Ainsi donc, le ton est à l’apaisement entre les groupes armés du Nord et le gouvernement malien. Depuis le 5 octobre dernier en effet, le MNLA (Mouvement national de libération de l’Azawad), le HCUA (Haut conseil pour l’unité de l’Azawad) et le MAA (Mouvement arabe de l’Azawad) sont de retour à la table de négociations. Après une période d’incertitudes marquée par des affrontements entre l’armée malienne et des groupes armés touaregs à Kidal, le processus de dialogue dont la feuille de route a été établie par l’Accord de Ouagadougou du 18 juin 2013, reprend donc ses droits. C’est tant mieux pour le retour à une paix définitive dans le Nord Mali, après toutes ces années d’instabilité et tous ces accords mort-nés. Si la problématique demeure la même, à savoir quel statut accorder à cette région revendiquée par les groupes rebelles, la donne a beaucoup changé. Il s’agit de l’arrivée, au palais de Koulouba, d’un président démocratiquement élu. Plus donc de président transitoire, avec le manque de légitimité qui en découlait, et sur la base de laquelle les irrédentistes touaregs s’appuyaient pour refuser des négociations approfondies en vue d’un accord définitif. Maintenant qu’un président nanti de toute la légitimité requise est là, rien ne devrait donc empêcher la signature d’un accord définitif. Mais, les choses ne sont pas aussi simples que cela. La donne a changé parce que le nouveau président malien est reconnu pour être un homme à poigne, intransigeant sur la souveraineté nationale et l’intégrité territoriale de son pays.
Ainsi, bien que s’inscrivant dans une dynamique de négociations, il se montre intraitable sur ces questions. Il l’a du reste réaffirmé lors de son discours du 2 octobre dernier, après les événements au camp de Kati : « Ma main reste tendue. Laissons de côté la kalachnikov et venons à ce dialogue. Je prends à témoin la communauté Internationale, l’offre de paix ira de pair avec une volonté farouche de défendre le Mali, l’honneur du Mali, les soldats du Mali, les populations du Mali, toutes ethnies confondues ». Cette politique de la main tendue s’est traduite, le même jour, par la libération de 23 prisonniers touaregs arrêtés « sur le théâtre des opérations » militaires dans le Nord, conformément à l’accord de Ouagadougou.
Mais ces largesses ont une limite. Car IBK écoute la voix du peuple qui, dans sa grande majorité, refuse toute idée de séparatisme. Du reste, l’accord signé à Ouagadougou est clair sur cette question : tout est négociable sauf ce qui peut porter atteinte à l’intégrité territoriale du Mali. Et il faut compter sur IBK pour ne pas transiger sur ce point.
La délicatesse de ce second round des négociations n’est donc plus à démontrer. En cela, le médiateur Blaise Compaoré Blaise sait à quoi s’attendre de la part des autorités maliennes. Il doit aussi pouvoir dissuader les Touraegs par rapport à leurs prétentions territoriales. L’intransigeance malienne sur la problématique d’un Etat dit de l’Azawad est juste. D’ailleurs, quel pays sahélien accepterait de lâcher une partie de son territoire à des irrédentistes ? Aucun. Donc, il ne faut pas exiger du Mali ce que l’on n’accepterait jamais soi-même. Le médiateur est donc très attendu, voire très surveillé, sur cette question. Il a du reste eu un avant-goût du sentiment des Maliens à son égard, lors de la cérémonie officielle d’investiture d’IBK. A l’applaudimètre, ce fut Idriss Déby, le guerrier, qui a ravi les suffrages, et non Blaise Compaoré le médiateur. Ce dernier doit en tenir compte. De toute façon, le médiateur sait qu’il a affaire à une partie très serrée, où sa propre crédibilité est en jeu. Il doit démontrer, par sa neutralité, que les Maliens n’ont pas de raison de le suspecter de connivence avec les groupes armés du Nord. Au-delà de l’honneur que comporte la gestion de la médiation, il y a surtout une lourde responsabilité, celle de ne pas décevoir le peuple malien .
La Rédaction / Le quotidien.bf