La démocratie malienne n’aura donc été qu’un feu de paille vite éteint par les bottes musclées des prétoriens.
Les partis politiques étaient nés en masse après 1991 suite au renversement du dictateur Moussa Traoré que d’aucuns n’hésitaient pas à comparer au général Pinochet du Chili, après 23 ans de règne sans partage assimilable à une autocratie. De ce régime de parti unique constitutionnel sur lequel tout fut dit et écrit, beaucoup d’analystes nationaux et étrangers confluèrent que sans être au service d’aucun impérialisme déterminé, la défense des intérêts d’un clan et de ses affiliés était son cheval de bataille.
Le CTSP d’ATT et de Zoumana Sacko, le meilleur des Premiers ministres depuis toujours, fit donc éclore un nombre incalculable de partis politiques dont certains équivalaient à des bureaux ethniques ou régionaux, au point qu’à mi-parcours, le ministre de l’Intérieur et de la Décentralisation (il eut plusieurs appellations), sans le dire ouvertement, dut admettre qu’il n’en connaissait pas le nombre exact. De toute façon, ils étaient légalement constitués selon les termes de la constitution de 1992 et de la charte des partis politiques issus de la même constitution et animèrent comme jamais auparavant la vie politique selon les règles de la démocratie énoncées par Alexis de Tocqueville.
Dans la foulée du pluralisme politique intégral édicté par la constitution, l’Adéma-PASJ émergea en 1992 lors de l’élection présidentielle de cette année remportée par M. Alpha Oumar Konaré. Il régna 10 ans durant de 1992 à 2002 avant de rendre en 2002 le tablier à ATT, par lequel arrivèrent après 9 ans de pouvoir tous les malheurs de ce pays, rébellion touareg et conspiration djihadiste aidant. On peut faire l’impasse sur l’avènement d’IBK en 2013 qui se comporta comme un néophyte politique pratiquant une politique plus que patrimoniale du pouvoir avec à la clé une IBKcratie plus nocive que la défunte ATTcratie.
Cela nous amène à presque 30 ans de pratique démocratique avec un bilan comportant plus de réussite que d’échec contrairement à une opinion nationale manipulée et travaillée au corps pour penser le contraire et chercher des poux sur la tête du mouvement démocratique. Car enfin le régime précédent, l’UDPM, qu’avait-il fait ? Rien ou presque avec une économie exsangue, des routes défoncées, des mois sans salaire pour les fonctionnaires et cela, avec un vocabulaire arrogant frisant le macabre.
Quoi qu’on dise, le régime démocratique a beaucoup fait pour ce pays, le tirant de la queue du peloton des pays les plus sous-développés vers le milieu de ceux-ci. Des routes nouvelles furent construites, de même que des ponts et des échangeurs, chose que les Maliens découvraient pour la première fois. Mais comme dirait l’autre, qui veut tuer son chien l’accuse de rage, et dans le cas du Mali une rage plus imaginaire que réelle. En un mot, le mouvement démocratique a réinventé la roue pour le Mali mais même s’il avait transformé Bamako en Londres ou en New-York, les nostalgiques de la dictature de Moussa Traoré, n’attendant qu’une occasion pour rebondir, auraient pris ces avancées pour de la machination. Et même maintenant que les partis politiques sont dissous et qu’on leur demande des comptes, la question est : demande-t-on à un décédé de payer ses dettes ?
Facoh Donki Diarra
(écrivain)