Les députés de la majorité présidentielle étaient le vendredi face à la presse pour expliquer le processus qui a abouti à l’adoption de la nouvelle Constitution par l’Assemblée nationale le 3 juin dernier, et surtout évoquer les innovations essentielles apportées.
Le principal conférencier en l’occurrence le président de la Commission des lois constitutionnelles, de la législation, de la justice, des droits de l’homme et des institutions de la République de l’Assemblée nationale, Zoumana N’Tji Doumbia, d’expliquer dès la réception du projet de loi et avant le début de la procédure d’examen, les membres de sa commission se sont rendus en mission d’études et d’échanges au Sénégal et en Côte d’Ivoire pour s’imprégner de l’expérience pratique de ces pays en matière de révision constitutionnelle. Des échanges ont eu lieu avec les comités techniques de révision de la Constitution d’une part et d’autre part des séances de travail avec les commissions parlementaires ayant examiné les projet de révision constitutionnelle. Des recherches documentaires afférentes aux révisions constitutionnelles ont été aussi réalisées par la commission des lois notamment les processus de révision constitutionnelle inachevés de 2000 et 2011 au Mali.
A en croire l’honorable Zoumana N’Tji Doumbia, dans la procédure d’examen de ce projet de loi portant révision de la Constitution de 1992, la Commission des lois a procédé à l’organisation des séances d’écoute auxquelles ont pris part plus d’une centaine de personnes ressources notamment d’anciens Premiers ministres ; d’anciens présidents de l’Assemblée nationale ; des ministres de l’Administration territoriale, de la Justice Garde des Sceaux, du Travail et de la Fonction publique chargé des Relations avec les institutions, des Droits de l’homme et de la Réforme de l’Etat ; les responsables de partis politiques ; les représentants des organisations de la société civile ; les chefs coutumiers et les chefs des confessions religieuses ; des constitutionnalistes et spécialistes en droit public ; les ordres professionnels judiciaires ; les responsables des centrales syndicales.
Compte tenu du caractère sensible du projet de texte, soulignent les députés de la majorité, la commission des lois a apporté une innovation dans la procédure d’examen afin qu’elle soit la plus inclusive possible. Cette innovation a consisté à transporter la commission des lois vers les capitales régionales (Kayes, Koulikoro, Sikasso, Ségou, Mopti ayant regroupé Tombouctou, Ménaka et Taoudénit et Bamako ayant regroupé Gao et Kidal) en y organisant les séances d’audition citoyenne. En plus de citoyens anonymes, les séances d’audition ont connu la présence effective des gouverneurs, des préfets, des sous-préfets, des responsables des collectivités territoriales, des représentants des partis politiques et des organisations de la société civile, des représentants des autorités coutumières et des confessions religieuses des différents cercles des régions citées plus haut.
Innovations essentielles
A en croire les députés de la majorité, en plus de renforcer notre démocratie, la future Constitution permettra de faciliter la mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation. En effet, la création du Sénat répond à l’application de l’Accord pour la paix et la réconciliation. Conformément à l’esprit de cet accord, un tiers des membres du Sénat est nommé par le président de la République dans le souci de faire participer au débat parlementaire des légitimités traditionnelles et confessionnelles et d’autres personnalités de la nation.
La future Constitution apporte d’autres innovations majeures dans le fonctionnement de l’Etat. Au niveau du pouvoir exécutif, il est indiqué que tout candidat aux fonctions de président de la République doit être exclusivement de nationalité malienne d’origine. Cette disposition a été instaurée en vue d’encadrer l’accès à la fonction de président de la République.
En outre, le président de la République nomme le Premier ministre et met fin à ses fonctions. C’est lui aussi qui détermine la politique de la nation et non le gouvernement. Les rédacteurs de la nouvelle Constitution ont inséré cette disposition pour permettre au président de la République de concrétiser en priorité le projet de société sur la base duquel il a été élu.
Dans le projet de révision voté par les députés, le président de la République prête serment devant la Cour constitutionnelle. Avec la création de la Cour des comptes, c’est elle qui reçoit désormais la déclaration écrite des biens du président de la République, du Premier ministre et des ministres. Elle est chargée aussi de contrôler la régularité des opérations financières en s’assurant qu’elles ont été réalisées conformément aux règles budgétaires. Elle fait également un rapport annuel au président de la République, au président de l’Assemblée nationale, au président du Sénat et au Premier ministre. Ce rapport est rendu public.
Avec la future constitution, le pouvoir législatif appartient désormais à l’Assemblée nationale et au Sénat. Dans le but de moraliser la vie politique, il est mentionné que tout député qui démissionne de son parti en cours de législature est automatiquement déchu de son mandat. Il est remplacé dans les conditions déterminées par une loi organique. La même règle s’applique aux sénateurs élus. Les membres du parlement (Assemblée nationale et Sénat) bénéficient de l’immunité parlementaire. A la différence de l’Assemblée nationale, le Sénat ne peut être dissous. En outre, les Maliens établis à l’extérieur élisent leurs députés. Une première sous la troisième République voire depuis l’accession du pays à l’indépendance.
La Haute cour de justice ne fait plus partie des Institutions de la République. Cependant elle reste compétente pour juger le président de la République en cas de haute trahison et les membres du gouvernement pour des faits qualifiés de crimes ou délits commis dans l’exercice de leurs fonctions mis en accusation devant elle par le parlement ainsi que leurs complices, en cas de complot contre la sûreté de l’Etat.
Dans le but de renforcer la légitimité du vote du parlement, l’article 143 de la future Constitution stipule que le projet de révision de la Constitution n’est pas présenté au référendum lorsque le président de la République décide de le soumettre au parlement convoqué en congrès. Dans ce cas, le projet de révision n’est approuvé que s’il réunit la majorité des deux tiers des membres du parlement convoqué en congrès. La procédure de révision par le congrès ne peut être mise en œuvre lorsque le projet ou la proposition de révision porte sur la durée ou le nombre de mandats du président de la République, des députés et des sénateurs.
La rédaction