Le Vérificateur général de la république du Mali, Samba Alhamdou BABY, a procédé, il y a quelques jours, à la publication de son rapport 2018. Comme d’habitude, plusieurs services publics sont au banc des hors-normes. Des irrégularités financières et administratives ont été décelées. Les irrégularités financières concernent l’Aéroport du Mali (ADM) et la mairie de Baguineda-camp, etc.
Plusieurs administrations et services publics sont sur la sellette dans le rapport 2018 du Vérificateur général. Les vérifications de cette année se sont portées essentiellement sur les vérifications de suivi, les vérifications de performance et les vérifications financières. Le constat est amer à tous les niveaux.
S’agissant d’abord des vérifications de suivi de recommandations, les travaux de 2018 les jugent assez satisfaisants avec un total de mise en œuvre de 61% des recommandations émises lors des précédentes vérifications pour la performance des administrations maliennes. Sur 80 recommandations, seules 14 ont été classées comme non applicables en raison du changement des contextes les ayant donné naissance.
En plus de cet aspect, l’université de Ségou donne à craindre. Selon le Vérificateur général, aucune amélioration, depuis 2013, ne peut être mentionnée au sein de cette structure universitaire créée afin de combler au déficit de places dans l’université de Bamako. Cette université enregistre le plus faible taux de mise en œuvre des recommandations avec seulement 33%. « Cette situation ne donne pas l’assurance que les ressources de l’État sont bien utilisées pour faire face à la croissance des effectifs d’étudiants dans l’enseignement supérieur et à l’insuffisance des capacités d’accueil et d’encadrement », déplore Samba Alhamdou BABY. Une situation qui ne prévoit pas de meilleur jour pour la réalisation de la politique éducative du gouvernement malien visant l’excellence dans le domaine éducatif. Ces mauvaises gestions assimilables à de la corruption ne peuvent qu’entraver les conditions d’étude des étudiants et par ricochet leur vie.
En ce qui concerne les vérifications de performance, deux structures sanitaires, l’Hôpital Gabriel Touré de Bamako et la Pharmacie Populaire du Mali, passent à la casserole. Le résultat n’est que déplorable.
Parlant de l’hôpital Gabriel Touré, la faiblesse de son Plateau technique a considérablement impacté sur sa performance. Ce grand centre hospitalier, à travers le constat qui ressort de ce rapport, ne serait rien d’autre, dans la période sous-revue, qu’un simple mouroir d’enfant. « Pendant la période sous-revue, sur un total de 19 154 enfants hospitalisés à la Pédiatrie, 4 633 sont décédés, soit un taux de mortalité de 24%. De 2016 à 2017, les décès enregistrés à la pédiatrie sont passés de 64% à 96% du total des décès hospitaliers du CHU-Gabriel Touré », déplore-t-on dans ce rapport.
A la Pédiatrie, le manque de couveuse a engendré des conséquences innombrables. Sur un besoin de 60 couveuses, il n’existe que trois et aucun respirateur pour nouveau-né n’existe. En plus de cela, sur un total de 81 types d’analyses réalisables, l’hôpital n’a réussi à faire que 20 dus au manque de réactifs. C’est le service de la néonatalogie qui a enregistré le plus de taux de décès : « De janvier 2016 à juin 2018, les décès enregistrés dans ce service représentent 83% du total des décès du département de la pédiatrie », lit-on dans ce document.
Ce premier rapport de Samba Alhamdou BABY montre à combien la santé des citoyens reste secondaire pour les autorités de la République. Le CHU-Gabriel Touré n’est pas le seul pointé du doigt dans le secteur de la santé. La Pharmacie populaire du Mali a aussi eu sa part de dose. Primo, il ressort de ce rapport que le délai de traitement des certificats d’analyse des médicaments avant leur distribution dépasse la norme de 8 jours pour atteindre jusqu’à plus d’une année (472 jours). « En effet, les livraisons faites par la PPM à l’Hôpital du Mali ont connu des délais, moyens, de 50, 35 et 57 jours respectivement en 2015, 2016 et 2017 », précise le Vérificateur. Ainsi, des médicaments non certifiés ont été mis à la disposition des citoyens.
Secundo, la présence de médicaments périmés disposés près des valides dans des magasins de stockage ainsi que des points de vente à Bamako, Ségou, Sikasso, Koutiala et à Koulikoro a été constaté. « Plus grave, il a été recensé en 2017, plus de 5 millions de produits périmés d’une valeur de 1,14 milliard de FCFA, sans qu’aucune disposition de destruction soit entreprise », lit-on dans ce document. Ces situations ne peuvent que détériorer la santé des citoyens et donne la preuve du manque de crédit accordé par les autorités à la santé des citoyens.
En ce qui concerne les vérifications financières, elles ont concerné l’Aéroport du Mali et la mairie de Baguineda. À l’aéroport du Mali, plusieurs irrégularités ont été constatées dans le dispositif de contrôle interne et dans la gestion financière. Il ressort que 711 millions se sont évaporés à cause de la signature de procès-verbaux par des PDG dudit établissement contenant des informations erronées. Une somme qui aurait pu permettre de prendre en charge plusieurs familles de déplacées du centre du Mali. Ce n’est pas tout, les créances clients non recouvrées s’élèvent à 597,90 millions de FCFA. Une somme importante qui aurait pu contribuer à l’équipement du CHU-Gabriel Touré en couveuses ou en réactifs. Quant aux primes de rendement indûment payées au Conseil fiscal, elles s’élèvent à 60,89 millions de FCFA. Le total des irrégularités au sein de l’aéroport du Mali s’élève à 1 606 819 334 de FCFA. La corruption a atteint le summum dans l’espace aéroportuaire du Mali. Peut-être qu’il faut s’attendre à des têtes qui tombent au sein de la direction afin de recouvrer cette somme dont le Mali a tant besoin pour son développement voire le bien-être de ses citoyens.
Dans la commune de Baguineda-camp, le Vérificateur général a pu déceler des manques à gagner. Ici, c’est la gestion de la mairie qui est mise en avant. Les vérifications ont pu montrer une déperdition financière de 529,74 millions de FCFA. Cette valeur correspond au prix de plusieurs sacs d’engrais pour la culture du riz ainsi que de plusieurs bidons d’insecticides. Elle aurait contribué au développement de cette commune.
Ce que déplore le Vérificateur général après tout dans ce rapport, c’est le manque de suivi dans les administrations publiques maliennes. Selon son constat, c’est ce qui explique d’ailleurs la plupart de ces irrégularités. Il faudrait alors ajouter à ce constat, l’encouragement de l’impunité par la non-poursuite des auteurs de la corruption. Il convient alors que les autorités changent de fusils d’épaule pour donner à ce pays un nouveau visage.
Fousseni TOGOLA
Le Pays