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7 questions sur la normalisation des relations entre la Turquie et Israël

Les Premiers ministres de la Turquie et d’Israël ont annoncé, lundi 27 juin, la décision de normaliser les relations entre les deux pays. Après six ans de brouille, Ankara et Tel Aviv sont tombées d’accord sur un plan de route qui prévoit notamment d’envoyer une aide humanitaire à la bande de Gaza.

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L’un à Ankara, l’autre à Rome, Binali Yildirim et Benjamin Netanyahou ont annoncé la conclusion d’un accord de normalisation entre leurs pays, après six années de brouille causée par le raid contre le navire turc Mavi Marmara en partance pour Gaza, le 31 mai 2010.

 

L’accord doit être signé mardi 28 juin, et entériné par le Conseil des ministres en Israël et l’Assemblée nationale en Turquie dans les semaines qui viennent.

Le blocus de Gaza est-il levé ?

Après l’attaque meurtrière de 2010 qui avait causé la mort de dix citoyens turcs (dont un Turco-américain), le Premier ministre de l’époque, Tayyip Erdogan avait décidé de suspendre les relations bilatérales et avait avancé le respect de trois conditions pour la normalisation. Des excuses officielles, une compensation financière pour les familles des victimes et la levée de l’embargo contre la bande de Gaza.

En mars 2013, pour la première fois de son histoire, Israël présentait ses excuses.

Avec l’accord, Tel Aviv versera 20 millions de dollars (18 millions d’euros) destinés aux familles.

La question du blocus est plus compliquée. Yildirim a parlé d’un «allègement». Vendredi 1er juillet, un premier navire transportant 10 000 tonnes d’aide humanitaire, destinée à la bande de Gaza, se rendra dans le port israélien d’Ashdod sous la coordination de l’AFAD (l’agence turque chargée des situations d’urgence). L’acheminement de l’aide turque aux habitants de Gaza se fera à travers ce port et ne sera donc pas directement envoyée dans l’enclave palestinienne.

«L’embargo disparaît sous la houlette de la Turquie», a ajouté Yildirim. Le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, a toutefois indiqué que le blocus naval de la bande de Gaza par Israël se poursuivrait malgré la normalisation des relations avec Ankara.

Entre-temps, la Turquie construira un hôpital, une centrale électrique, une usine de production d’eau potable et une zone industrielle à Jénine. «Une occasion de respirer pour nos frères Gazaouis», «la Turquie va continuer à défendre les droits légitimes des Palestiniens», a assuré le chef du gouvernement turc.

Interrogé sur la question de savoir si cette décision ne revenait pas à reconnaître le blocus, Yildirim a préféré évacué la problématique. «Je ne partage pas cette opinion, il y a une situation de facto, les gens n’ont pas de relation avec le monde et ils essaient de vivre dans des conditions inhumaines».

«Quoi que d’autres en disent», a-t-il pris soin d’indiquer, visant l’organisation humanitaire IHH (Fondation à l’origine de la flottille de Gaza), qui a publié un communiqué pour rejeter cet accord. Yildirim a demandé à ne pas faire de fixette sur des «détails».

 

Les poursuites judiciaires contre les soldats israéliens sont-elles abandonnées ?

Israël s’est notamment engagée à verser 20 millions de dollars (18 millions d’euros) dans un fonds d’indemnisation pour les familles des dix Turcs tués lors de l’assaut contre le navire Mavi-Marmara en 2010.

Dans les coulisses, on indiquait qu’elle demandait en échange l’abandon par la Turquie de poursuites judiciaires contre les militaires israéliens. Si les responsables israéliens ont évoqué cette demande à l’AFP, le Premier ministre Binali Yildirim, interrogé lors de sa conférence de presse, a refusé de répondre à cette question.

Les activités du Hamas vont-elles être interdites en Turquie ?

Israël aurait également souhaité la fin des activités du Hamas en Turquie. L’un des chefs du groupe de résistance, considéré comme terroriste par Tel Avivi,Saleh al-Aruri, avait déjà quitté le sol turc en décembre dernier.

Interrogé, Yildirim a encore une fois été évasif en déclarant que «Les mécanisme diplomatiques vont continuer à exister». Hamas devrait garder son bureau à Istanbul. Relancé sur la question, le Premier ministre a dit : «Ce n’est pas un cessez-le-feu, c’est un accord sur la normalisation des relations. Il n’y a que trois sujets, rien d’autre».

Dimanche 26 juin, le président de la République a d’ailleurs rencontré Khaled Mechaal avant de parler au téléphone avec Mahmoud Abbas.

Le gaz israélien va-t-il transiter par la Turquie ?

L’accord ne prévoit rien sur la question mais l’impact économique d’un tel rapprochement ne fait aucun doute. Peu avant la conférence de presse, Benjamin Netanyahou avait déclaré que cette normalisation aurait «des conséquences immenses pour l’économie israélienne, et j’emploie ce mot à dessein. Je veux dire des conséquences positives, immenses».

Israël, qui doit commencer à exploiter des réserves gazières en Méditerranée, cherche en particulier des débouchés pour ce gaz. «Nous visons en premier lieu l’économie et les questions régionales», a abondé Yildirim. Le champ gazier du Léviathan situé près des côtes israéliennes a été découvert en 2010 (425 milliards de mètres cubes) et Tel Aviv a déjà commencé à tirer profit d’un autre champ pétrolier, celui de Tamar, situé également en Méditerranée, au nord-est du premier. Non seulement Israël va pouvoir réduire sa dépendance énergétique mais il exportera, à terme, 40% de sa production, notamment vers les marchés européens.

«Cette normalisation a beaucoup de choses à nous faire gagner, à nous, à Israël, à la Palestine et à toute la région. La région a besoin de cela», avait déclaré Erdogan en décembre, tout juste un mois après la brouille avec Moscou.

«Nous devons également accepter (le fait) que nous avons besoin d’Israël. C’est une réalité dans la région», avait-il dit en janvier.

Une aubaine pour Ankara qui, confrontée au durcissement de ton avec Moscou, souhaite se débarrasser de la dépendance énergétique vis-à-vis de ce pays.

La Fondation d’aide humanitaire accepte-t-elle cet accord ?

La réponse est clairement non. La Fondation a publié un communiqué sur son site Internet pour rejeter l’accord.

«Le blocus de Gaza est illégal et constitue un crime contre l’humanité», indique le texte qui demande à ne pas confondre blocus et embargo. Si négociation il y a, c’est le blocus qui doit être levé, pas l’embargo. «Ca revient à reconnaître officiellement le blocus, la Turquie ne doit pas prendre ce risque», poursuit le communiqué.

La Fondation rappelle que le sujet n’est pas de pouvoir acheminer de l’aide humanitaire, «la question principale à Gaza concerne la liberté».

Elle affirme enfin que les familles ne se désisteront pas des procès en cours et a critiqué indirectement le gouvernement qui refuse toujours d’envoyer à interpol les demandes de notice rouge pour les militaires israéliens. «L’histoire nous a montré qu’Israël n’avait jamais tenu parole et qu’elle n’avait jamais respecté un quelconque traité international», finit par affirmer le texte.

 

Comment la presse pro-Erdogan a-t-elle réagi ?

Toute la presse pro-Erdogan, qui avait tendance à conspuer Israël avec des sous-entendus parfois antisémites, s’est trouvée du jour au lendemain, enthousiaste.

Le plus fervent a été Sabah, qui a préféré résumer les choses en lançant que «la Turquie a réussi à lever le blocus de Gaza».

D’autres ont vu l’événement en plus petit. «Un air de printemps avec Israël», pour Türkiye. «La diplomatie de Gaza à Rome», pour Yeni Safak. «Israël a accepté toutes les conditions», pour Star. «La victoire de Gaza», pour Takvim . Yeni Akit préférait taire l’information principale pour parler de «l’attaque sioniste contre la mosquée al Aqsa».

La presse conservatrice était carrément abasourdie. Un «jour noir» a titré le journal ultra-conservateur Milli Gazete, proche du Saadet.

«Une page de honte dans notre histoire, on a serré la main à l’Etat d’israël sioniste», a-t-il lancé.

Le quotidien a publié la lattre de l’épouse de Çetin Topçuoğlu, une des victimes du Mavi Marmara : «J’aurais préféré me faire tirer dessus que de voir ce jour-là. Les mains qui vont signer l’accord, vous n’avez jamais lancé de pierre aux sionistes, n’est-ce pas ? Je m’en remets à Dieu».

«Nous refusons», a titré de son côté Vahdet. Les journaux de gauche ont préféré critiquer Erdogan et se sont fait le plaisir de republier toutes les paroles du numéro un turc qui promettait de ne jamais se réconcilier avec Israël tant qu’il serait au pouvoir.

Les ambassadeurs vont-ils reprendre leur poste de sitôt ?

Lundi soir, la chargée d’affaires de l’ambassade d’Israël à Ankara, Amira Oron, a d’ores et déjà été invitée au iftar donné par Yildirim aux ambassadeurs. La réconciliation scellée, les ambassadeurs devraient attendre encore quelques semaines pour retrouver leur poste.

Entre les deux pays, en effet, les relations n’avaient pas été rompues, seuls les diplomates avaient quitté leurs postes et la coopération militaire instaurée par des accords stratégiques en 1996 avait été gelée. La preuve en est que les échanges commerciaux ont doublé en cinq ans. En 2014, ils ont atteint un nouveau record avec plus de 5 milliards d’euros.

Mais ce rapprochement est sur le fil du rasoir. Si l’on se fie au tempérament d’Erdogan et aux agissements d’Israël, tout peut rapidement s’évanouir. Le ministre turc des Affaires étrangères, Mevlüt Cavusoglu, a déjà prévenu : «La normalisation ne signifie pas que, si nos frères palestiniens subissent des injustices dans l’avenir, on restera silencieux et on fermera les yeux».

ZAMAN FRANCE

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