Arrivé à l’AS Réal de Bamako au début de la saison 1985-1986, Souleymane Sangaré ne tarda pas à séduire l’encadrement technique grâceau sérieux, à l’engagement et à l’abnégation dont il faisait montre. Sa sélection en équipe nationale junior marque les sillons d’une riche carrière qui le conduira en Egypte après la CAN de Tunis 1994 qui succédait à la CAN junior 1988 (finale contre le Nigéria), qualificativeà laCoupe du monde de la même catégorie de 1989 (en Arabie Saoudite). Il est du groupe qui a donné un nouvel élan au football malien, en se qualifiant pour une CAN 22 ans après Yaoundé 1972. Souleymane Sangaré est notre héros du jour dans le cadre de la rubrique « Que sont-ils devenus ? ».Nous avons profité d’une de ses visites à un grand-frère pour l’interviewer. Evoluant tantôt au milieu, tantôt en défense, il s’est toujours distingué par son efficacité dans les situations difficiles.
Qui est Solo ? Comment est-ilparvenu à s’imposer partout où il a passé ? Comment a-t-il géré sa retraite ? L’enfant de Hamdallaye a apporté des éclaircissements à toutes ces questions.
Le 30 octobre 1994 dans le cadre des éliminatoires de la CAN de 1996, les Aigles du Mali recevaient à Bamako le Syli National de Guinée Conakry. Les supporters maliens avaient un souci : comment résoudre l’équation de la vedette guinéenne à l’époque, Aboubacar Titi Camara ? L’attaquant au crâne rasé, au top de sa forme, était intenable, et constituait un danger pour tous les adversaires. Et jusqu’à l’apparition des équipes dans la main courante, nous avions la peur au ventre. Heureusement que l’entraîneur Mamadou Keïta dit Capi avait la solution. Il détacha Souleymane Sangaré sur l’épouvantail guinéen, sans doute avec la consigne de coller le buteur guinéen. Le bond de Souleymane Sangaré après les consignes de son coach rassura les milliers de spectateurs qui ont réagi par un tonnerre d’applaudissements. Comme on pouvait s’y attendre, celui que l’on surnomme Solonia gagné son duel face à Aboubacar Titi Camara. Solo revient aujourd’hui sur les propos de Capi :« Mon coach m’a dit que Titi Camara est un excellent joueur, qui peut profiter à tout moment d’une situation anodine pour surprendre. Donc, il me demanda d’anticiper sur ses intentions, tout en évitant de prendre un carton jaune matinal. Ce qui pouvait me handicaper. J’ai appliqué ses consignes à la lettre, et Dieu merci je m’en suis bien sorti. D’ailleurs, la réaction du public m’a galvanisé davantage. Du coup, je me suis senti soutenu, et en conséquence je n’avais pas le droit de décevoir ces maliens en général, et plus particulièrement ces spectateurs qui sont venus au Stade depuis le matin. Ce match contre la Guinée à Bamako est d’ailleurs l’un de mes meilleurs souvenirs. Auquel il faut ajouter celui qui nous a opposés à la Tunisie en ouverture de la CAN en 1994 ».
Mon crédo : le sérieux
Certes, Solo est un peu plus âgé que nous, mais votre serviteur l’a vu jouer entre 1980 et 1983 sur le grand espace du quartier populaire de Hamdallaye, devenu aujourd’hui le marché de Diafarana. Très athlétique, il traduisait un jeune très sain dans son corps, et qui ne trichait pas lors des matches inter quartiers.
C’est en 1984 que Souleymane Sangaré déménagea à Niaréla chez sa grand-mère. Il évolua dans des équipes dudit quartier comme Liverpool, Panthère Noire, et même les Onze Créateurs. A ces différents niveaux, il n’a signé aucune licence. C’était juste pour occuper son temps.
Son arrivée à l’AS Réal de Bamako pendant la saison 1985-1986 par le canal d’un oncle accéléra les choses. Junior à l’époque, l’entraineur des Scorpions, Idrissa Touré dit Nany, l’utilisait sur les trois fronts : junior, espoir et sénior. Cela peut surprendre ceux qui ne l’ont pas vu jouer dans l’adolescence. Sinon, son physique, sa ténacité et son ambition de jouer à l’élite sont assez illustratifs pour démontrer que sa réussite est loin d’être un fait du hasard ou de complaisance. Avec ses compagnons d’infortune comme feu Sory Ibrahim Touré dit Binkè, Boubacar Diallo dit Bol (Saharaoui pour d’autres), Mody Sissoko, Lamine Diallo, ils n’avaient le moindre répit chaque fois que l’encadrement décidait de les faire évoluer.
Souleymane Sangaré joua et perdit sa première finale de Coupe du Mali en 1987contre le Sigui de Kayes. Il remporta l’édition de 1989 face au Djoliba (buts de Adama Traoré dit Boxeur et de Harouna Coulibaly dit Diégo). Cette période consacre également sa sélection en équipe nationale junior, pour les éliminatoires directes de la CAN, dont la qualification en finale des Aiglons leur ouvrit les portes de la Coupe du Monde Arabie Saoudite 1989 à laquelle Solo a participé. Cette campagne propulsa au-devant de la scène des jeunes talentueux, et très soudés même en dehors du terrain. Certains ne résisteront pas aux propositions des grands clubs. Solo ne daigna pas quitter le club qui l’a vu grandir, et qui lui a servi de pont pour se faire une place au soleil. Pourquoi ? Parce qu’il était titulaire, et constamment convoqué en équipe nationale. L’évidence était que son avenir dans les équipes nationales dépendra de sa forme au Réal. Depuis son jeune âge, l’entrainement matinal était son crédo. Il nous rappela lors de l’entretien cette habitude, qui constituait son secret, sa dernière carte qu’il jetait pour expliquer sur le terrain le tempérament d’un joueur infatigable.
Après les compétitions internationales de jeunes et des espoirs, l’entraineur Molobaly Sissoko puise dans l’effectif des espoirs pour amorcer les éliminatoires de la CAN de Tunis 1994.
Solo est l’un des artisans de la qualification des Aigles pour ladite compétition. Une fois de plus, le retour du Mali sur la scène internationale permet à beaucoup de joueurs de l’équipe nationale de signer des contrats.
Odyssée au bord du Nil
Notre héros posa ses valises en Egypte, chez le club Assouan (1994-1996). Après, il transfère à Hosman Ahmed Hosman pour quatre ans (1996-2000). Solo signa le dernier contrat de sa carrière à Golby, toujours dans le même pays.
En 2002, il retourne au Mali, et décide de mettre fin à sa carrière. Quelles étaient ses motivations ?Solo explique : « En tant que cadet parce que vous êtes le jeune frère de mon ami et ancien co équipier du Réal, Fousseyni Sissoko, vous avez eu la chance de me voir jouer dans le quartier, à l’AS Réal et dans les sélections nationales. Je ne trichais pas, et je fournissais l’effort sur la base d’entrainements intenses du matin et du soir. La jeunesse est le moment propice qui permet à l’organisme de faire tout ce qu’il désire, pour maintenir la santé. Après tant d’années de sport, il faut savoir arrêter à temps, au risque de se faire mal. En un mot, je suis parvenu à la conclusion que je ne pourrai pas réaliser plus que je n’ai déjà fait. Donc, il fallait se retirer.
Et les mauvais souvenirs de Soloni ?
« Durant toute ma carrière, je ne retiens qu’un seul mauvais souvenir : la défaite du Mali en demi-finale de la CAN 1994 face à la Zambie en Tunisie. Nous pensions déjà à la finale, un rêve qui sera finalement transformé en cauchemar. Personne ne s’attendait au Mali à ce niveau, c’est à dire les demi-finales. Raison pour laquelle, l’encadrement et les joueurs se sont dit qu’il faut profiter. Malheureusement, les dieux du Stade en ont décidé autrement. Cela a été un coup dur pour le peuple malien, et constitue un très mauvais souvenir pour moi».
Après avoir pris sa retraite, Souleymane Sangaré a entrepris des études d’entraineurs, pour rester en contact avec football. Et depuis 2004, il dirige le centre de formation du Stade Mamadou Konatéavec l’ancien joueur de l’as Biton de Ségou, Ibrahim Nango ,dans le cadre du projet d’insertion des anciens footballeurs initié par le président Amadou Toumani Touré. En bon technicien, il a souligné que les différents centres contribuent à rehausser le niveau du football malien, à travers les exploits réalisés ces dernières années. Parce que la plupart des jeunes de catégorie d’âge viennent desdits centres à travers les stades Omnisports, du 26 mars, Mamadou Konaté et Ouezzin Coulibaly.
Au-delà comment il a géré sa retraite pour nourrir sa famille et subvenir à ses besoins ? Solo est clair dans sa réponse, il dit que dans la vie chacun a son secret pour vivre. C’est le sien qui lui permet de vivre et d’assurer les besoins de sa famille.
Marié et père de 3 enfants, Souleymane Sangaré aime le sérieux et le travail, tout en détestant lafainéantise.
O .Roger Sissoko
Source: Aujourd’hui-Mali