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Violation des droits de l’Homme : Temedt appelle le gouvernement malien à voter une loi discriminant l’esclavage par ascendance

Depuis quelques années, l’Association pour la consolidation de la paix, le développement, la promotion et la protection des droits humains (Temedt) lutte contre l’esclavage par ascendance qui sévit dans le nord du Mali. Malgré le silence coupable des autorités maliennes, les menaces de mort proférées par les maîtres d’esclaves à l’encontre des membres de l’association, ils sont parvenus à libérer certains d’entre eux. Au cours d’un atelier d’information et de sensibilisation organisé à Bamako mi mars par l’association, nous avons pu recueillir les témoignages de certains d’entre eux.

 

« Je m’appelle Timizwag. Je n’ai pas connu mon père, ma mère se nomme Timamat. Je suis née vers 1976 à Tassiriste ; mes maîtres sont de la fraction idoguiritane (commune de Ménaka). Depuis ma naissance, j’étais esclave avec ma mère de M. Adim Ag Kilitane. A l’âge d’environ 5 ans, ma mère a pris la fuite pour me laisser entre les mains de Talhante Walet Adim, une fille de mon maître. Après le décès de ma mère, j’ai été remise à son frère Hama- Ham Ag Adim, mon actuel maître, au service duquel je me trouve depuis 15 ans. Je n’ai plus de nouvelles de ma mère depuis sa fuite et ne je sais d’où elle est venue et comment elle s’était retrouvée chez Adim Ag Kilitane. On m’a seulement dit que c’est son esclave. Aucune personne n’est jamais venue me dire qu’elle connaît les parents de ma mère. »

A la fin de son récit, un silence de cimetière s’est emparé de la salle. Avant que les uns et les autres ne se demandent comment cela est possible dans ce Mali. Et pourtant, c’est la triste réalité. Dans le nord du Mali, sévit encore un esclavage qui ne dit pas son nom. Les autorités maliennes, les ressortissants des régions Nord ainsi que les fonctionnaires qui y ont servi, sont conscients que certaines personnes vivent encore dans cet enfer. Malgré la Constitution qui dit que la personne est sacrée, les Ballas n’ont aucun droit dans leur propre pays. Mme Timizwag explique ne jamais porter d’habits neufs, seulement les haillons jetés par sa maîtresse ou ses proches, ni posséder des chaussures. Il ajoute que malgré la maladie, la grossesse, les premiers mois après l’accouchement, elle n’était pas dispensée du gardiennage des animaux en brousse.

Durant cette vie d’escale, elle a eu trois enfants (une fille, l’aînée et 2 garçons). Entre deux sanglots, elle dit que sa fille, Tidounane Walet Aklinine lui a été retirée à l’âge de 4 ans en 2004. Elle est aujourd’hui, au service de El Hadj Ag Adim, un des frères de mon ancien maître. Pour qu’elle ne s’évade pas, son maître attachait son fils Bilal Ag Asimaqate, né en 2009, à un pilier de la tente pendant toute la journée jusqu’à son retour la nuit avec les animaux vers 21 heures. Une autre raconte ce qu’elle a enduré durant ses années d’esclavage. Elle s’appelle Rhaychatou Walet Toucha, libérée le 6 mai par Temedt. Née en 1986 dans le cercle de Ménaka, après la mort de leur mère en 1993 ; à 7 ans Rhaychatou Walet Toucha et ses 4 frères ont été répartis entre les maîtres. Elle dit qu’elle a épousé par la force un homme parce que son maître voulait uniquement qu’elle ait une progéniture qui sera au service de ses enfants. Son maître ne lui cessait de dire que la meilleure façon de craindre Dieu et d’obtenir le paradis est d’obéir à son maître.

Aboubacrine Ag Kamotane a pris son courage avec ses deux mains en portant plainte devant le procureur de la République près du tribunal de première instance de Tombouctou. Voici une partie de sa déposition : « En 2004, j’ai acquis pour la première fois de ma vie (j’ai 50 ans) 2 brebis qui sont devenues en juin 2008, 14 bêtes et cela a été perçu comme un affront par M. Afna, mon maître, qui ne tolère pas que je goûte au statut de propriétaire de bétail. Il me fait violence physique à l’aide d’un bâton, (en ce moment mes poignets comptent des os brisés suite à ces coups de bâton) avant de confisquer les 14 bêtes arguant que je n’ai aucun droit de posséder quoi que ce soit. Cette situation de brimade s’est prolongée par la répartition de mes enfants, mes sœurs, les enfants de mes sœurs entre les proches du maître et finalement le jeudi 5 février 2009, je me suis décidé à venir porter plainte et me séparer définitivement de M. Afna.

L’autre violence ou humiliation, j’ai une fille majeure et 2 deux sœurs. Ces femmes sont données en mariage contre dot au profit de M. Afna sans leur consentement ni le mien. Je précise que je suis l’aîné de la famille, nos parents ne sont plus en vie ». Dans la lettre, il rappelle que depuis la Déclaration universelle des droits de l’homme en 1948, l’esclavage et les autres pratiques ont été abolis sur toute la planète et au Mali, en particulier. Il réclame des droits en vertu des articles 29, 32, 133, 240, 541, 242, 243, 244 du code pénal malien.

Dans cette partie du Mali, le statut d’esclave s’acquière par la mère. Ce sont les enfants de la femme esclave qui sont esclaves. Les autorités maliennes sont au courant de cette pratique dégradante. Chaque fois que les intéressés se plaignent, la gendarmerie, la police et la justice se disent incompétentes. Elles les invitent à aller porter l’affaire devant un chef religieux. Cette faiblesse de l’administration malienne est en passe d’être comblée par Temedt qui se bat sur tous les fronts pour la fin définitive de cette pratique. A la fin de cet atelier, elle a invité le gouvernement à adopter une loi pour interdire cette pratique d’un autre âge. Créée seulement en 2006 et animée par les libérés, elle a à son actif la libération de milliers d’esclaves.

Yoro SOW

 

SourceInter de Bamako

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