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Sécurité et défense, les choix qui attendent le futur président français

« La France est aujourd’hui au centre du débat sur la défense européenne »

Paul Taylor, analyste pour le site Politico

Mardi 25 avril 2017, dans une étude réalisée pour Friends of Europe

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Au soir du 7 mai 2017, la France aura un nouveau président – moins probablement, une nouvelle présidente. Celui-ci exercera ses fonctions dans un contexte inédit en matière de défense, qui oblige les Français et les Européens à repenser ensemble leur sécurité.

Trump et le Brexit

D’une part, la politique « l’Amérique d’abord » du président Donald Trump remet en question la garantie stratégique américaine assurée via l’Otan par les États-Unis, ainsi que  le soutien traditionnel qu’ils apportent à l’Union européenne et au libre-échange. Le Brexit, quant à lui, rend plus incertaine la solidarité du Royaume-Uni avec les Européens en cas de menace extérieure et affaiblit le partenariat bilatéral de défense qui le lie à la France – les accords de Lancaster House -,  même si les deux pays affirment vouloir poursuivre leur coopération.

Poutine et les djihadistes

De son côté, la Russie de Vladimir Poutine, qui a annexé la Crimée et qui entretient un conflit séparatiste en Ukraine, déstabilise délibérément l’Union européenne par des provocations militaires et des cyberattaques, mais aussi en soutenant certains leaders populistes europhobes. Enfin les attentats djihadistes font peser une menace directe sur des citoyens français et européens et durcissent le contexte politique.

Les Allemands plus volontaristes

La conjugaison de ces facteurs conduit depuis quelques mois les Européens, et notamment les Allemands, à envisager d’une façon plus volontariste une politique de défense commune. Dans cette situation, le prochain président français devra effectuer des choix judicieux et décider s’il inscrit davantage la politique de défense française dans une stratégie d’envergure européenne, à un moment où, pour la première fois, nombre de dirigeants internationaux souhaitent profondément l’affaiblissement de l’Europe, explique Paul Taylor, un ancien journaliste de l’agence Reuters, travaillant aujourd’hui pour le site Politico.

« Marche ou crève, la France et la défense européenne »

Vivant en France, ce Britannique spécialisé sur les questions européennes et diplomatiques vient de réaliser pour le think tank Friends of Europe une étude pertinente intitulée « Marche ou crève, La France et l’avenir de la défense européenne ». Un de ses aspects intéressants est de détailler les enjeux de politique industrielle, notamment dans un contexte franco-allemand. J’ai choisi de développer les conclusions du document.

« Quatre possibilités »

« Le président verra quatre grandes possibilités s’offrir à lui, sachant qu’elles ne sont pas exclusives l’une de l’autre », écrit Paul Taylor.

« Première option : cavalier seul »

« Cavalier seul. C’est la vision gaulliste traditionnelle. La France devrait agir le plus possible seule, tant sur le plan militaire que sur le plan industriel, car elle doit maintenir une capacité technologique et industrielle complète et que ses partenaires ne partagent ni ses priorités stratégiques, ni son goût pour les interventions expéditionnaires ».

« Les principaux avantages sont la liberté d’action pour le président, l’absence d’entraves aux interventions extérieures et la préservation de l’écosystème de l’industrie militaire nationale. C’est la vision de Marine Le Pen mais la plupart des stratèges affirment qu’au XXI° siècle, la France ne peut se permettre ni financièrement, ni militairement, de faire cavalier seul ».

« Deuxième option : Tout à l’Europe »

« Tout à l’Europe. Dans ce scénario, la France devrait privilégier : 1) la création d’une capacité de défense de l’Union européenne, afin de pouvoir agir là où l’Otan choisit de ne pas intervenir; 2) une coopération structurée permanente dans un cadre européen; 3)  un fonds européen pour la défense, qui financerait les acquisitions conjointes de systèmes et de capacités d’armement prioritaires; 4) un commandement central de l’Union, afin de planifier et de diriger des opérations en dehors du cadre de l’Otan ».

« L’objectif d’une ‘autonomie stratégique européenne’ »

« A la demande de la France », note Paul Taylor, « la stratégie de globale de sécurité de l’UE a déjà fixé l’objectif d’une ‘autonomie stratégique européenne’ ouvrant en principe la voie à une industrie de la défense transfrontalière, rationalisée et plus intégrée. Certains projets communs ont déjà été lancés, notamment un commandement européen du transport aérien permettant aux plus petits pays d’acheter l’utilisation partagée d’actions de transport militaire ».

« Augmenter les fonds européens »

« L’une des principales exigences françaises est d’augmenter les fonds européens pour la recherche et le développement, pour l’acquisition d’armes et pour les opérations militaires UE. L’ancien ministre de l’économie Thierry Breton a suggéré en 2016 la création d’un fonds européen de la défense. Ce fonds profiterait des faibles taux d’intérêt et de liquidités abondantes pour émettre des obligations à long terme en vue de rembourser une dette publique équivalent au montant dépensé dans le domaine de la défense depuis la création de la zone euro et de financer les futurs achats d’armement. Cette mesure réduirait la dette publique française de 96% à 61% du produit intérieur brut – soit quasiment le niveau fixé par les règles budgétaires de l’UE ».

« Troisième option : le bilatéralisme européen »

« Le bilatéralisme européen. Dans ce scénario, la France privilégierait la coopération bilatérale ou trilatérale avec ses grands partenaires européens en dehors du cadre de l’UE, en particulier avec ses alliés clés tels que le Royaume-Uni, l’Allemagne, l’Italie, l’Espagne et si possible la Pologne. Son autonomie et son influence serait ainsi maximisées tout en contournant les obstacles et la bureaucratie de l’UE ».

« Maintenir un lien avec la Grande-Bretagne »

« La coopération bilatérale avec la Grande-Bretagne est déjà florissante dans le secteur militaire, avec une task-force expéditionnaire conjointe composée de près de 10 000 soldats des deux pays qui devrait bientôt être déclarée opérationnelle. Maintenir un lien entre la Grande-Bretagne et la sécurité et la défense européennes sera un défi majeur à relever après le Brexit. Jean-Dominique Giuliani, président de la Fondation Robert Schuman à Paris, a proposé un traité trilatéral de défense mutuelle entre la France, l’Allemagne et la Grande-Bretagne ».

« Berlin réalise que sa propre sécurité est en jeu au Sahel »

« Quant à l’Allemagne, les perspectives de projets bilatéraux pourraient s’éclaircir à présent que Berlin commence à réaliser que sa propre sécurité est en jeu en Afrique du Nord et au Sahel. Dès que possible, cette collaboration serait étendue à la Pologne dans le cadre du triangle de Weimar – mais cela nécessitera un esprit plus coopératif que celui affiché par le gouvernement nationaliste polonais depuis son entrée en fonction en 2015 ».

« Quatrième option : le pilier européen de l’Otan »

« Le pilier européen de l’Otan. Dans ce scénario, la France viserait à développer les capacités et forces européennes sous l’égide de l’Otan, évitant la duplication des sièges militaires et des groupes de planification et se servant d’un cadre éprouvé qui permet l’interopérabilité (normes communes, formations et exercices communs) et qui associe les États-Unis à la sécurité européenne ».

« Les États-Unis, principaux protecteurs »

« De nombreux partenaires européens privilégient en effet l’Otan. La Pologne, les États baltes et les pays d’Europe centrale souhaitent maintenir le lien avec les USA qu’ils considèrent comme leur principal protecteur contre la Russie. Nombre d’entre eux y voient également une puissance hégémonique plus lointaine et plus bienveillante que la France ».

« Une force d’intervention permettant à la France de ne pas être seul »

« L’un des rares partisans français d’une concentration des efforts de défense européens sur l’Otan est l’ancien ministre des affaires étrangères Hubert Védrine, un cacique de l’école réaliste devenu de plus en plus sceptique sur l’UE. Il explique que les Européens sont incapables de se défendre sans les États-Unis et l’Otan et qu’ils devraient se garder de créer des illusions. Pour lui, cela vaut la peine d’essayer de créer le pilier européen de l’alliance, pour avoir une force d’intervention extérieure qui permettrait  la France de ne pas être seule, comme elle l’a été au Mali ».

« Washington aimerait que l’Europe se prenne davantage en charge »

« Les États-Unis ne s’inquiètent plus depuis longtemps de l’idée d’une autonomie européenne de défense », ajoute Paul Taylor. « Washington aimerait que l’Europe se prenne davantage en charge, mais ne se fait pas trop d’illusions. De même, une plus grande coopération bilatérale ou multilatérale entre les grandes puissances européennes devrait profiter tant à l’UE qu’à l’Otan. Toutefois, l’intérêt politique à maintenir l’unité entre les 27 États membres restants de l’UE après le Brexit devrait inciter la France à mettre au moins une partie de ses œufs dans le panier de la Politique européenne de sécurité et de défense commune ».

« Un fonds européen de R&D militaire »

« Les Français devraient soutenir activement un fonds européen de R&D en matière militaire ainsi qu’un fonds commun pour les marchés, afin d’encourager l’acquisition prioritaire des capacités figurent sur la liste de l’Agence européenne de défense. Cette initiative pourrait être intéressante lorsque, par exemple, la France, l’Italie, la Belgique et la Finlande ont toutes besoin d’acheter au même moment un hélicoptère de combat aux spécifications similaires. Toutefois, les Français feraient bien de renoncer aux petits jeux comptables comme tenter d’exclure leurs investissements de défense au calcul du déficit budgétaire et d’utiliser la défense comme un motif déguisé d’annulation de leur dette. Le seul effet sera d’agacer les Allemands ».

« Un livre blanc conjoint français, allemand et européen »

« Il serait judicieux que fin 2017, les nouveaux gouvernements français et allemand élus, ainsi que la Haute représentante pour la politique étrangère et de sécurité commune et d’autres États membres capables et volontaires élaborent un livre blanc conjoint définissant un nombre restreint d’objectifs réalisables en matière de défense – assortis d’un calendrier. Ce livre blanc se fonderait sur l’évaluation consensuelle des menaces ainsi que sur l’objectif déclaré des chefs d’État et de gouvernement de parvenir à ‘l’autonomie stratégique européenne’ ».

« Organiser un sommet européen annuel sur la défense »

« Les dirigeants de l’UE devront s’approprier la coopération européenne en matière de défense en organisant des sommets annuels pour évoquer les menaces de sécurité, élaborer une analyse stratégique commune et étudier l’avancement de leur convergence dans le domaine de la défense. Ils devront obliger leur responsables militaires et leurs directions d’armement à se mettre d’accord sur des spécifications communes et sur un calendrier commun, et permettre ensuite aux aitres d’œuvre de sous-traiter en fonction des spécialisations et non de critères politiques ou relatifs à l’emploi. Il s’agit d’un défi de taille qui nécessitera que le prochain président français accepte de croiser le fer avec les intérêts particuliers dans le complexe militaro-industriel, même lorsque, à l’instar de Dassault, ils possèdent des médiats influents ».

« Pour une initiative raisonnablement modeste »

« Une initiative de défense européenne conduite par la France doit être pensée sur le long terme et raisonnablement modeste. Il faut du temps pour constituer les capacités militaires et les forces prêtes au combat. Le nouveau président aura l’opportunité unique de mener la politique européenne de coopération en matière de défense dans le cadre d’un grand compromis avec le prochain gouvernement allemand, qui devra prévoir également le renforcement de la zone euro. Il devra néanmoins se garder de faire trop de promesses ».

« Des priorités différentes »

« Au final, ces quatre options ne sont pas totalement incompatibles entre elles, mais elles reflètent des priorités différentes, en fonction de l’objectif visé. Paris doit réexaminer dans quelle mesure son intérêt national correspond ou se superpose à une définition collective de l’intérêt européen. Les dirigeants français ont souvent éludé cette question en agissant comme si le rôle de l’UE consistait seulement à être une France élargie ».

 

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