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Paralympique – Nantenin Keita : une ambassadrice pas comme les autres

PORTRAIT. Athlète, fille du chanteur malien Salif Keita, investie dans la défense des droits des albinos, Nantenin Keita court pour la France à Rio.

nantenin keita athlete sportif

À Rio, c’est d’abord l’athlète de haut niveau que l’on voit. C’est que Nantenin Keita, déficiente visuelle et albinos, vise désormais une troisième médaille paralympique sur le 400 mètres, dont elle a été la championne du monde en 2015… en attendant de digérer sa 5e place dans le 100 mètres.

Touchée après sa finale du 100 mètres en catégorie T3…

Ce dimanche de finale à Rio, Nantenin Keita a quitté la piste de l’Engenhao, le stade olympique de Rio, le visage défait. L’athlète venait de terminer sa course dans la finale du 100 mètres. Encore essoufflée, elle ne dira que peu de mots aux journalistes présents : « J’ai fait n’importe quoi, j’ai foiré mon départ. Voilà, tant pis. C’est dommage parce que j’aurais pu avoir la 3e place (…) et là, j’fais de la merde ! » « Nanto », comme l’appellent ses collègues de l’équipe de France, est déçue et surtout très remontée contre elle-même.

« Elle est très perfectionniste. Elle veut souvent trop bien faire, plus pour les autres que pour elle-même », reconnaît sa meilleure amie de l’équipe de France et triple championne paralympique, Marie-Amélie Le Fur. À 32 ans, Nantenin est l’un des piliers de l’équipe de France et un peu le baromètre du moral du groupe. « Quand Nanto est triste, c’est toute l’équipe de France qui est triste », rajoute Marie-Amélie, sa coloc de chambre en équipe de France depuis plusieurs années.

… mais pas coulée

Quelques jours plus tard, avec un peu de recul et sa 5e place digérée, Nantenin Keita reconnaît qu’elle a tendance à se poser trop de questions avant ses courses. « Et puis j’ai un gros souci, c’est que je n’ai pas confiance en moi. Je suis toujours dans le doute », ajoute-t-elle. Face à ses incertitudes, Nantenin a appris à être exigeante envers elle-même. Un enseignement transmis par son père Salif Keita, le grand musicien malien, une aide indispensable pour affronter les difficultés quotidiennes liées à leur condition d’albinos.

Consciente de sa particularité d’albinos…

« J’ai plus souffert d’être albinos que déficiente visuelle. Quand j’étais petite, je ne comprenais pas pourquoi les enfants ne voulaient pas jouer avec moi, pourquoi ils me fuyaient. C’est en discutant avec mon père que j’ai compris que je n’étais pas comme les autres et que je ne voyais pas comme les autres », raconte Nantenin. La jeune femme est consciente pourtant qu’elle a moins souffert que son père et que les albinos dans son pays d’origine, le Mali. « En Afrique, ça va plus loin, c’est des croyances ancestrales. Certaines personnes pensent que couper un membre d’un albinos, ça va donner du pouvoir, couper ses cheveux et les mettre dans son stylo ça va permettre de réussir à un examen… On en est encore là », argumente-t-elle.

… pas en victime, mais pour challenger la vie

Sensible à cette cause, Nantenin suit les traces de son père. Elle qui a fait des ressources humaines son métier gère aussi l’antenne française de la fondation créée par son père en 2006, SNK Salif Nantenin Keita. Son objectif est d’améliorer la vie des albinos au quotidien, principalement au Mali. La fondation distribue des crèmes solaires, produit précieux pour les albinos, et prend en charge leurs soins médicaux. Un beau combat que Nantenin reconnaît être parfois difficile. « Le nom de mon père est une chance, mais c’est parfois un désavantage. Certaines personnes pensent que Salif Keita n’a besoin de rien puisqu’il a déjà tout. Mais il y a beaucoup d’albinos au Mali. »

… avec un père, Salif Keita, qui l’inspire

De son père, lauréat des Victoires de la musique en 2010, elle a également hérité d’un goût indéniable pour la musique et la danse. Lors de la cérémonie d’accueil offerte aux athlètes français au village paralympique avant les Jeux, la sportive franco-malienne en a fait la démonstration, n’hésitant pas à suivre les danseurs brésiliens qui assuraient le spectacle. Une anecdote que se plaît à raconter Julien Héricourt, son chef d’équipe : « Elle est pleine de vie, elle a ce grain de folie qui l’habite et elle danse très bien ! Nanto a besoin d’être dans la démonstration et d’écouter de la musique, de se laisser porter par les rythmes avant de rentrer en compétition. » La fille du musicien renommé aurait aimé jouer de la guitare, mais elle reconnaît modestement qu’elle n’a pas reçu ce don pour la musique. « Si je me mets à chanter là, vous risquez de vous enfuir ! » plaisante-t-elle en riant.

Sa passion : l’athlétisme

Sa première passion, c’est avant tout l’athlétisme. Depuis ses premiers titres de championne du monde du 200 et 400 mètres il y a dix ans, « Nanto » a gagné trois médailles paralympiques : l’argent sur le 200 mètres et le bronze sur le 400 mètres à Pékin, et le bronze à Londres, sur le 100 mètres. À Rio, ses espoirs se concentrent maintenant sur le 400 mètres. Une distance dans laquelle elle a été sacrée championne du Monde en 2015. « Elle a dans les jambes son record, c’est à elle de parler sur la piste maintenant », assure confiant Olivier Deniaud, l’un des entraîneurs de l’équipe de France. Au-delà du record et de la médaille, c’est de la reconnaissance que Nantenin va chercher lors de cette course, pour montrer au monde, humblement, que « beaucoup d’albinos font des choses extraordinaires ».

 

Source: lepoint

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