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Mme Doumbia Fatoumata Diallo : L’exemple de femme battante !

Mme Doumbia Fatoumata Diallo est le prototype de la femme battante. Confrontée très tôt aux tristes réalités de la vie de famille, nombreuse à faible revenu, elle a pris conscience de ses responsabilités en contribuant sans tambour ni trompette aux dépenses quotidiennes du foyer.

Installée près du Centre Togola, non loin du marché de Sabalibougou en Commune V du District de Bamako, Mme Doumbia est connue pour son activité un peu spécial pour une femme, à savoir récupérer et reconditionner les carreaux- cassés pour les revendre. C’est sous une bâche suspendue à un arbre lui servant d’atelier qu’elle nous a accordé cet entretien pour parler de son dur labeur, ses difficultés et ses besoins.

Fidèle et soumise à la volonté de son mari

Mme Doumbia Fatoumata Diallo est une femme non scolarisée. Toujours fidèle à la volonté de son mari et soucieuse du bien-être des siens, elle n’a jamais croisé les bras comme en témoigne son combat au quotidien contre les carreaux pour aider à assurer les besoins de la famille. Ce combat permanent l’amène à exercer de petites activités génératrices de revenus, comme laveuse de linge, vendeuse ambulante. «J’étais laveuse de linges, ils ont dit à mon mari que si je continuais à faire ça qu’il ne prospérera pas. Ensuite, je suis devenue vendeuse ambulante, mal vu par mon mari. Un jour, il m’a dit de choisir entre le foyer et le commerce ; j’étais obligée de me soumettre à sa volonté».

Désespérée elle se voit donc assignée aux seules activités ménagères jusqu’au jour où cette opportunité se présente à elle par l’entremise d’une amie. «Je reçois la visite d’une amie qui m’a proposé ce travail dans lequel elle gagne sa vie. C’est ainsi que j’ai commencé ce boulot. Et aujourd’hui je remercie le bon Dieu. Cette activité me permet de subvenir aux besoins de ma famille tout en préservant ma dignité. Je le dis parce qu’en tant qu’une femme non scolarisée et mariée à un homme trop exigeant, je suis appelée à me battre pour ne pas devenir mendiante.»

Un secteur de plus en plus concurrentiel

Ainsi voilà 17 ans que Mme Doumbia Fatoumata Diallo a commencé ce commerce.  Le secteur était jusque- là réservé aux femmes. Mais l’arrivée des hommes sur le terrain avec leurs engins a, selon elle, perturbé le marché et amoindri leurs chances. Ces nouveaux négociants. «Auparavant, toutes les matières, à savoir les carreaux cassés et les débris de charbons étaient gratuites. On se rendait dans les chantiers de construction. Les propriétaires se débarrassaient de ces carreaux en les jetant. Avec leur accord, on s’approvisionnait sans payer même un franc. Parfois ce sont les gardiens de maisons qui exigeaient le paiement du prix du thé avant de les ramasser. Aussi, les vendeurs de charbon, encombrés par les débris, nous sollicitaient, voire suppliaient d’aller nous approvisionner. Ces avantages faisaient de cette activité une aubaine pour nous. Malheureusement rien n’est comme avant ; tout se paie actuellement et les nouveaux acteurs sont devenus maîtres du marché. Après avoir négocié avec les propriétaires, ils viennent nous sous-traiter la marchandise à des prix exorbitants ». Elle affirme avoir noué des contacts. Ce qui lui permet toujours d’être approvisionnée sur place par des clients.

Un labeur dur et peu rentable

Pour elle, ce qui est important, c’est la santé et la force de travailler. Deux avantages dont elle bénéficie et fait bon usage, en dépassant son statut de femme de ménage. Au-delà de l’amoindrissement de revenus dans son activité, elle regrette l’inorganisation du secteur et des trahisons de certaines de ses collaboratrices qui ont abusé de sa confiance. En plus de la cherté des matières, elle déplore son manque de moyen de transport de ses marchandises qui se fait au bord d’un tricycle, dont le prix n’est pas toujours abordable. « Aujourd’hui un sac de 50kg de carreaux-casse se vend à 2000 F, un chargement de tricycle est entre 20000 et 25000 F. ça dépend de la qualité. Le charbon qu’on trouvait gratuitement se vend maintenant à 2000F, le sac de 50kg».

Elle évoque d’autres contraintes. « Si on tombe sur des carreaux lourds qui sont capricieux, c’est la perte. Parce qu’après le four, ils sont intraitables. À cela s’ajoute le per diem de l’équipe de travailleurs, dont chacun perçoit de 3000 à 6000 F selon le gain du marché. Donc soit on gagne, soit on perd. Et les prix de revente fixés à 125 pour 1kg et 125 000 la tonne, elle dit avoir généralement tiré son épingle du jeu ».

Avec son burin en mains comme outil de travail et consciente des risques d’accident de travail et de maladie, Mme Fatoumata Diallo n’oublie jamais de faire son bilan de santé en effectuant régulièrement un contrôle médical dès que des signes de fatigue se font sentir. Car, dit-elle, « c’est un travail pénible, périlleux et épuisant. Vu mon âge, je dois veiller sur ma santé ».

Mme Doumbia Fatoumata Diallo est au-delà de l’épouse, une héroïne, un pilier de sa famille, un exemple de l’émancipation de la femme. Elle n’aspire qu’à vivre dignement, par la sueur de son front.

Par Broulaye Koné

Le Challenger
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