De report en report, les élections législatives verraient-elles le jour avec la prolongation sine die du mandat des actuels élus? Pour des « contraintes physiques, matérielles, techniques…» L’annonce a été faite en début de semaine, après une rencontre entre le Premier ministre et les leaders politiques. Mais à dire vrai, les Maliens ne sont pas vraiment surpris par cette décision, étant donné que beaucoup reste à faire pour l’organisation de ce scrutin.
Ce report est-il une nécessité ou une ruse politique ? Telle est la question qui s’impose au regard de ce énième report. Mais pour certains compatriotes, le peuple a eu la patience d’attendre ces fameuses élections depuis plus de cinq ans, ce n’est pas quelques mois de plus qui tueraient. Autant accorder du temps pour avoir ces élections mieux organisées, différentes en tout cas de celles de 2013.
A n’en point douter, les premiers à applaudir la décision d’un nouveau report sont les actuels députés qui jouissent ainsi d’un bonus de mandat, donc de privilèges….
Ensuite viennent les partis et alliances politiques, dont les listes de candidatures aux élections législatives ne sont pas encore prêtes dans certaines localités.
Mais au fond, est-ce que les raisons qui sous-tendent le report tiennent la route ? Il ne sera pas excessif de creuser un peu.
D’abord, la question sécuritaire n’est plus d’actualité, pour la simple raison que la présidentielle a, dans une certaine mesure, mis fin à ce mythe. Mais étant donné que la classe politique malienne, surtout l’opposition, avait émis le vœu d’un report pour des considérations qu’elle seule détient, l’investigation mérite d’être faite en terme de calculs politiciens. A cela s’ajoute le nouveau découpage territorial du pays, avec l’arrivée de nouvelles régions.
« MehrLicht ! », dira l’Allemand. Plus de lumière ! Oui, le peuple malien a vraiment droit à plus d’éclaircissement sur les intentions et les réelles motivations du report des législatives. Mais disons-le tout net. Le report des élections, en lui-même, n’est pas condamnable. Si le constat du retard est clair et qu’il y a d’autres raisons objectives de le faire, cela est même louable pour la transparence et la bonne tenue du scrutin. Mais, quand on sait que ces élections-là devaient se tenir conformément au délai constitutionnel, et qu’après un premier report, le ministre de l’Administration territoriale, avec la classe politique, avait fixé la date du 25 novembre 2018, les choses n’aient pas évolué de façon à favoriser la tenue de ce scrutin dans ce délai. Qu’a-t-on fait pendant tout ce temps ? Ou que n’a-t-on pas fait ?
Aussi, se baser sur ces arguments pour justifier ce report suscite-t-il quelques interrogations. Les autorités maliennes se sont-elles laissées piéger dans un processus, dont ils n’ont pas la capacité matérielle et technique nécessaire de l’organisation ? Si c’était le cas, quelles en seraient les conséquences sur les élections municipales, locales et régionales à venir ? Ce retard a-t-il été volontairement causé pour servir des desseins cachés ? Dans ces conditions, à qui profiterait-il ? Faut-il y voir une manœuvre, une ruse du pouvoir, ou est-ce une simple nécessité ? Autant de questions que l’on peut légitimement se poser.
En tout état de cause, même si l’on peut croire en la sincérité du report, l’on ne peut s’empêcher de penser que les autorités vont profiter de cette situation pour prendre une décision qui pourrait les arranger, compte tenu de la confusion qui règne en ce moment au sein du bloc de la majorité présidentielle, surtout au niveau des formations politiques où la discorde commence à s’installer. S’y ajoute le budget devant servir à cette élection pourrait servir à soulager un tant soit peu le malaise social.