Dans la ville de Sevaré et dans les villages environnants, la peur s’est emparée des populations depuis l’affreux assassinat de quatre paisibles citoyens sauvagement égorgés il y a quelques semaines. La terreur est d’autant plus grande que nul ne sait encore qui était derrière ces abominations. Des atrocités qui évoquent en tout cas le drame algérien des années 1990 où les fondamentalistes multipliaient ces genres
Selon le frère d’un rescapé contacté par L’Aube, les complices de ceux qui ont pu commettre ces crimes sont dans la région. D’ailleurs, la libération d’un suspect arrêté au lendemain du drame a provoqué la colère des habitants de la localité, a expliqué cet habitant du village de Barbé. «Mon jeune frère, qui est actuellement admis à l’hôpital, partageait une chambre avec une des quatre victimes », a-t-il ajouté.
A en croire les habitants de la localité, aucun rescapé n’est en mesure d’identifier les auteurs de ces meurtres qui n’ont pas été revendiqués. «Tout s’est passé dans la nuit à une heure tardive, au moment où les gens dorment », a raconté un habitant de Barbé.
Dans la matinée du samedi 6 septembre, les habitants de Sevaré se sont réveillés dans cette tragédie qui a secoué toute la région de Mopti. Parmi les quatre personnes égorgées dans cette région en proie à des tentatives d’expansion des groupes armés du nord du pays, il y avait un boutiquier. Son corps gisait non loin d’un commissariat de police.
Des sources locales ont aussi révélé que parmi les victimes figure un peulh et sa femme. Des ressortissants ont estimé que des bandits de grand chemin qui écument toute la zone seraient responsables de ces assassinats. Toute fois, la piste djihadiste est la plus évidente étant donné que des prosélytes de renom sont connus pour avoir joué un rôle important dans la tentative d’occupation du Sud du pays avec l’offensive contre Konna en 2012.
L’ombre d’un terrible djihadiste
Le terrible Amadou Koufa, un prêcheur local ayant rejoint Ansar Dine de Iyad Ag Ghali, était notamment pressenti pour diriger le califat que les djihadistes projetaient de mettre en place. Ce virulent prêcheur, né dans la région de Mopti, était connu de tous. Pour un habitant de la localité, sa radicalisation n’est pas surprenante et nombreux sont encore des villageois qui sont acquis à sa vision extrémistes.
Aucune explication n’a été donnée pour l’instant par le gouvernement malien. Au même moment, de nombreux criminels affiliés aux groupes terroristes sont mis en liberté. Des organisations de défense des droits de l’homme ont vivement critiqué le gouvernement au sujet de ces libérations qui sont une violation grave des droits des victimes.
L’Association malienne des droits de l’homme (AMDH) s’est déclarée inquiète de la mise en liberté de ces criminels de guerre. Il y a peu, une marche de protestation avait réuni plusieurs centaines de personnes dans la capitale malienne. Ce que craignent les organisations de défense des droits de l’homme, c’est la perpétuation des crimes et l’instauration de l’impunité.
Par ailleurs, les autorités maliennes n’ont rien entrepris pour mettre les populations locales à l’abri des attaques et autres formes de violence dans la région de Mopti. Des éleveurs peulh et des forains sont continuellement victimes d’attaques de la part d’éléments armés issus des rangs de groupes armés présents au nord du pays. Le retrait de l’armée malienne après les incidents de Kidal en mai dernier a davantage contribué à la dégradation de la situation sécuritaire dans la zone.
Si rien n’est fait pour arrêter les coupables de ces crimes odieux, leurs auteurs pourraient poursuivre leur basse besogne dans ces localités abandonnées. Ce que l’on peut craindre est l’instauration d’un désordre aboutissant à des règlements de compte et à des scènes de vendetta face à l’absence de l’Etat dans les localités concernées. Le silence coupable des autorités maliennes ne rassure pas les citoyens qui s’attendent à la poursuite des actes analogues.
Soumaïla T. Diarra