Après la mort de trois nouveau-nés en décembre dans le service de réanimation néo-natale de l’hôpital de Chambéry, la justice s’intéresse désormais au cas d’un quatrième nourrisson, mort neuf mois plus tôt avec des symptômes similaires et nourri, lui aussi, avec une poche du laboratoire Marette.
“Il s’agit d’un bébé qui est mort au mois de mars, pas du tout à la même période, pour lequel l’hôpital (de Chambéry) s’interroge et pour lequel la famille nous a saisis”, a indiqué mercredi à l’AFP le procureur de Marseille Brice Robin.
“J’ai fait un (réquisitoire) supplétif vendredi dernier et la juge d’instruction (du pôle santé de Marseille) Annaïck Le Goff est saisi du cas de ce bébé”, précise le magistrat.
M. Robin évoque des “questions”, notamment une “ressemblance” entre les “symptômes” de ce bébé et de Chloé, Théo et Milie, les trois nourrissons morts les 6, 7 et 12 décembre, ainsi que “la rapidité avec laquelle le bébé est décédé”.
Pour ces trois nouveau-nés, le Dr Michel Deiber, chef de ce service, avait évoqué “un tableau de choc septique très brutal, conduisant au décès en quelques heures malgré les manoeuvres de réanimation”. Un quatrième nourrisson, avec des symptômes identiques, avait pu être sauvé in extremis.
Le bébé mort en mars a été nourri avec une poche du même type que celles mises en cause dans les trois autres cas et produites par le même fabricant, le laboratoire Marette, situé à Courseulles-sur-mer (Calvados), a également confirmé le procureur.
Cette poche ne provenait cependant “pas du même lot”, a précisé la ministre de la Santé Marisol Touraine.
Des analyses effectuées sur 10 poches alimentaires d’un lot suspect, destinées aux nouveau-nés du service de néonatologie à Chambéry, avaient montré une contamination pour six d’entre elles par “un seul et même germe” qui n’était pas encore connu à ce jour. Selon l’institut Pasteur, il s’agit “d’une nouvelle bactérie, de la grande famille des entérobactéries, d’origine environnementale” (c’est-à-dire qu’on peut trouver dans le sol, l’air ou l’eau).
Ces six poches provenaient toutes d’un lot de 137 poches fabriquées le 28 novembre par Marette – donc postérieurement au décès de mars – et qui ont été retirées dès l’apparition des premiers soupçons d’anomalie le 17 décembre.
Enquête sur l’organisation de l’hôpital
Les autorités sanitaires avaient annoncé le 7 janvier la suspension de la production du laboratoire Marette après la découverte de cette “contamination massive” des poches.
“Il est trop tôt pour savoir si les causes de la mort de ce bébé sont les mêmes” que pour les trois autres, a toutefois souligné mercredi Mme Touraine qui a appelé les établissements approvisionnés par ce laboratoire à signaler tout décès ou incident.
Elle a indiqué avoir “lancé une enquête sur l’organisation au sein de l’hôpital de Chambéry”: “Nous avons besoin de poursuivre l’enquête” dont les premiers résultats seront dévoilés “probablement en milieu de semaine prochaine”, a-t-elle poursuivi.
De leur côté, les parents d’un des nourrissons morts en décembre à l’hôpital de Chambéry, contaminés par une poche de nutriments, ont appelé “tous les parents dans le doute quant au décès brutal de leurs bébés à se signaler”, après la révélation ce quatrième cas suspect.
“D’autres nourrissons sont peut-être également décédés de mort subite, suite aux mêmes symptômes, sans que les pédiatres aient pu en déterminer la cause. Il ne faut pas oublier que le laboratoire Marette fournissait sept hôpitaux”, ont déclaré à l’AFP les parents de Théo, mort le 7 décembre.
Les parents concernés ont rencontré la juge marseillaise Annaïck Le Goff mardi à Chambéry, où elle était en déplacement.
Dans un communiqué, le centre hospitalier de Chambéry a indiqué qu’il venait d’entamer “l’examen des dossiers médicaux des enfants décédés par choc septique depuis le début de l’année 2013”.
“C’est en cours et nous ne savons pas combien de temps cela va prendre”, a précisé à l’AFP la direction de l’hôpital, ajoutant avoir “cessé toute collaboration avec le laboratoire Marette depuis le 16 décembre” et utiliser désormais “des poches de nutrition industrielles, qui ont un statut de médicament disposant d’une autorisation de mise sur le marché (AMM)”.
© 2014 AFP