Nous sentons de l’hypocrisie dans le langage du ministre français de la Défense quand il disait qu’«il ne peut pas y avoir deux armées» à Kidal. En même temps, il tient ces propos et il exige du gouvernement de transition des négociations avec les populations du Nord. Quelles sont les populations du Nord avec lesquelles le gouvernement malien doit entamer des discussions ?
Dans ses propos, ce ministre français doit être précis. Il doit parler des Touaregs de Kidal qui sont animateurs au sein du Mouvement national pour la libération de l’Azawad (MNLA) pour la libération et l’indépendance de leur Etat qu’ils ont nommé «Azawad».
Nous ne voyons pas quelles discussions le gouvernement de transition doit entamer avec ce groupuscule sécessionniste, crée et médiatisé par l’Etat français, dans un pays laïc où la décentralisation est en pleine marche depuis l’avènement de «l’Etat démocratique».
On ne peut pas aimer une chose et son contraire. Si la France veut mettre en pratique ses plans déjà conçus, elle doit les mener d’une manière civilisée mais pas d’une brutale comme si on venait de rentrer dans l’ère de la colonisation.
Au Nord, les populations sont composées de Touaregs, d’Arabes, de Bellahs, de nomades peulhs et sédentaires, de sédentaires songhoïs, bozos, sorkos, bambaras, dogons, etc. Seuls les Arabes et les Touaregs ont pris les armes contre l’Etat du Mali. Les autres populations sont des victimes. Elles n’ont jamais causé du tort à la République du Mali.
La France doit comprendre que ce qu’elle n’a pas accepté en Corse, elle ne doit pas nous l’imposer. Le Mali n’est pas un pays colonialiste alors que la France l’est. La Nouvelle Calédonie est encore sous le règne de la colonisation française. La France, capitale des droits de l’homme avec la Révolution française de 1789 et cette révolution a abouti à la déclaration universelle des droits de l’homme. Au troisième millénaire, la France continue à piétiner les droits de l’homme. Quel paradoxe !
La France a déjà mis son plan qui est en marche. Avec l’intervention française pour la libération du nord de notre pays (dont la France a une part de responsabilité active et morale), l’armée malienne a participé avec l’armée française à la libération de toutes les régions du Nord sauf Kidal. Et avant que les troupes françaises n’entament seules la direction de Kidal, son chef militaire avait rencontré le Premier ministre de transition, M. Diango Cissoko. Qu’est ce qui avait filtré de leur rencontre ?
Nous ne sommes pas informés et l’ancien président français, François Mitterrand a dit : «Lorsqu’une zone d’ombre échappe au regard du peuple, il n’y a pas de République». La vérité finira par éclater, incha Allah. Le plan de la France est connu et il est dans son cheminement prévu. Faire une dichotomie des Etats du sahel, le Mali en sera le premier. La France finit avec le Mali, le Niger suivra et après le Tchad et le sud de l’Algérie et même la Libye n’est pas à écarter.
La tournée du ministre français de la Défense au Niger et au Tchad n’est rien d’autre qu’une campagne politique auprès de ces pays africains qui ont leurs troupes engagées au Mali, pour adhérer à leur plan machiavélique. Nous pensons que l’histoire donnera raison à l’ancien président sénégalais jusque dans sa tombe, M. Léopold Sédar Senghor.
Après le sommet de l’Organisation de l’unité africaine (OUA) en 1980 où plusieurs Etats africains avaient reconnu le Sahara occidental comme membre de l’OUA, il avait fait cette déclaration : «Chaque Etat africain aura son Sahara». Ce jour, Senghor a été accusé de tous les péchés et il a été fortement critiqué pour cette déclaration. Bien sûr, même si le problème sahraoui est un problème de décolonisation, la réalité est là aujourd’hui. Là où la France passe pour régler un problème, c’est pour s’enfoncer davantage.
Les Africains doivent se ressaisir car nous sommes en plein dans la recolonisation. Ces colons méchants ont mis leur plan en marche comme ils l’avaient fait avec la traite négrière et la colonisation. Ils vont procéder à la dichotomie de plusieurs pays à travers le monde pour exploiter leurs ressources. Ils n’avaient rien comme à la période de l’esclavagisme et de celle de la colonisation.
Regardez, en Libye, ils ont tué Kadhafi pour son pétrole. Les problèmes restent entiers dans ce pays, ils ne se soucient pas des problèmes libyens et ils continuent à exploiter le pétrole de ce pays qui est la cause de l’invasion de ce pays.
Les Maliens doivent s’unir dans la même voie et faire un seul bloc pour empêcher la France de mettre à exécution son plan. Pas d’élections sans la libération de Kidal. Il faut libérer et sécuriser tout le territoire malien avant d’aller aux élections. Il ne faut pas que la CDR (Commission Dialogue et Réconciliation) accouche d’une souris. Nous, nous pensons que le problème fondamental du Mali est un problème de justice et de gouvernance.
Sous Napoléon Bonaparte, il n’y avait pas de téléphone en France, mais l’empereur est informé de toutes les situations des provinces tous les 24 heures. Aujourd’hui, au 3ème millénaire où le téléphone pilule partout, avec une Sécurité d’Etat qui est présente sur tout le territoire de la République, un président de la République de n’importe quel Etat africain doit être informé de ce que son gouverneur est en train de tramer au niveau de sa région.
De ce que les enseignants font dans leurs classes. De ce qu’un préfet, d’un sous-préfet, d’un maire trament. Et le président de la République, et ses ministres ne sont pas blancs dans tout ça. C’est une obligation pour eux de demander des comptes à ceux qu’ils ont nommés dans leurs postes respectifs. Se renseigner et contrôler ne doit pas amener à la dictature. «La confiance n’empêche pas le contrôle». C’est une obligation au président de la République de veiller si la justice est bien rendue, si l’enseignement est bien dispensé.
Allez-y savoir si dans les cantines scolaires, les enfants mangent bien. Dans le temps, au niveau de toute l’administration, c’est une magouille organisée pour détourner la nourriture des enfants. Quelle honte ! Quand c’est avec les ressources de ces cantines que certains fonctionnaires scolaires célèbrent des noces et construisent des maisons et se payent des voitures.
Un enfant, produit du vol, ne peut pas avoir la baraka. Enseignants, balayez devant vos portes. Quand sur les routes, les agents de sécurité prennent de l’argent avec les passagers non munis de cartes d’identité sans leur donner des quittances. Voici le «salaire de la trahison».Voici des actes qui poussent un Etat dans la violence et l’insécurité.
La France et ses alliés ont leur plan, Dieu aussi à sa stratégie.
Que Dieu sauve notre pays. Amin.
Yacouba ALIOU
Source: Inter De Bamako