L’affaire avait défrayé la chronique en 2014, quand l’ex PDG du PMU-Mali, Idrissa Haïdara fut jeté en prison avec tous les cadres de la direction générale pour fraude et mauvaise gestion portant sur 34 milliards de FCFA.
Ayant ensuite bénéficié de la liberté provisoire sous caution en mai 2014, Haïdara avait fui le pays et serait exilé au Canada. Aujourd’hui, plus rien ne le contraint à cet exil, la Chambre d’accusation de la Cour d’appel de Bamako ayant annulé, par l’arrêt n° 434 du 13 décembre 2016, le mandat d’arrêt international lancé contre lui en juin 2014. En plus, elle a ordonné le déblocage de ses comptes bancaires. Cependant, l’Etat ne l’entend pas de cette oreille, le Contentieux a formé pourvoi contre l’arrêt 434 de la Cour d’appel. A suivre donc !
En cavale au Canada depuis trois ans, Idrissa Haïdara dit Landrouss, ancien Président directeur général de la société du Pari mutuel urbain (PMU-Mali), peut aujourd’hui rentrer librement au pays, la Cour d’appel de Bamako ayant ordonné la main levée du mandat d’arrêt international décerné contre lui le 10 juin 2014. Toutefois, ce serait à ses risques et périls parce que le Contentieux de l’Etat a formé pourvoi contre l’arrêt le réhabilitant.
Le casse du siècle : 34 milliards de FCFA volatilisés !
Pour comprendre ce scandale qu’on peut qualifier du casse di siècle réussi par une poignée de cadres du PMU-Mali, il importe de rafraîchir les mémoires.
Interpellé le 27 décembre 2013 par le pôle économique et financier, Idrissa Haïdara et quatre cadres de son staff sont déférés à la Maison centrale d’arrêt de Bamako le 3 janvier 2014. Il s’agit du directeur financier, Moussa Dembélé, du caissier, Alassane Niang, l’Agent-comptable, Sounkalo Doumbia et le Coordinateur des Points Courses en direct (PCD), Lassine Traoré.
Haïdara est inculpé d’atteinte aux biens publics, corruption, prise illégale d’intérêt, délit de favoritisme etc. et complicité portant sur la somme de 3,8 milliards de FCFA au préjudice du PMU-Mali.
Mais, cinq mois plus tard, en mai 2014, Haïdara bénéficie de la liberté provisoire après avoir versé 40 millions de FCFA. Il sort de prison avec ses co-accusés. Comment les 34 milliards ont-ils disparu ?
Le rapport 2012 du Bureau du Vérificateur général (BVG) reproche à l’ex PDG du PMU-Mali une perte de 34 milliards au détriment de l’Etat malien. Ce trou se répartit comme suit : 3 392 531 682 FCFA au titre de la fraude et 30 709 840 670 FCFA au compte de la mauvaise gestion. Autres griefs relevés par le rapport du Végal : 47 105 252 FCFA sortis en espèces sans pièces justificatives ; 62 809 380 FCFA de paiement d’impôts et taxes sans pièces justificatives; 82 513 287 FCFA de dépenses effectuées au titre de missions sans pièces justificatives ; 295 500 000 FCFA indûment versés à l’Agent de la Sécurité d’Etat en plus des charges de sécurité ; 771 721 149 FCFA accordés par le PDG du PMU Mali à diverses personnes sans autorisation ; 200 millions FCFA d’avance faite au ministère de la Défense non encore remboursée.
Il ressort également du rapport du BVG, que le PMU Mali a irrégulièrement décaissé 5,1 milliards FCFA au titre des dividendes de l’Etat.
Aussi, le gouvernement a directement utilisé ces fonds à partir des comptes bancaires de la Société sans reversement préalable au Trésor public. Ces ressources ont-elles bénéficié à l’intérêt général ? Le Végal s’interroge.
En outre, les administrateurs du PMU Mali ont indûment perçu la somme de 137 millions FCFA et des dotations de carburant de 7 200 litres chacun en plus de leurs indemnités de fonction, en violation de l’article 430 de l’Acte uniforme de l’OHADA qui interdit de verser aux administrateurs toute autre rémunération, permanente ou non, que leurs indemnités de fonction. C’est à la lumière de tous ces griefs que le Bureau du Vérificateur général a demandé que le dossier du PMU-Mali soit mis à la disposition de la justice.
C’est ainsi que Idrissa Haïdara et son staff ont été entendus plusieurs fois au Pôle économique avant d’être interpellés et mis sous mandat de dépôt, avant d’être libérés sous caution.
Sachant que la gravité de la situation, aussitôt sorti de prison, Landrouss a pris la poudre d’escampette pour se retrouver, selon certaines sources, au Canada où il passe une vie dorée depuis mai 2014.
Quand la nouvelle de la fuite hors du pays de Haïdara s’est répandue, un mandat d’arrêt international est décerné contre le fugitif le 10 juin 2014.
De même, sur décision de justice, tous ses comptes en banque sont bloqués à la BMS SA, à la BICIM SA, à la BCI-Mali SA, à la BDM SA, à la BIM SA, et à la Banque Atlantique SA.
L’affaire Haïdara semblait alors définitivement classée. Mais, en toute fin de 2016, il y eut ce rebondissement avec l’arrêt 434 du 13 décembre 2016 de la Chambre d’accusation de la Cour d’appel de Bamako. Cet arrêt est doublement favorable à l’ex PDG du PMU-Mali, en ce sens qu’il ordonne le déblocage des comptes bancaires de l’inculpé Idrissa Haïdara et ordonne la main levée du mandat d’arrêt décerné contre l’inculpé. En français facile, Haïdara dispose librement de l’argent qu’il y a dans ses comptes et est libre de rentrer au bercail.
Mais, il y a un souci de taille : ayant reçu notification de l’arrêt le vendredi 6 janvier 2017, la direction générale du contentieux de l’Etat, au nom et pour le compte de la société Pari mutuel urbain du Mali (PMU-Mali), forme pourvoi contre ledit arrêt, par la lettre n°0075/PRIM-SGG-DGCE du 10 janvier 2017. Elle en saisit le Greffier en chef de la Cour d’appel. Le dossier est enregistré sous Acte de pourvoi N°03 en date du 23 janvier 2017.
Dans l’affaire MP C/ Idrissa Haïdara, qui va gagner ?
Sékou TAMBOURA