Plusieurs jeunes déplacés arrivent sur les sites de déplacés à travers le pays, porteurs d’expériences précieuses telles que l’agriculture, l’élevage et d’autres métiers. Parmi eux, certains ont également bénéficié de formations et participent à des programmes de renforcement des capacités. Ces initiatives, soutenues par l’État et ses partenaires, visent à outiller ces jeunes pour leur autonomie financière et à faciliter leur intégration sociale.
Reportage
Au milieu des tentes de fortune qui engloutissent sa petite entreprise située sur le site de déplacés de Faladiè, à Bamako, Nouhoum Koné observe avec nostalgie, ce qui reste de son projet d’élevage de bœufs. Ce trentenaire, originaire de Bankass, est arrivé avec une expérience avérée dans ce domaine, un atout qu’il n’hésite pas à mettre en avant auprès de ses visiteurs.
« On peut mettre 25 bœufs ici, et 25 autres là-bas. Cela facilite un peu le travail », nous explique notre interlocuteur en regardant un espace vide.
Un rêve brisé
Habillé d’un jean noir et d’un t-shirt blanc, avec un air de désespoir, Nouhoum fait partie d’un groupe de jeunes ayant bénéficié de formations offertes par des ONG comme ENDA Mali et la Croix-Rouge. Ces programmes, mis en œuvre sous la supervision de la direction régionale du Développement Social de Bamako, ont permis à ces jeunes d’acquérir des compétences et de recevoir des équipements. Malheureusement, pour certains comme Nouhoum, ce projet d’accompagnement n’a pas pu aller à son terme.
« On nous a appris à faire toutes sortes d’élevages, y compris l’embouche, et nous avons obtenu nos diplômes. Mais aujourd’hui, nous n’avons plus de travail », confie le jeune homme, les yeux remplis de larmes. Il poursuit : « Nous étions sept à recevoir quatre bœufs, soit un pour deux personnes. Ce n’était pas suffisant. Et nous avions du mal à nourrir ces animaux ». Aujourd’hui, les activités sont arrêtées, car le groupe devait cotiser pour nourrir les bœufs. « Nous n’avions pas toujours l’argent pour cela », regrette Nouhoum.
Autre lieu, même réalité
Dans la région de Bandiagara, au centre du pays, certains jeunes affirment avoir bénéficié de programmes similaires et d’un accompagnement adéquat, tandis que d’autres voient leurs besoins essentiels négligés. L’un d’eux raconte : « certains ont reçu des moulins. Certaines femmes fabriquent des savons et les vendent. Moi, je conduis un tricycle qui m’a été offert. Un projet nous a aussi soutenus financièrement avec une somme de 250 000 francs ».
Cependant, sur le même site, un autre jeune déclare n’avoir jamais bénéficié de formation. « Je me suis débrouillé pour trouver du travail. Quand ils viennent, ils nous donnent de petites sommes et repartent. Ce dont nous avons vraiment besoin, c’est d’un vrai travail ».
Certains s’en sortent !
À Ségou sur le site de Sébougou par exemple, deux jeunes déplacés témoignent de leur satisfaction vis-à-vis de l’accompagnement qu’ils ont reçu.
« Nous avons été formé en électricité et en installation de panneaux solaires. Après la formation, on nous a donné nos diplômes, ouvert des comptes bancaires, et nous avons reçu des équipements », raconte le premier. Le second rajoute qu’« en plus de cela, ils nous ont donné une somme d’argent ».
Un autre jeune se félicite de l’expérience acquise : « Nous avons effectué des stages. J’ai fait mon stage à Fana, où nous avons installé les panneaux du commissariat de la police ».
À Gao, au nord du pays, Ibrahim Maïga, un jeune déplacé venu de Tallatey, prouve que certains déplacés peuvent réussir à s’intégrer. Après avoir exercé son ancien métier de vendeur de pièces détachées, il a participé à des programmes qui l’ont transformé en véritable chef d’entreprise.
Il raconte : « En tant que déplacé, j’ai bénéficié de six mois de formation en électricité, menuiserie et réparation d’engins. Après la formation, on m’a donné des outils pour travailler à mon propre compte. Aujourd’hui, je remercie Dieu, car j’ai deux personnes qui travaillent avec moi ».
Restons au nord pour nous rendre à Ménaka. Le directeur régional du développement social et de l’économie solidaire rapporte qu’environ 386 jeunes déplacés ont bénéficié de programmes d’accompagnement. Bien que ces chiffres soient encourageants, Ahmadou Hachimi Dicko reconnaît que les résultats sont encore insuffisants au regard des besoins énormes. Selon lui, les jeunes déplacés ont participé à plusieurs programmes de renforcement des capacités, notamment en Activités Génératrices de Revenus (AGR). Toutefois, il souligne un problème majeur : l’insuffisance des matériels d’accompagnement. « Certains sont formés sans être soutenus par les programmes », précise-t-il.
Pour remédier à cette situation, le directeur régional préconise de multiplier les programmes de formation, mobiliser davantage de ressources financières pour ces jeunes et solliciter l’appui des partenaires techniques et financiers.
De leur côté, les jeunes insistent sur la nécessité de proroger le suivi des programmes et de leur donner la possibilité de travailler dans des entreprises de référence pour approfondir leurs compétences et créer un réseau professionnel.