L’information a circulé comme une trainée de poudre, vendredi dernier : la réunion extraordinaire du jeudi 11 avril du Bureau Politique du RPM, élargie au Groupe parlementaire du même parti, a pris la décision de déposer une motion de censure contre le Premier ministre, Soumeylou Boubèye Maiga.
Cette intention du parti présidentiel alimente les discussions sur les réseaux sociaux, dans les QG et structures des formations politiques, sur les antennes des radios et télévisions privées. Au marché, dans les ateliers de travail, les établissements scolaires, les bars, les chantiers, cette conception de Bocary Treta et de ses camarades anime les échanges, de façon passionnée souvent.
Cette idée de motion de censure contre leur propre gouvernement est une première en République du Mali. Elle est rarissime dans une démocratie qui se respecte.
Il faudrait donc attendre cette semaine pour voir si les Tisserands oseraient franchir le rubicond, à travers le dépôt effectif d’une motion de censure, conformément à l’article 96 du règlement intérieur de l’Assemblée nationale : « Le dépôt des motions de censure est constaté par la remise au président de l’Assemblée nationale, au cours d’une séance publique d’un document portant l’intitulé « Motion de Censure » suivi de la liste des signataires d’au moins 1/10 des membres de l’Assemblée ». C’est dire qu’à ce jour, malgré les intentions des uns et des autres, aucune motion n’a été déposée. En effet, ce lundi 15 avril, la conférence des Présidents de l’Assemblée nationale (composée du Président, des vice-présidents, des présidents des groupes parlementaires, des présidents des commissions générales, du rapporteur général de la commission des finances et un questeur) se réunit de façon ordinaire, à 15 h, pour la programmation de la séance plénière. C’est cette instance qui décidera de convoquer une plénière dès ce mardi ou mercredi ou encore jeudi. Plusieurs questions orales relatives à la sécurité, à la défense, à l’habitat… de Mamadou Hawa Gassama Diaby, du Dr Oumar Mariko et bien d’autres, sont sur la table de l’Assemblée nationale pour être programmées. A la faveur de celles-ci, une ou plusieurs motions de censure envisagées pourraient être constatées. Dans cette optique, le président de l’Assemblée nationale notifie la motion de censure au gouvernement et en donne connaissance à l’Assemblée nationale. Ensuite, la même conférence des Présidents fixe la date de discussion des motions de censure qui doit avoir lieu au plus tard le 3ème jour de séance suivant le jour du dépôt.
S’il y a plusieurs motions, la Conférence peut décider qu’elles seront discutées en commun, sous réserve qu’il soit procédé pour chacune à un vote séparé. Il est retransmis en direct par les médias d’Etat. Ce qu’il faut savoir, ce que l’adoption d’une motion de censure à la majorité des 2/3 des membres de l’Assemblée nationale entraine automatiquement la dissolution du gouvernement.
Voilà pourquoi, nous estimons que le RPM peut et doit se ressaisir. Comment comprendre que le parti majoritaire, avec plus de 10 ministres dans un gouvernement, puisse faire tomber celui-ci, sans consentement du président de la République ?
En voulant agir ainsi, le RPM ajouterait à la crise multiforme que vit notre pays. Il défierait également son président IBK, lequel s’est clairement montré opposer à la démarche de Bocary Treta et de certains de ses camarades. Les intentions affichées par ces derniers pourraient donc ne pas se réaliser. A contrario, s’ils engagent un bras de fer avec IBK, parce qu’il le considère aujourd’hui comme « faible et sans autorité », ils pourraient bel et bien perdre la bataille. D’abord, Boubèye ne se laissera pas abattre comme une bête sacrificielle. Il compte bien sur son groupe parlementaire, celui de l’Adema qu’a juré de ne voter aucune motion, et certains éléments disparates du RPM. Sans compter le soutien d’IBK, qui n’a, pour l’instant, entamé aucune démarche envers ses députés. La donne pourrait varier à tout moment. Il suffit qu’IBK s’engage nettement pour que certains tournent dos à Treta. Cependant, le pourrissement de la situation n’est pas en faveur d’IBK. S’il tient réellement au maintien de son Premier ministre, il doit vite agir et bien.
En tout état de cause, le RPM se trompe lourdement de combat. Incapable d’appuyer le gouvernement, de combattre les adversaires politiques, de dénoncer les agissements de la Khatiba Amadou Kouffa, au centre du pays, le RPM projette de scier naïvement l’arbre sur lequel, il est confortablement assis. Que les fans de Treta sachent que s’ils parvenaient à faire tomber la digue qu’est SBM, IBK sera sérieusement mouillé, et le RPM pourrait bien se noyer, au point de mourir de sa plus belle mort. Peut-être que les Tisserands préfèrent jouer à « Bougouni examen ». Suivez mon regard !
El Hadj Chahana Takiou
Source: Le 22 Septembre