Le samedi dernier, ils étaient quelque 500 agents relevant de la Direction régionale de la Santé du District de Bamako à se réunir devant le Gouvernorat pour percevoir leurs salaires du mois de novembre. Après avoir attendu en vain durant cinq heures, ils ont été informés du report du paiement desdits salaires à la semaine prochaine. Provoquant colère et incompréhensions. Quel mépris pour des travailleurs qui ne réclament pourtant que leurs droits !
La scène étaient insoutenable, le samedi 29 novembre dernier, quand des personnels (sages-femmes, infirmiers, agents comptables, secrétaires, plantons…) des CESREF (centres de santé de référence) des six communes du District et de la Direction régionale de la Santé (DRS) du District avaient pris d’assaut la devanture du Gouvernorat dans l’espoir de percevoir leurs salaires du mois de novembre. Certains étaient venus de bonne heure, dès 5 heures du matin pour les uns, pour s’inscrire sur la liste devant servir à l’appel des salariés convoqués pour passer leur contrôle physique et empocher, à la suite de cela, leurs salaires du mois de novembre.
Rappelons que ce contrôle physique avait démarré en octobre dernier pour une période de trois mois, dans le but d’assainir la fonction publique des agents fictifs parmi lesquels figuraient parfois des décès. Cela à la demande des partenaires au développement pour une gestion efficiente des finances publiques. Ce qui est, dans le principe, une très bonne initiative quand on imagine les sommes colossales qui tombent ainsi dans les poches des fonctionnaires véreux qui s’enrichissent sur le dos des morts. Au détriment naturellement des caisses de l’Etat déjà exsangues.
Mais, là où le bât blesse, c’est l’impréparation voire l’incapacité des personnels (issus du département de la Fonction publique et des structures qui font l’objet de contrôle) à bien mener ce travail. Hier, à Koulikoro où les travailleurs ont failli perdre patience, aujourd’hui dans plusieurs structures de la capitale, c’est la désolation face à des équipes de contrôles physiques inexpérimentées, voire carrément nulles.
Le problème étant que c’est la programmation même de ces contrôles qui est sujette à caution, mieux, à polémique sur leur incompétence. Si ce ne sont pas des rendez-vous qui ne sont pas respectés, c’est une partie de l’équipe technique chargée de ce travail qui manque à l’appel. Souvent le représentant même de la Fonction publique, comme ce fut le cas le samedi dernier quand, d’après les informations reçues sur place, ce dernier ne s’était pas encore pointé à 9h30 au moment de notre passage pour la deuxième fois. Le premier ayant eu lieu à 5h30 quand la 22ème personne s’inscrivait sur la liste. Plusieurs autres personnes, dont M. Haïdara qui tenait la liste, ont fait leurs prières de l’aube devant le Gouvernorat dans le but d’occuper un bon rang pour pouvoir entrer à temps en possession de leurs salaires. C’est ainsi que des sages-femmes, des infirmières, des techniciennes et techniciens de laboratoire et autres personnels indispensables dans les CESREF ont quitté leurs postes et leurs lieux de travail dans le but de ne pas rater ce contrôle physique indispensable à leur maintien en tant que fonctionnaire ou contractuel de l’Etat ou des collectivités. Pendant ce temps, combien de femmes enceintes, de malades… ont eu besoin des services de ces personnels de santé ? Des centaines.
Comment peut-on dans un pays où il y a un manque cruel de personnel de santé convoquer des sages-femmes, des infirmières, des techniciens de laboratoire pour au moins toute une journée en laissant derrière eux des malades, des urgences, des femmes sur le point d’accoucher parfois par césarienne ? Pourquoi ne pas procéder au contrôle physique de ces personnels sur leurs lieux de travail ? Comme cela a été fait en ce qui concerne les hôpitaux, par exemple.
Des salariés victimes d’un vrai faux rendez-vous
Ce qui s’est passé le samedi dernier quand, à la suite d’une lettre de convocation, quelque 500 travailleurs des différentes structures relevant de la Direction régionale de la Santé du District de Bamako étaient réunis devant le Gouvernorat pour passer le contrôle physique et, pour ensuite, percevoir leurs salaires. C’est ainsi qu’une longue liste de quelque 500 personnes a été dressée de 5h du matin à 12h en attendant l’arrivée de l’ensemble des membres de l’équipe qui avait en charge cette opération de contrôle physique. Après des heures d’attente en vain, c’est aux environs de 11h30 que des bribes d’informations commencèrent à tomber… Avec l’arrivée d’un responsable de la Fonction publique pour annoncer que l’opération en ce qui concerne les personnels de santé est reportée et va commencer à partir du…mardi prochain. Provoquant ainsi la colère et l’indignation du public massé, telles des sardines, devant les grilles du Gouvernorat du District.
Face à cette situation humiliante, des syndicalistes en colère ont tenté d’entrer en contact avec des responsables de la Fonction publique afin qu’on leur explique pourquoi ce mépris pour des travailleurs qui ont laissé des malades derrière eux pour venir passer un contrôle physique qui a été reporté à la semaine prochaine et cela, sans aucune explication. Personne n’aura, en tout cas, une réponse satisfaisante sur les raisons de ce vrai faux rendez-vous. Et c’est la mort dans l’âme que certains parmi ces centaines de travailleurs déboussolés ont juré de ne plus travailler avant d’être payés. Que cela soit fait le mardi prochain, le mercredi voire le jeudi…qu’importe. Surtout qu’il n’y a qu’un seul billeteur pour payer tous ces salariés…C’est dire qu’ils devront alors prendre leur mal en patience.
En tout cas, les décideurs sont désormais avertis. Il est temps de mettre fin au désordre qui régnait jusque-là lors des opérations de contrôle physique. Il faut maintenant un minimum de considération pour ces travailleurs de la Santé qui vont continuer à courir cette semaine derrière leurs salaires du mois passé. Pour combien de temps encore devront-ils attendre ?
Mamadou FOFANA