L’atmosphère est calme, le bureau du directeur est doucement éclairé par les rayons de soleil qui traversent la fenêtre. Zeinab* raconte son histoire. Elle parle timidement et rapidement en se triturant les ongles. A ses côtés, Cheick Oumar Sissoko, le psychologue du centre Kanuya à Bamako, où a trouvé refuge depuis près de 8 mois, la jeune fille de 14 ans.
Dans son regard fuyant, se mêlent tristesse et force, une forme de résilience après avoir traversé une épreuve des plus douloureuses. Zeinab a été victime de violences sexuelles alors qu’elle n’avait que 13 ans.
Cette douloureuse histoire commence quand elle décide de quitter son père et le Burkina Faso à la recherche de sa mère vivant au Mali et qu’elle dit n’avoir jamais connu. C’est une fillette de 13 ans qui débarque seule à Bamako avec pour seul bien le prénom de sa mère en tête. Difficile voire impossible que cette recherche aboutisse. Des “Fatoumata”, il y en a des milliers à Bamako.
Très vite, le besoin de manger et d’avoir un abri s’impose. Elle se fait employer comme vendeuse par une commerçante au marché contre environ un dollar par jour, souvent moins quand elle ne réussit pas à vendre toute la marchandise. A peine de quoi prendre un repas par jour.
La nuit, elle trouve refuge sous les étals du marché pour dormir.
C’est à ce moment qu’un homme lui propose de l’héberger. Croyant en sa bonne fortune, Zeinab accepte. Mais quelques semaines plus tard, le bon samaritain se transformera en bourreau. Lui et son ami abusent d’elles. L’un d’eux est arrêté par la police après signalement et Zeinab est placée au centre Kanuya sur ordonnance du juge des enfants.
Offrir une prise en charge holistique aux enfants et jeunes ayant subi des traumatismes.
Les premiers mois au centre Kanuya sont difficiles. “Apeurée, Zeinab manifestait des signes post-traumatiques et s’isolait des autres. Elle avait perdu toute confiance en elle, elle craignait d’être stigmatisée et d’être enceinte.” explique Cheick Oumar Sissoko, psychologue au centre Kanuya.
Zeinab subit plusieurs examens et reçoit des soins médicaux. Elle n’a pas contracté de grossesse. Petit à petit, les entretiens avec le psychologue l’aident à vaincre ses peurs et à se reconnecter avec elle-même d’abord puis avec les autres. Les travailleurs du centre Kanuya appuyés par l’UNICEF ont été formés sur les questions de protection de l’enfant, de prise en charge psychosociale et de protection contre les abus et exploitations sexuelles des victimes de violences et/ou affectées par le conflit.
En plus du psychologue, Zeinab arrive à se confier à Aïssata, une des éducatrices du centre qui très vite devient une figure maternelle pour l’adolescente. “ Ici au centre, j’ai tout ce dont j’ai besoin : de la nourriture, des vêtements, des amis à qui je peux raconter tout ce que je ressens. C’est comme une famille” raconte Zeinab.
Chaque jour au centre est une dose d’espoir pour l’avenir.
“J’ai touché à un ordinateur pour la première fois au centre. Ça me donne envie de retourner à l’école. Plus tard, je veux faire un métier dans lequel je pourrai travailler avec un ordinateur.”
Aujourd’hui, la jeune fille apeurée et renfermée a recommencé à sourire au milieu de tous ses camarades du centre. Elle reprend confiance en elle-même et s’ouvre chaque jour un peu plus aux autres. Au bout de 08 mois passés au centre Kanuya, Zeinab est intégrée et n’hésite plus à prendre la parole lors des groupes de discussions. Elle s’est aussi découvert une passion pour le babyfoot et pour l’ordinateur. “J’ai touché à un ordinateur pour la première fois au centre. Ça me donne envie de retourner à l’école. Plus tard, je veux faire un métier dans lequel je pourrai travailler avec un ordinateur.” déclare Zeinab, les yeux brillants.
Réintégrer socialement les enfants en tentant de les reconnecter à leurs familles.
Mais Zeinab n’a pas oublié sa mère. Elle espère toujours sentir les bras de sa mère autour d’elle un jour. En attendant, Zeinab retournera chez sa grand-mère paternelle qui vit quelque part au Mali. L’équipe du Centre Kanuya a entamé les recherches pour la retrouver.
C’est une composante essentielle du projet “Protéger la génération future – Les enfants touchés par le conflit armé au Mali” qui consiste entre autres à renforcer le système de gestion des cas pour les victimes de violences.
Grâce au Gouvernement japonais, l’UNICEF et ses partenaires au Mali travaillent à offrir à plus de 5,000 enfants victimes du conflit et/ou de violence comme Zeinab, un soutien médical, psychosocial et de réintégration appropriés. 387enfants, adolescents et femmes déplacés, rapatriés et leurs communautés d’accueil ont également pu bénéficier de services intégrés de réinsertion familiale et socio-économique afin d’atténuer les effets négatifs à long terme du conflit sur eux.
Le projet est financé à hauteur de 1,2 milliards de Francs CFA par le gouvernement japonais.
A travers l’UNICEF au Mali, le peuple japonais contribue à préserver la sécurité et la dignité des enfants touchés par le conflit armé au Mali réduisant ainsi les risques d’une plus grande instabilité en fournissant des services de protection de l’enfance et de réintégration socio-économique dans les zones les plus touchées (y compris les zones de conflit interne).
Pour chaque enfant, la protection ; pour chaque enfant, un futur.
*Le prénom a été changé pour raison de protection.