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« Lass », son nom d’artiste, multiplie les expositions en Afrique et en Europe. Il affirme son style, original, dans une nouvelle série de peintures candides mettant en scène des animaux, des fleurs et des enfants.

Ce plasticien de 27 ans, dont l’atelier se trouve à Kalabankoro à Bamako, se trouve en décollage imminent. Son problème, assez rare pour être mentionné, consiste à garder assez d’œuvres pour les exposer, et ne pas les vendre trop rapidement.

Il expose à la fois chez LouiSimone Guirandou Gallery à Abidjan, au centre Montevideo à Marseille, dans le cadre de la saison Africa France 2020 et chez Mémoires Africaines à Sally, au Sénégal. Ses toiles ont été montrées en 2020 à Paris pour la première fois par la Galerie Chauvy, et d’autres œuvres seront bientôt accrochées au Mali et au Luxembourg.

Les influences d’Amadou Sanogo et Malick Sidibé

Lass a grandi « au village », près de Kayes, dans une famille soninké traditionnelle, avant d’aller se consacrer à sa passion et étudier à Bamako. Diplômé en sculpture de l’Institut national des arts, il se forme ensuite en arts plastiques au Conservatoire des arts et métiers multimédia de Balla Fasséké Kouyaté.

Il est d’abord influencé par le travail de son aîné Amadou Sanogo, une valeur sûre de la galerie Magnin-A. Il a ensuite exploré de nouvelles voies, sur les conseils de deux grands artistes contemporains, Soly Cissé et Barthélémy Toguo, prodigués lors du festival sur le Niger à Ségou. En grands formats, il commence à revisiter une cinquantaine de portraits de la jeunesse des années 1960 du photographe Malick Sidibé. Sur ces compositions colorées, il colle des cartes à jouer – une inspiration venue par hasard, une carte s’étant collée un jour sur une toile qu’il n’aimait pas, et qu’il avait mise à sécher dans sa cour.

Sa nouvelle série, non moins prolifique, met en scène des enfants, des fleurs et des animaux sur fond vert. Elle séduit pour sa fraîcheur, sa poésie, son jeu de couleurs et son style unique. Entamée en 2019 lors d’une résidence à la Fondation Blachère à la Somone, au Sénégal, elle part aujourd’hui comme des petits pains. Le message peut paraître naïf, il n’en est pas moins profond, en lien avec les dangers du changement climatique, mais aussi avec la culture dite « animiste » de l’Afrique de l’Ouest, dans laquelle la relation avec la nature est centrale.

« Les animaux symbolisent les obstacles, les difficultés qu’il y a toujours dans la vie, explique Lass. Les enfants ne touchent pas pied au sol dans mes toiles, ce sont des êtres libres et naturels. Ils voient les animaux comme des amis, ou essaient de les apprivoiser. La puissance du taureau bleu par exemple peut être contrôlée, on peut s’en servir. »

Le meilleur des mondes

Lass avait déjà commencé cette série avant qu’Amédé Mulin, architecte et commissaire d’expositions, un ancien de la Revue noire basé en Afrique de l’Ouest, n’organise l’exposition collective Brave New World (20 mai au 3 juillet 2021) à LouiSimone Guirandou Gallery à Abidjan. « Les conditions imposées par la pandémie m’ont incité à relire Le meilleur des mondes, une dystopie écrite en 1931 par Aldous Huxley, qui nous alerte sur les dangers de l’hyperconsommation et des dérives autoritaires », explique Amédé Mulin, qui collabore régulièrement avec LouiSimone Guirandou Gallery. Lass, Ange Dakouo, et Dramane Diarra, du collectif Tim’Arts fondé en 2014, ainsi que Dramane Bamana (collectif Sanou’Art) ont lu le livre et en ont débattu. Une exposition en est sortie, avec des messages plutôt optimistes.

Lass montre ainsi ces « bons sauvages » restés dans la jungle, à l’écart de l’ordre mondial décrit par Aldous Huxley. « Des humains qui connaissent le partage, la paix et la joie, par contraste avec un État mondial de gens déshumanisés détestant la nature et ne communiquant plus entre eux », explique l’artiste. Il n’est pas interdit d’y lire un signe de l’espoir incompressible de la génération de Lass, malgré les affres des crises qui sévissent au Mali depuis bientôt une décennie.

Parmi ses projets figure une résidence chez l’artiste qu’il admire le plus, Sadikou Oukpedjo, plasticien togolais exposé par la Galerie Cécile Fakhoury à Abidjan. En toute simplicité, Lass entend bien poursuivre sur sa lancée, « garder ce qui est naturel et humain » et voir de plus en plus de gens s’intéresser à son travail.

RFI

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