Suivez-nous sur Facebook pour ne rien rater de l'actualité malienne

Sangue Mô : JEUDI, JOUR DE LA PECHE COLLECTIVE A SAN

Cette manifestation culturelle, fondamentale à San, magnifie les origines de la ville et renforce la cohésion entre les différentes communautés

festival tradition sanke mon peche poisson fleuve riviereLa mare du Sangué est une vaste étendue d’eau boueuse peu profonde, alimentée par les eaux de pluie et les déversoirs de la pleine agricole de San. Sur ses bords plantés de kapokiers, des vergers ont poussé. A l’Ouest, une digue la sépare d’un marigot qui longe les champs de riz. La digue de Sangué débouche sur la route nationale non loin de l’antenne locale de la société Energie du Mali.

Avant le début de la pêche collective, très tôt dans la matinée, à Karentéla où habitent les descendants de Bakorô Traoré (fondateur de San), des femmes apprêtent la crème traditionnelle (Mugu Fara). Le colonel Youssouf Traoré est l’un des arrières petit-fils de Bakorô Traoré. Drapé dans un grand boubou, l’officier à la retraite explique : « Quand notre patriarche a découvert la mare, la zone était boisée. L’accès était difficile. Il a fait appel donc aux Bwas de Térékoungo et Paraan pour les besoins de la main-d’œuvre. Comme nourriture, il leur apportait ce petit mil écrasé et très vitaminé ».
Pour perpétuer cette tradition, une rencontre est organisée avec les Bwas à Térékoungo et Parana, avant la préparation de la crème de mil. La rencontre donne lieu durant toute la nuit à une grande fête bien arrosée au « tchapolo » (bière de mil). Des hommes se déguisent en jeunes filles. « La finalité de tout ce à quoi vous venez d’assister est de faire rire », précise Nièni Coulibaly, le chef du village de Paraan.
Jeudi, jour de la pêche collective, la digue est noire de monde dès la mi-journée. Piétons, motocyclistes, automobilistes disputent le passage aux calèches, aux charrettes, aux ânes et aux chevaux. Muni de filets et divers instruments de pêche, tout le monde afflue vers la mare du Sangué pour prendre part à la 615è édition de la fête annuelle du Sangué mô. Cette rencontre culturelle, devenue un festival, est destinée à perpétuer une tradition qui rappelle la fondation de la ville de San et à renforcer la cohésion entre les différentes communautés. C’est l’occasion pour les plus jeunes d’apprendre que leurs ancêtres ont vécu en symbiose avec les communautés voisines.
L’ambiance est bon enfant. Certains portent des accoutrements qui ne manquent pas d’attirer l’attention. Des nostalgiques des temps ancestraux ont des armes en bandoulière.

PECHE ABONDANTE. Les officiels (les notabilités, le maire, le préfet, les députés, le président du conseil de cercle) sont confortablement installés sur la tribune d’où ils assistent à la fête.
Nul ne pénètre dans la mare sans l’autorisation du « Kotigui » (le propriétaire des eaux). Youssouf Daou, c’est son nom, est chargé de donner le coup d’envoi de la pêche collective. Cet homme d’âge mûr, à la carrure imposante, fait partie de la fratrie des Daou qui assure la gestion de l’eau à San. Le « Kotigui » arrive à cheval. Il se dirige vers la mare à pied. Armé d’un filet de pêche, il pénètre dans l’eau jusqu’au milieu de la mare et s’arrête. Il plonge les deux mains dans l’eau et psalmodie des incantations. Ensuite, les deux bras levés, il autorise la population à pénétrer dans la mare.
Une marée humaine s’élance alors dans l’eau. La scène rappelle les guerriers de Chaka Zoulou se ruant à l’assaut de l’ennemi. On crie, on saute, on chante, on danse. Les filets sont brandis au dessus des têtes. Tous les moyens sont bons pour capturer du poisson. De temps autre, la clameur accompagne de grosses prises. Des silures, des carpes sont capturées en grande quantité. Si la pêche n’est pas miraculeuse, elle est tout de même abondante. Les poissons pêchés ne sont pas destinés à la vente. Ils vont dans les marmites pour améliorer l’ordinaire.
Le Sangué mô, ce n’est pas seulement pour la pêche. Des dizaines de jeunes filles, en tenue de nouvelles mariées, se lavent les visages, les mains, les pieds. Famata Konaté, l’une d’entre elles, soulève son voile et explique en souriant : « Je ne vais pas pêcher. Il est de coutume que les nouvelles mariées s’y lavent des parties du corps, se souhaitent bonne année et heureux ménage ». Comme elles, hommes et femmes s’adonnent aux mêmes rituels. Certains se badigeonnent le visage ou la main avec l’argile. D’autres remplissent des bidons avec l’eau de la mare.
La pêche collective se déroule sous la surveillance des forces de sécurité mobilisées en nombre pour parer à toute éventualité. Quand le soleil entame sa fin de course, les pêcheurs commencent à quitter la mare. Sory Konaté, 18 ans, est étudiant en 1ère année Bâtiment. Arrivé en retard, il a pu quand même pêcher une … grenouille qu’il a attachée à son front à l’aide d’une étoffe. Entouré de jeunes gens et jeunes filles hilares, il pousse une chansonnette de Rap, au grand plaisir de l’assistance.
Envoyés spéciaux
C. M. TRAORE
O. DIOP

source : L Essor

Suivez-nous sur Facebook pour ne rien rater de l'actualité malienne
Ecoutez les radios du Mali sur vos mobiles et tablettes
ORTM en direct Finance