A Bana », a remercié l’ensemble du peuple malien pour son combat dans la défense de la constitution de 1992. Il a rappelé les grandes étapes du combat mené par la plateforme ; et qui ont finalement abouti à cette décision du président de la République… Cependant, M. Thiam a précisé qu’il reste « beaucoup d’autres combats » ; et pour cela la plateforme demeura active.
Le chef de file de l’opposition, Soumaïla Cissé a loué l’esprit de civisme qu a caractérisé le mouvement de contestation. « Pendant les marches, les meetings, aucun acte de violence, de dégradation de biens publics, privés n’a été constaté », a souligné Soumaïla Cissé. « Cela est une leçon de maturité politique et d’esprit de citoyenneté de la part des jeunes engagés dans la plateforme » a –t-il affirmé.
Le leader du Parena, Tiébilé Dramé, invite les Maliens à demeurer vigilant dans la défense des acquis de la révolution de 1991. Il a surtout insisté sur le retrait pur et simple du texte. Avant de se réjouir de la mobilisation constante des maliens tant à l’intérieur qu’à extérieur du pays.
Pour sa part, le président de Sadi, Dr Oumar Mariko a exhorté les Maliens à se tenir débout ; débout pour la dignité et la défense de la démocratie. Mariko de plaider pour une alternance politique. Oumar Mariko a fustigé la gouvernance actuelle faite de corruption et de fuite en avant permanente. « Le Mali val mal ! Tous les domaines sont touchés, IBK a perdu le contrôle du navire Mali à cause de sa léthargie. Il est simplement dépassé par les événements. Une seule solution qu’il décide de ne plus se représenter aux élections présidentielles de 2018 », a-t-il martelé.
Pour Hamadoun Amion Guindo, président de la confédération syndicale des travailleurs du Mali (Cstm) ; seule l’Union fait la force et rien ne peut arrêter la volonté d’un peuple souverain. « Pendant plus de deux mois vous avez fait montre de détermination et d’imagination pour aboutir à ce résultat. Sachons maintenir la grande mobilisation et l’aspiration du peuple à une nouvelle pratique dans les affaires publiques », a affirmé le leader syndical.
Très attendu était l’intervention de Yousouf Ali Bathily dit Ras Bath. Il a remercié la foule pour sa forte mobilisation. Bath a réaffirmé le caractère inopportun du projet de referendum. «Le pays a besoin d’autres priorités. Les problèmes d’eau, d’électricité, de santé sont essentielles plutôt qu’une aventure ». Avant de poursuivre : « Désormais, nous serons beaucoup plus vigilants face à toutes tentatives de manipulation et de contournement de la volonté populaire. Ceci est une leçon mémorable pour tous les responsables politiques. Le peuple malien s’est enfin réveillé », a martelé Ras Bath.
Mémé Sanogo
Source: L’ Aube