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Retrait de l’AES de la CEDEAO: les enjeux

Le Mali, le Niger et le Burkina Faso formant l’Alliance des États du Sahel ont, dans un communiqué conjoint, déclaré se retirer, sans délai, de la CEDEAO, pour n’avoir pas bénéficié du soutien et de la solidarité de l’organisation sous régionale. Ce retrait qui n’est pas sans conséquence pour les membres de l’AES et la CEDEAO parce que pour une telle décision, il y a toujours un prix à payer, surtout quand on sait que la CEDEAO est, jusque-là, l’organisation africaine la plus intégrée. En revanche, elle représente des avantages pour les démissionnaires, même s’il y a beaucoup d’incertitudes.

Un coup dur. Après la Mauritanie en 2000, les membres de l’Alliance des États du Sahel ne se voient plus membres de la Communauté des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) qui s’est laissée instrumentaliser par des puissances étrangères comme la France, contrairement à ses textes fondateurs. Un vrai malaise au sein de la CEDEAO dont les politiques sont financées par des puissances étrangères auxquelles elle obéit au doigt et à l’œil, tout en bafouillant la souveraineté des États membres.
Échec de la CEDEAO
C’est à juste titre que les trois États démissionnaires dans leur communiqué conjoint affirme : « les Peuples du Burkina Faso, du Mali et du Niger, constatent avec beaucoup de regrets, d’amertume et une grande déception que leur Organisation s’est éloignée des idéaux de ses pères fondateurs et du panafricanisme ».
Pour ces pays en transition politique, il est difficile d’avaler une couleuvre des sanctions de la CEDEAO alors qu’ils traversent l’une des crises sécuritaires inédites depuis leur accession à l’indépendance.
« Pire, lorsque nos États ont décidé de prendre leur destin en mains, elle a adopté une posture irrationnelle et inacceptable en imposant des sanctions illégales ; illégitimes, inhumaines et irresponsables en violation de ses propres textes ; toutes choses qui ont davantage fragilisé les populations déjà meurtries par des années de violence imposée par des hordes terroristes instrumentalisées et téléguidées », ont-ils accusé.
L’une des bêtises pour des chefs d’État de l’organisation d’avoir planifié une intervention militaire contre un État membre dans le but d’imposer un président renversé, sachant que ce sont les populations qui en paieront le lourd tribut.
Ces malaises sont renforcés par la politique de deux poids, deux mesures entretenue par la CEDEAO qui monte au créneau contre les coups d’État, mais valide des changements anticonstitutionnels. En clair, l’organisation sous régionale a toujours gardé l’omerta sur les multiples manipulations de Constitution, les tripatouillages des élections pour se maintenir au pouvoir, en référence au cas de Alassane Dramane OUATTARA en Côte d’ivoire, de Alpha CONDÉ en Guinée, entre autres.
Ainsi, la décision du retrait des membres de l’AES ne peut pas s’analyser seulement sous l’angle de la volonté de ces États dans le dessein de se maintenir au pouvoir.
L’onde de choc fragilisera davantage la CEDEAO, avec un risque évident de dislocation. Créée en mai 1975, ces départs au sein de la CEDEAO illustre l’échec des responsables actuels de maintenir le flambeau de solidarité entre les membres de ladite organisation. A cet effet, ce retrait de l’AES de la CEDEAO annonce un tournant décisif dans l’histoire de l’organisation et pose des questions cruciales en ce qui concerne son avenir et sa capacité à relever les défis régionaux.
Par ailleurs, une telle décision ; il y a aussi un prix à payer pour ceux qui ont annoncé leur volonté de claquer la porte surtout quand on sait qu’aucun de ces pays n’a un accès à la mer.
Entraver la libre
circulation
L’un des inconvénients qui va durement frapper les peuples de ces trois pays est l’entrave à la libre circulation des personnes et leurs biens dans la zone CEDEAO. En effet, elle est l’organisation africaine la plus poussée en termes d’intégration des peuples. Ce retrait, s’il est validé, apportera un changement radical pour les ressortissants des États membres de l’AES et ceux de la CEDEAO. Ainsi, il faut rebattre la politique de séjour dans les différents pays et surtout du transport des populations et des biens qui était facilité par des textes de la CEDEAO.
« Cette décision pourrait produire des effets considérables, par exemple pour la circulation des biens et des personnes, pour les trois pays concernés, dépourvus d’accès à la mer, et pour la région. Elle suppose des implications sur les exemptions de visa et les exonérations de taxe, avec des retombées sur les prix », selon JeuneAfrique.
Cependant, tout n’est pas aussi rose dans la libre circulation dans l’espace communautaire. Celle-ci n’est pas entièrement garantie conformément à l’article 3 de la Charte de la CEDEAO exhortant « la suppression entre les États Membres des obstacles à la libre circulation des personnes, des biens, des services et des capitaux ainsi qu’aux droits de résidence et d’établissement ».
Dans la pratique, chaque pays gère ce principe à sa sauce et sans prendre des mesures contre les tracasseries routières foulant au pied cette disposition.
Outre cet aspect, l’AES va perdre l’accès au marché commun de la CEDEAO et aux avantages économiques dans le cadre de la réalisation de certains projets. Aussi, il y a les possibles répercussions économiques sur les secteurs dépendants du commerce régional ; la diminution de l’influence et du poids dans les négociations régionales et internationales ; la potentielle des projets et infrastructures régionaux, entre autres.
Cependant, ce retrait aura sans doute aussi des avantages pour le Mali, le Niger et le Burkina Faso qui auront des flexibilités dans la conduite de certaines initiatives. En effet, ils auront l’autonomie accrue en politique et économie, la flexibilité pour négocier des accords bilatéraux, la liberté de fixer des politiques commerciales indépendantes et la possibilité de se concentrer sur des politiques intérieures sans contraintes régionales.
S’agissant du retrait sans délai, les textes de la CEDEAO écartent cette éventualité et parlent d’un processus de retrait étalé sur 12 mois.
« Tout État membre désiré de se retirer de la communauté, notifie par écrit, dans un délai d’un an, sa décision au secrétaire exécutif qui en informe les États membres. A l’expiration de ce délai, si sa notification n’est pas retirée, cet État cesse d’être membre de la communauté », précisent l’article 91 des textes qui ajoutent également que pendant la période visée, l’État membre continue de se conformer aux textes et reste tenu de ses obligations.
Ce qui est important à noter, l’annonce du communiqué conjoint est une déclaration politique qui doit être suivie d’actes juridiques pour se conformer aux textes.
Le poids de l’AES dans la CEDEAO
Il s’agit de trois États sahéliens, sans littoral maritime. Avec le retrait de ces trois États intérieurs, l’organisation sera réduite aux 12 États littoraux d’Afrique de l’Ouest.
Mali, Burkina Faso et Niger représentent 2,75 millions de km2 sur 6,1 millions de km2 de l’ensemble des États membres de l’organisation.
Le Mali et le Niger sont plus de 4 fois plus grands que le Burkina Faso (274.000 km2). Mali et Burkina Faso ont une population quasi identique d’environ 22 millions d’habitants contre plus de 25 millions d’habitants pour le Niger.
Les trois États sahéliens sont confrontés à des problématiques similaires d’insécurité, de terrorisme et de pauvreté.
Sur le plan international, les trois pays ont rompu avec la France. Ils ont poussé les ambassadeurs et les forces françaises vers la sortie et se sont tournés politiquement et militairement vers la Russie.
En septembre 2023, Mali, Burkina Faso et Niger ont formé une Alliance des États du Sahel (AES) placée sous le signe de la souveraineté et du panafricanisme.

PAR SIKOU BAH

Info Matin

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