Il se tait mais n’en pense pas moins. Parfois, il parle mais rarement de politique intérieure, son statut l’en empêche. Alors ses amis parlent pour lui, pour entretenir l’idée qu’un retour est possible (voire inéluctable). Que la prochaine élection présidentielle, ce sera pour lui. D’ailleurs, les sondages l’attestent: jamais il n’a été si populaire. Dans son camp, cela inquiète ses ennemis, ceux qui pensent que leur tour est venu. Du coup, chacun s’organise pour lui barrer la route. Mais le parti n’est pas en forme: pas de leader, pas de projet, pas de stratégie d’alliance. À tel point que des primaires sont envisagées pour départager les prétendants. S’agit-il de Nicolas Sarkozy et l’UMP? Bien sûr, mais pas seulement. À bien des égards, la «stratégie des cartes postales» – «à l’époque nous parlions plutôt de la stratégie des petits cailloux», nuance un ancien proche de DSK – que déploie actuellement l’ancien président de la République en rappelle une autre, celle que Dominique Strauss-Kahn avait mise en œuvre lorsqu’il dirigeait le FMI pour rester dans la course de la présidentielle de 2012.
Le décor d’abord. Celui d’un parti en crise. Comme le PS en 2008, l’UMP s’est offert une violente crise de succession pour la direction du parti. À l’affrontement entre Ségolène Royal et Martine Aubry au congrès de Reims en 2008, a répondu celui entre François Fillon et Jean-François Copé à l’automne 2012. Avec, à l’issue, un chef de parti à la légitimité entamée par des soupçons de triche. En retrait de ces crises, Dominique Strauss-Kahn et Nicolas Sarkozy ont alors commencé à endosser leur costume de possible recours. Tenus au silence sur la situation intérieure du pays, l’un par ses fonctions au FMI, l’autre par son statut de président de la République sortant, les deux hommes ont alors vu quasiment immédiatement grimper leur cote de popularité.
Ses adversaires le redoutent, ses soutiens préparent la piste d’atterrissage
Pour rester dans le paysage, Dominique Strauss-Kahn avait alors fait régulièrement des apparitions, sans jamais rien dévoiler de ses ambitions. En juin 2009, Anne Sinclair, qui était alors son épouse, organise pour lui un anniversaire surprise où quelques journalistes sont conviés, mais aussi des poids lourds du PS. Quatre mois plus tard, sa présence au mariage de son ami et premier lieutenant Jean-Christophe Cambadélis, fait encore beaucoup parler. C’est peu ou prou dans ce tempo que s’inscrit actuellement Nicolas Sarkozy lorsqu’il assiste aux concerts de son épouse Carla Bruni. Les apparitions de l’ancien président dans le public sont scrutées, ses déclarations soupesées, ses attitudes analysées.
Quant à ses intentions réelles, ce sont les autres qui en parlent le mieux. À la petite phrase de Bernadette Chirac qui avait assuré que Nicolas Sarkozy allait «évidemment» se représenter en 2017 répond celle d’Anne Sinclair qui avait glissé en 2011 à propos des fonctions de Dominique Strauss-Kahn au FMI: «Je ne souhaite pas qu’il fasse un second mandat.» La confidence avait alors enflammé le PS, tout comme l’UMP s’embrase aujourd’hui. C’est l’un des effets de la stratégie des «cartes postales»: elle permet aussi d’obtenir des réponses. Pour l’heure, celles que reçoit Nicolas Sarkozy sont tout aussi bonnes que celles de Dominique Strauss-Kahn. L’opinion publique l’attend. Dans son camp, ses adversaires le redoutent, ses soutiens lui préparent la piste d’atterrissage. En face, ses opposants politiques s’inquiètent. Mais à la différence de Dominique Strauss-Kahn, qui avait vu se fracasser cette stratégie sur le scandale du Sofitel, la fin de l’histoire reste à écrire pour Nicolas Sarkozy.
«Le problème de Sarkozy est le même que celui de DSK: à quel moment redescendre dans l’atmosphère terrestre? Comment faire pour que le retour, qui va forcément provoquer des frottements, ne débouche sur l’explosion de l’appareil», s’interroge un ancien partisan de DSK.
Source: LE FIGARO