A l’issue de la mission de suivi de la mise en œuvre des recommandations issues de la vérification de performance du système de mise à disposition des médicaments aux clients par la Pharmacie populaire du Mali (PPM), le constat demeure amer. Selon ladite mission qui a concerné les exercices 2015, 2016 et 2017, plusieurs recommandations non mises en application constituent des dangers pour la santé publique.
A l’instar des autres secteurs d’activité, la légèreté s’installe confortablement dans le secteur de la santé. Car, les résultats de la mission de suivi de la mise en œuvre des recommandations issues de la vérification de performance du système de mise à disposition des médicaments aux clients par la Pharmacie populaire du Mali (PPM), initiée par le VGAL, sont alarmants.
A en croire le dernier rapport du Bureau du Vérificateur, la présente mission vise à s’assurer que les recommandations formulées lors de la vérification de performance du système de mise à disposition des médicaments aux clients par la PPM ont été mises en œuvre et que les faiblesses constatées ont été corrigées. Les recommandations formulées à l’issue de la vérification initiale effectuée en 2018 concernant les exercices de 2015, 2016 et 2017 étaient sont au nombre de 19. Dont 14 pour la PPM, 1 pour le Laboratoire national de la santé (LNS), 2 pour le ministère de l’Economie et des Finances, 1 pour le ministère de la Santé et des Affaires Sociales et 1 à la fois pour les deux départements ministériels suscités.
La présente mission de suivi qui couvre les exercices 2019 et 2020 (1er semestre) a constaté assez de recommandations non mises en œuvre. Pour le bureau du Vérificateur général, le ministère de l’Économie et des Finances ne respecte pas ses engagements financiers du contrat plan. Car, la mission initiale a recommandé audit ministère de respecter ses engagements du contrat plan par le paiement intégral et régulier de la subvention à la PPM, nécessaire à l’exécution du plan d’investissement et conformément au plan de financement. Mais, constatera-t-elle, l’État n’a pas accordé l’intégralité de la subvention à la PPM conformément à ses engagements dans le cadre du CP. Afin de s’assurer du respect des engagements financiers de l’État à l’égard de la PPM, la mission de suivi a examiné le contrat plan 2017-2019 et a rapproché les engagements de l’État de l’année 2019 aux montants payés sur la subvention accordée à la PPM pendant la même période.
Elle a constaté que l’État n’a toujours pas payé l’intégralité de la subvention pour laquelle il s’était engagé dans le cadre du CP avec la PPM. En effet, en 2019, pour un engagement total de 59 435 000 F CFA, l’État a payé 45 171 000 F CFA.93.
Quant à la Pharmacie populaire, il ressort que la PPM n’établit pas de programme annuel d’approvisionnement. Or, la mission initiale a recommandé à la PPM d’établir un programme annuel d’approvisionnement. Elle avait constaté que la PPM n’établit pas de programme annuel permettant de maîtriser les approvisionnements, d’améliorer la disponibilité des médicaments essentiels dans les formations sanitaires et d’assurer une gestion adéquate des médicaments. Ainsi, indique le rapport, la mission de suivi s’est entretenue avec les responsables du service département approvisionnement de la PPM et a ensuite demandé les programmes annuels d’approvisionnement de 2019 et 2020.Toutefois, constatera-t-elle, la PPM n’établit pas de programmes annuels d’approvisionnement.
Pire, note-on dans rapport du Vérificateur, la PPM ne requiert pas le certificat d’analyse avant toute distribution. Ce, conformément à la recommandation de la mission initiale. Car, elle avait constaté que la PPM a procédé à la distribution de plusieurs produits pharmaceutiques en l’absence de résultats de test de qualité fournis par le Laboratoire national de la santé (LNS). En effet, poursuit le document, en 2016 et 2017, le LNS a procédé à des prélèvements pour lesquels aucun certificat d’analyse n’a été fourni. «Afin de s’assurer que tous les produits distribués sont conformes aux normes, la mission de suivi a échangé avec les responsables de la PPM et leur a requis tous les certificats d’analyse de médicaments délivrés par le LNS pendant la période sous revue (2019 et 2020). Mais elle a constaté que la PPM a continué de distribuer des produits pharmaceutiques durant la période sous revue en l’absence de certificats d’analyse ou de résultats provisoires sur les échantillons prélevés. Les responsables de la PPM évoquent l’urgence des besoins exprimés par les clients pour ne pas attendre les résultats des analyses qui accusent des retards importants, dénonce le Vérificateur général.
En ce qui concerne le Laboratoire national de santé (LNS), il ne respecte pas le délai de délivrance des certificats d’analyse, apprend-on du rapport. Tandis que la mission initiale a recommandé au LNS de respecter les délais réglementaires d’analyse des échantillons de médicaments, elle constatera que le LNS ne délivre pas de certificat d’analyse à la PPM dans le délai réglementaire. A titre illustratif, en 2017, le LNS a transmis à la PPM des certificats d’analyse dont le délai de traitement varie entre 17 et 308 jours. En 2016, ce délai a varié entre 14 et 472 jours, indique-t-on.
Afin de s’assurer du respect des délais réglementaires d’analyse des prélèvements de médicaments, la mission de suivi a rapproché les dates d’un échantillon de 20 prélèvements pour analyse de la période sous revue aux dates des certificats d’analyse et au délai fixé à 8 jours par l’article 10 de l’arrêté interministériel n°08-0345/MS-MF-MEIC-MEP-MA du 12 février 2008 fixant les modalités pratiques et tarification des opérations de contrôle de qualité des médicaments, aliments, eaux et boissons. Elle a constaté que le LNS ne parvient toujours pas à respecter ce délai réglementaire. En effet, pour un échantillon de 20 prélèvements, elle a constaté que les délais de livraison du certificat d’analyse varient entre 20 et 160 jours pendant la période sous-revue.
Au niveau du département de tutelle, c’est le laisser-aller. Il ressort des résultats de suivi des recommandations de la mission du Vérificateur que le ministère de la Santé et des Affaires sociales (MSAS) ne prend pas les mesures nécessaires pour rembourser la totalité des impayés. Alors que la mission initiale a recommandé au ministère de la Santé et des Affaires sociales (MSAS) de prendre les mesures nécessaires pour rembourser la totalité des impayés, elle avait constaté que le ministère de la Santé doit à la PPM à la date de février 2018 un montant de 3,17 milliards de FCFA (dernier pointage effectué par la commission bipartite ministère-PPM, sur la base des BL et des factures).
Afin de s’assurer de la mise en œuvre de cette recommandation, la mission de suivi s’est entretenue avec les responsables du ministère de la Santé et des Affaires sociales. La mission de suivi a constaté que le ministère de la Santé et des Affaires sociales n’a pris aucune mesure visant à rembourser les impayés.
La PPM ne respecte pas les délais de livraison. Car, explique le présent rapport, la mission initiale a recommandé à la PPM de revoir les délais de livraison aux structures sanitaires. Malheureusement, remarque-t-elle, les livraisons par la PPM à l’Hôpital du Mali pour la période sous revue ont été effectuées respectivement dans un délai moyen de 50, 35 et 57 jours. Or, le guide de bonne pratique de distribution prévoit 72 heures et le ministre de la Santé et celui en charge des Finances dans leur lettre recommandent également le même délai.
Afin de s’assurer du respect du délai de livraison de 72 heures, la mission de suivi a demandé à la PPM les bons d’achats (BA) de médicaments et consommables de l’hôpital du Mali, les bordereaux de livraison (BL) et les procès-verbaux de réception y relatifs pour les périodes de 2019 et 2020. Elle a ensuite procédé à un rapprochement entre les dates des bons d’achats de médicaments et consommables de l’hôpital du Mali et les bordereaux de livraison (BL). Elle a constaté que les livraisons faites par la PPM à l’Hôpital du Mali pour la période de 2020 ont été effectuées dans les délais variant entre 26 jours et 93 jours.
En conclusion, selon le rapport du Vérificateur, la mise en œuvre des recommandations issues de la mission initiale de 2018 n’est pas satisfaisante. Elle est de 26%.
Oumar KONATE
Source : La Preuve