Gilles Holder, anthropologue, co Directeur du laboratoire Macoter de Bamako répond aux 3 Questions de la rédaction sur le Chérif de Nioro.

Comment le Chérif de Nioro est-il entré dans la sphère politique ?

La politique l’intéresse, dès lors qu’elle impacte ses  affaires. Tant qu’il y a un accord tacite avec le pouvoir central de Bamako, le Chérif n’a pas de raison d’influer sur la scène politique nationale. Il n’est pas entré dans la sphère politique plus tôt parce que le pouvoir a toujours joué le jeu. IBK a en quelque sorte franchi la ligne blanche en lui demandant des comptes sur ses affaires.

Est-il aujourd’hui le vrai chef ?

Il ne faut pas inverser les rôles. Que les politiques défilent chez le Chérif et l’affichent, c’est de la communication politique classique. En fait, ils utilisent comme ils le peuvent les trois personnalités religieuses qui caractérisent l’Islam malien. L’Islam confrérique du côté du Chérif de Nioro, l’Islam wahhabite du côté de Mahmoud Dicko et l’Islam néo-confrérique ou populaire de Chérif Ousmane Madani Haidara. Entre les trois, les choses bougent. Le Chérif de Nioro est un peu hors du circuit bamakois et regarde les choses de loin. Les politiques vont le chercher là-bas comme caution.

Quel regard portez-vous sur sa relation avec l’Imam Mahmoud Dicko?

C’est l’alliance de la carpe et du lapin. Ils n’ont rien à voir ensemble. Ils ont tout qui les oppose, sur le plan théologique et même sur les plans sociologique et économique. C’est du travail politique. Je ne sais pas jusqu’où il appuiera Mahmoud Dicko, mais je pense qu’il y a des limites à cette alliance.