Le Delta central et la boucle du Niger, englobant une bonne partie de ce qu’on appelle aujourd’hui le centre du Mali, connait, ces derniers temps, une recrudescence, sans précédente de la violence, à cause de la prolifération des idéaux d’extrémisme religieux et djihadistes.
Pour faire face au fléau qui prend de l’ampleur et annihile les efforts de développement, des initiatives ne manquent pas. Ainsi, après à Bamako (9 et 10 septembre 2017), la capitale des Balanzans a abrité, jeudi dernier, son « Forum régional sur la contribution des chefs religieux et des notabilités traditionnelles, au retour de la paix et de la quiétude dans le delta central et la boucle du Niger ». L’événement, présidé par le Premier ministre Abdoulaye Idrissa Maiga, a enregistré la participation du président l’Assemblée nationale et des membres du gouvernement.
C’est en application des recommandations du Forum de Bamako, dit-on, que la Mission des bons offices et le Haut conseil régional ont tenu à inviter à nouveau à Ségou les autorités religieuses et la chefferie traditionnelle dont l’importance et le rôle dans la vie de la nation ne souffrent d’aucun doute à nos yeux.
Cultiver la paix
La tenue du rendez-vous de Ségou, sans nul doute, est une preuve de la marche inéluctable de notre pays vers la paix. Comme on pouvait s’y attendre, selon des participants, la rencontre a regroupé près de 400 personnes venues de toutes les régions du Mali.
Dans son discours d’ouverture, le Premier ministre, Abdoulaye Idrissa Maiga, a exhorté les autorités religieuses et notabilités traditionnelles à veiller sur l’éducation de nos enfants, les élèves coraniques et sur celle de nos frères en Islam en vue de transcender l’ignorance et cultiver la paix parce que cela demeure un devoir sacré.
Il faut reconnaître que cette partie de notre pays focalise les attentions des plus hautes autorités en même temps que les partenaires de notre pays.
Récemment, le jeudi 26 septembre dernier, lors de la sortie de la 25e promotion des élèves gendarmes baptisée feu Toumani Diakité, le directeur national de la gendarmerie exprimait la préoccupation des plus hautes autorités du pays par rapport à la montée de l’insécurité au centre. Pour cela, il y avait promis la création de nouveaux escadrons en vue de renforcer la sécurité de population.
Pendant toute l’année en cours, la zone a été le théâtre de nombreuses attaques et menaces occasionnant des pertes importantes en vies humaines (militaires et civiles).
Une zone en proie à la violence
En début septembre, à Ténenkou, Youwarou et dans plusieurs communes du cercle de Djenné, ce sont les hommes du prédicateur radical Amadou Koufa, qui continuaient à dicter leur loi, ce, depuis plus de deux ans. Certains chefs coutumiers et élus locaux soupçonnés de collaborer avec l’armée sont menacés ou assassinés. Des écoles sont fermées et certains parents sont obligés d’envoyer leurs enfants dans les zones à l’abri de l’insécurité pour y poursuivre leur scolarité.
Pour exprimer leur ras-le-bol, de jeunes gens ont fait « péter des pétards » dans le village de Kouakourou, le 2 septembre dernier. Immédiatement, des hommes armés se sont présentés devant le vestibule du chef du village en tirant des coups de feu en l’air et demander qu’on leur remette les coupables.
Les populations sont sorties massivement pour soutenir le chef du village qui n’a pas cédé à la demande des terroristes. Ces derniers se sont retirés en posant un ultimatum de 24 h menaçant de revenir chercher le chef coutumier.
Dans ce même village actuellement encerclé par les eaux du fleuve Niger et uniquement accessible par bateau ou pirogue, aucun mouvement des populations n’est possible, depuis quinze jours, malgré la présence d’un détachement de l’armée dans le village, à cause de la présence djihadiste dans les environs.
En mars dernier, les tristes souvenirs des conflits intercommunautaires entre éleveurs peuls et agriculteurs bambaras sons encore vivaces dans les mémoires dans le Macina.
Dans beaucoup de localités de la zone office du Niger, l’insécurité consécutive aux attaques djihadistes a mis en péril ou sérieusement perturbé la saison hivernale. À présent, il convient de cicatriser les plaies occasionnées par ces conflits intercommunautaires et attaques djihadistes.
Désarmer les milices
Pour réconcilier les cœurs et les esprits dans la zone et lutter efficacement contre la montée des idéaux djihadistes, la rencontre de Bamako des 9 et 10 septembre avait formulé treize recommandations parmi lesquelles : l’envoi d’une mission urgente de la Commission de Bons Offices, de la coordination des maitres coraniques, du Haut Conseil Islamique du Mali avec les forces vives de la nation, dans le Delta central et la boucle du Niger afin d’apaiser le climat social ; le renforcement des initiatives en cours dans le cadre de la médiation et de réconciliation entre les communautés ; la mise en place d’un mécanisme national de prévention et de gestion des conflits ; une plus grande implication de l’État conformément à sa mission régalienne dans la protection des populations et de leurs biens dans la zone concernée ; la mise en place d’une politique efficace de communication afin d’éviter l’amalgame qui est fait sur les populations civiles selon leur apparence (faciès, habillement, religion, langue…) ; le désarmement de toute personne détenant illicitement des armes de guerre et en particulier les chasseurs traditionnels plus connus sous le nom des ‘‘dozos’’ par le pouvoir public ; la mise en place d’un mécanisme de retour rapide des écoles des services sociaux de base notamment (les centres de santé, eau et électricité), dans le Delta Central et la Boucle du Niger ; la création de pôles économiques de développement et financier des activités génératrices dans la zone concernée ; l’accélération de l’intégration des écoles coraniques au système éducatif national.
Le forum avait en outre donné solennellement mandat au Coordinateur de la Mission de Bons Offices, l’Imam Mahmoud DICKO, d’entreprendre, sans délai, des négociations avec les groupes armés non signataires de l’accord pour la paix et la réconciliation issu du processus d’Alger.
Il est à noter que le Premier ministre Abdoulaye Idrissa MAIGA a profité de sa présence dans la capitale des Balanzans pour tenir une conférence de cadres pendant près de trois heures d’horloge. Ladite conférence, qui a regroupé toutes les autorités politiques, administratives et religieuses, a tenu toutes ses promesses.
Par Sidi Dao
Source: info-matin