Après avoir souffert de la corruption, de la gabegie, du clientélisme, de l’insécurité grandissante, du mépris… pendant cinq ans, les Maliens avaient la possibilité de faire partir le régime IBK à travers le vote de dimanche dernier. Mais le constat est que, pendant cette journée électorale, des milliers de citoyens dans la souffrance ont préféré vendre leur voix à vil prix, notamment à 2000, 5000 et 10 000 FCFA pour encore vivre 5 autres années dans la détresse.
« L’esclave qui n’est pas capable d’assumer sa révolte ne mérite pas qu’on s’apitoie sur son sort. Cet esclave répondra seul de son malheur s’il se fait des illusions sur la condescendance suspecte d’un maitre qui prétend l’affranchir », disait l’ancien président Burkinabé, Thomas Sankara. Cette affirmation sied au cas de plusieurs électeurs maliens qui, malgré leur souffrance, n’arrivent pas à s’assumer et priorisent des miettes sur leur avenir.
Effectivement, après avoir décrié sa gouvernance chaotique pendant ce quinquennat, des millions de Maliens ont encore voté pour celui qu’ils jugent le plus mauvais président depuis l’indépendance du Mali. Dans le district de Bamako, dans les villes de Kayes, Sikasso, Ségou, le président candidat est venu en tête selon les résultats provisoires. Les Maliens ont-ils voté IBK par conviction ? Le doute est fortement permis, tellement les résultats de son 1er mandat sont négatifs. En effet, il n’a pu mettre fin à l’insécurité grandissante, alors qu’il était élu en 2013 pour y mettre fin avec de gros préjugés sur le prétendu homme de poigne qui clamait ne « jamais discuter avec un pistolet sur la tempe », se présentant ainsi comme détenteur de la clé de l’énigme du terrorisme qui sévissait au nord du pays. La suite est connue : la situation se dégrade de jour en jour, malgré un accord pour la paix et la sécurité obtenu au forceps et qui peine à être appliqué, parce que contenant des dispositions conduisant à un Etat fédéral. Ce qui est aux antipodes de la Constitution.
Des scandales financiers au détour desquels les caisses de l’Etat sont pillées
En plus, dans tous les secteurs, les Maliens souffrent et peinent même à avoir le minimum. Jamais la pauvreté n’a atteint un tel niveau dans ce pays, pendant que les dirigeants sont cités dans des scandales financiers, au détour desquels, les caisses de l’Etat sont pillées. Le dernier en date concerne la réfection du CICB surfacturée à 15 milliards de FCFA pour un bâtiment en bon état selon les experts, alors que la construction a coûté, avec le Général Moussa Traoré, 8,1 milliards de FCFA. Des raisons, parmi des dizaines d’autres, qui font que le peuple ne cesse de manifester son désir de changement. Il est donc impossible pour le président sortant de gagner cette élection sur la base de ce bilan.
Le dimanche 29 juillet, au moment où tout le monde s’attendait à un vote contre celui qui est à la base de la souffrance de sa population, ces mêmes électeurs maliens ont oublié leurs peines et malheurs, leur manque d’emplois, l’insécurité grandissante, la corruption, le clientélisme, le favoritisme… au profit de billets de banque de 2000, 5000, et 10 000 FCFA que distribuaient de véritables officines d’achat de conscience pour « imposer » par ce truchement le président de la République le plus incompétent de l’histoire du Mali.
« On ne vote pas sans argent »
C’est ce comportement des électeurs maliens qui est à la base du mépris du pouvoir politique à leur encontre. Les dirigeants volent toute la richesse du pays et achètent la conscience des électeurs peu soucieux de leur avenir. Que ceux qui se sont permis d’accepter de vendre leur âme au diable se préparent, une fois que le Châtelain de Sébénicoro parvienne à rempiler, à ne rien lui exiger comme performance de gestion des affaires publiques, puisqu’il les aurait « achetés », avec des billets de banque certainement tirés d’un « trésor de guerre » constitué sur le dos du contribuable malien.
Partout où on a passé à travers la ville de Bamako le jour du vote, on pouvait entendre les électeurs dire : « On ne vote pas sans argent », et certains précisaient être conscients de l’échec d’IBK, mais disaient quand même le voter parce qu’ils ont bouffé son argent. Pis, certains des électeurs disaient, toute honte bue : « Le soir on aura plus d’argent, donc on vote pour celui qui donnera le plus. » Le bilan des 5 ans d’IBK ne les a pas intéressés, son projet pour le Mali, dans les 5 autres années à venir, n’en parlons pas.
En effet, au vu des réalités vécues au quotidien dans ce pays et des complaintes des populations qui ont manifesté leur ras-le-bol, il était inimaginable que le président IBK soit en tête à Bamako, Sikasso …S’il est premier, c’est l’argent qui a fait le boulot car cet argent, privé aux populations pendant cinq ans pour subvenir à leurs besoins même des plus élémentaires, a coulé à flots le jour du scrutin.
Pour le moment, aucun résultat officiel n’est disponible, mais IBK est en tête et il va sans nul doute aller au second tour soit avec l’Honorable Soumaila Cissé ou avec Cheick Modibo Diarra car ce sont les deux candidats qui le talonnent, selon les résultats provisoires, non rendus officiels.
Le peuple face à son destin au second tour
Cette phase du 2ème tour sera un tournant décisif pour les Maliens. Le peuple sera face à son destin. En effet, soit il choisit de vendre sa dignité pour des sommes insignifiantes et voter IBK, acceptant ainsi de souffrir de la mauvaise gouvernance pendant 5 autres années, soit il choisit, par conviction de ne pas rater l’occasion de briser les chaînes du quasi esclavage dans lequel il est maintenu, pour voter l’adversaire du président sortant afin d’espérer obtenir le changement tant recherché.
Peuple du Mali, refusez l’achat de conscience et votez pour le candidat qui incarne l’alternance. Si le président est réélu par un second tour, ce qui voudrait dire sa gouvernance n’est pas mauvaise aux yeux des Maliens. Aussi, cela signifierait que les Maliens n’ont pas souffert sous sa gouvernance et ne doivent plus crier à la victime. Mais IBK et ses proches n’auront aucunement pas à se faire les gorges chaudes à propos d’une éventuelle victoire car si celui qui se prévalait d’un score à la Soviétique lors de la présidentielle passée, se trouve obligé de se bousculer dans le cadre d’un second tout aussi périlleux, cela signifie, plus concrètement, que Tiékoroba décéra !
Boureima Guindo
Source: Le Pays