Depuis le début de cette Crise qui nous sépare ou nous unit, avec nos différences, parfois de façon tragique, et absolument en vue d’une fin qui consacrera le triomphe du camp patriotique et révolutionnaire, nous avons toujours dit et insisté sur le fait qu’il n’existait aucune issue politique possible et que la seule alternative résidait dans une libération du pays de façon brutale.
La raison a toujours été unique et constante : personnellement je ne suis pas un démocrate et je ne sais pas ce que cela veut dire que d’être un “démocrate”. Pour les autres membres de la Révolution Permanente, tous restent convaincus que l’abrutissement politique du Nègre commence à inquiéter sérieusement lorsque celui-ci commence à croire qu’il existe un discours démocratiquement correct, pour l’opinion coloniale et qu’il y aurait un mérite à saupoudrer son combat politique de slogans loufoques du type « le combat pour la démocratie », «instauration de la démocratie », etc.
Donc nous nous rejoignons. Et nous sommes ensemble. Et c’est ensemble que nous avons décidé de vaincre.
Mais nous respectons le droit à la différence. Donc nous respectons ceux qui disent lutter pour instaurer cette escroquerie morale du Colon.
Mais de plus en plus, le camp des “démocrates” luttant pour instaurer la démocratie par les moyens légaux et démocratiques nous laisse perplexe. Comme nous ne savons pas où est-ce qu’ils vont et quel but ils poursuivent dans ce désordre total dans lequel ils se sont embourbés, nous posons la question : quelle lutte politique mène-t-on actuellement au Mali et en vue de réaliser quel objectif ?
Il y a d’un côté ceux qui disent lutter pour avoir une image républicaine d’opposant républicain, c’est-à-dire, l’image de l’opposant qui ne dérange pas mais qu’il ne faut pas non plus oublier. Parce qu’après la politique, il y a la faim et la faim n’est pas un vain mot. Ça oblige à des comportements.
Il y a de l’autre côté, ceux qui disent lutter pour la libération d’un frère et camarade de lutte avec toute sa suite de prisonniers arbitrairement enfermés dans des mouroirs. Mais ils font face à leur propre contradiction : la démocratie et les moyens de luette démocratique face à un régime médiocre qui ne comprend que le langage de la violence et qui se comporte en ange de la mort. Et derrière ce régime criminel, le Colon, inventeur de l’ivresse démocratique pour Nègres, celui dont l’opinion est le baromètre du démocratiquement correct, mais qui a largement démontré que la démocratie, c’est ce qu’il pense et veut en dehors des lois, des institutions, de la volonté populaire, toutes choses qui sont supposées être le cadre légitime de l’action démocratique.
Mais là où les deux camps se rejoignent, c’est que chacun lutte pour sa survie. On a d’un côté, un certain Modibo Sidibé, un véritable zombie politique et de l’autre côté, un homme rempli de bonnes intentions, le chef de file de l’opposition Soumaïla Cissé, qui n’a plus de temps pour un combat de gladiateurs mais demeure le gardien d’un feu de bois qui menace de s’éteindre et qu’il s’efforce de raviver avec un éventail presque en lambeaux.
Or au départ, ils étaient ensemble, dans un jeu d’hypocrisie et de cachotterie qui aura duré des lustres, engagés dans un combat pour libérer un Pays de la recolonisation française. Aujourd’hui, le Colon les a éloignés de ce combat, les a obligés à lutter qui pour la survie qui pour la guerre tranchée.
Le paradoxe, c’est que rien de décisif n’est fait sur le terrain pour exiger une sortie de crise parce que comme ça se dit à Abidjan : « Zyeux connaît bagage qui est lourd, c’est bêlard qui fait exprès ». Le politicard du FARE est un disciple qui assume. « Tenter regretter ». « Et puis ça va pas quelque part ». Donc la sagesse et l’instinct de survie ont pris le pas sur la naïveté démocratique.
L’autre paradoxe, c’est que celui qui veut collaborer ne pèse pas un clou. Donc il n’a aucun moyen pour extorquer plus de faveurs en tant qu’opposant loyalement correct.
Parvenus à ce point, il importe de se poser encore une fois, la question : Quelle lutte politique mène-t-on actuellement au Mali et pour quel but ?
Je n’ai pas eu de réponse malgré mes efforts pour comprendre. Si je n’ai pas eu de réponse, peut-être que mes efforts n’ont pas été suffisants ; peut-être aussi, c’est parce que rien de sérieux ne se fait. Or si tel est le cas, il est urgent de sortir du sabotage réciproque, de la moquerie réciproque, de l’auto-flagellation et, reprendre la lutte là où les martyrs du 26 mars l’ont laissé. C’est-à-dire, rejoindre la rue et y rester jusqu’à ce que le Mali soit libérés; sinon, c’est pays mort.
A. Diallo
Source: Nouveau Réveil