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Mise en œuvre de l’Accord de paix: ce que dit le dernier rapport de BKM

C’est en principe aujourd’hui qu’il sera procédé à l’examen périodique du rapport du Secrétaire général des Nations unies sur la situation au Mali, devant le Conseil de sécurité. Dernier du mandat de Ban Ki-Moon, le document souligne des progrès accomplis dans l’application de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali mais aussi des retards consécutifs à certaines divergences entre les parties signataires mais aussi de la volatilité de la situation sécuritaire sur le terrain. D’où son appel aux protagonistes d’agir de manière rapide et décisive pour honorer leurs engagements envers le peuple malien.
Nous vous proposons de larges extraits du rapport du Secrétaire général sur la situation au Mali

Secretaire general ONU ban ki moon

Rapport du Secrétaire général sur la situation au Mali

I.. Introduction

1. Par sa résolution 2295 (2016), le Conseil de sécurité a prorogé le mandat de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA) jusqu’au 30 juin 2017 et m’a prié de lui faire rapport tous les trois mois sur la suite donnée à sa résolution, en particulier sur les progrès accomplis dans l’application de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali et l’action menée par la MINUSMA pour l’appuyer.

II. Faits politiques importants

A. Application de l’Accord de paix

2. Le 23 septembre, en marge du débat général de la soixante et onzième session de l’Assemblée générale, j’ai présidé, avec le Président du Mali, Ibrahim Boubacar Keïta, une réunion ministérielle visant à apaiser les tensions apparues entre les parties signataires à l’Accord de paix entre juillet et septembre, à donner un nouvel élan au processus de paix et à solliciter un plus grand soutien de la communauté internationale. Après la séance d’ouverture, le Ministre des affaires étrangères, de la coopération internationale et de l’intégration africaine du Mali, Abdoulaye Diop, et le Ministre d’État, Ministre des affaires étrangères et de la coopération internationale de l’Algérie, Ramtane Lamamra, ont coprésidé la rencontre, avec le Secrétaire général adjoint aux opérations de maintien de la paix. Dans la synthèse de la réunion établie par les coprésidents, les parties ont été exhortées à honorer pleinement et sincèrement les engagements qu’elles avaient pris et à prendre des mesures concrètes pour que l’Accord soit rapidement mis en œuvre. Malgré ces efforts, les progrès accomplis ont été modestes. Les principales dispositions de l’Accord n’ont pas été appliquées, notamment celles concernant la mise en place d’autorités intérimaires et l’organisation de patrouilles mixtes, et les combats ont repris entre la Coordination des mouvements de l’Azawad (CMA) et la coalition de groupes armés Plateforme. Entre-temps, de nouveaux groupes armés ont demandé à faire partie des arrangements institutionnels et sécuritaires intérimaires.

Mesures politiques et institutionnelles
3. Les 21 et 22 septembre, le Comité de suivi de l’Accord a tenu sa onzième réunion à Bamako, sur fond de confrontations constantes entre les groupes armés signataires dans la région de Kidal. Si la CMA a accusé le Gouvernement de soutenir le Groupe d’autodéfense des Touaregs Imghad et leurs alliés, la Plateforme, quant à elle, a insisté sur la nécessité de remédier à la domination de Kidal par la communauté touarègue des Ifoghas, qui compose la majeure partie de la CMA. Le 21 septembre, l’équipe de médiation internationale a publié une déclaration dans laquelle elle condamnait les violations du cessez-le-feu et insistait sur le fait qu’il fallait dialoguer afin d’accélérer l’application de l’Accord. Elle adressait également une mise en garde à ceux qui ne mettraient pas fin aux hostilités ou qui entraveraient la mise en œuvre de l’Accord, car ils s’exposeraient à des sanctions. Le même jour, la CMA a rendu publique la liste des candidats à la Commission nationale pour le désarmement, la démobilisation et la réintégration, la Commission d’intégration et le Conseil national pour la réforme du secteur de la sécurité, tandis que la Plateforme désignait des représentants pour les autorités intérimaires. Le 7 octobre, la CMA a présenté la liste des candidats pour les autorités intérimaires.
4. Le 14 octobre, le Gouvernement a nommé les membres des autorités intérimaires pour les régions de Gao, de Kidal et de Tombouctou et ceux des collèges transitoires pour les régions de Ménaka et de Taoudénit, précisant que ceux-ci désigneront un président parmi leurs membres. Il a également désigné des conseillers spéciaux auprès des représentants de l’État pour chacune des cinq régions du nord, si bien que la CMA l’a accusé d’augmenter de manière unilatérale son quota de membres au sein des autorités intérimaires. Tant la CMA que la Plateforme ont insisté pour assumer la présidence des autorités intérimaires de Kidal. Des organisations de la société civile, en particulier des organisations de jeunes dans les régions de Gao et de Ménaka, ont manifesté contre la mise en place des autorités intérimaires. En dépit de la loi no 2015-052 du 18 décembre 2015 instituant des mesures visant à promouvoir l’égalité des femmes dans l’accès aux postes pourvus par élection ou nomination, qui fixe à 30 % le quota de représentation minimale des femmes, les 37 membres des autorités intérimaires qui ont été proposés par les parties étaient des hommes. Le Gouvernement a désigné une femme parmi les 32 membres des collèges transitoires et deux femmes parmi les 20 conseillers spéciaux.
5. Au cours des douzième et treizième réunions du Comité de suivi de l’Accord, qui ont eu lieu les 19 et 20 octobre et les 28 et 29 novembre respectivement, les désaccords persistants entre la CMA et la Plateforme au sujet des arrangements sécuritaires à Kidal ont relégué au second plan les débats relatifs à d’autres questions. Les groupes armés signataires étaient d’accord quant au principe de l’organisation de patrouilles mixtes à Kidal, mais la Plateforme a demandé que les combattants de la CMA qui ne prendraient pas part aux patrouilles quittent Kidal pour les sites de précantonnement situés hors de la ville. Aucun accord n’a été trouvé à ce sujet. En réponse, le Comité a créé un groupe de travail présidé par le Haut-Représentant du Président pour l’application de l’accord de paix, Mahamadou Diagouraga, afin de faciliter l’application des mesures intérimaires, notamment s’agissant de la mise en place du Mécanisme opérationnel de coordination dans les régions de Gao et de Kidal.
6. Pendant ce temps, des factions de la CMA, luttant pour le pouvoir dans le nord du Mali, ont demandé à participer au processus de paix. Le 16 décembre, le Mouvement populaire pour le salut de l’Azawad, la Coalition des peuples de l’Azawad et la Coordination des mouvements et fronts patriotiques de résistance II (CMFPR-II) ont publié une déclaration conjointe dans laquelle ils ont dénoncé leur exclusion des arrangements politiques et sécuritaires intérimaires mis en place dans le cadre de l’Accord. À la quatorzième réunion du Comité de suivi de l’Accord, qui s’est tenue le 20 décembre, la CMA a annoncé qu’elle suspendait sa participation au Comité et à ses sous-comités, invoquant notamment le manque de progrès accomplis dans la mise en œuvre de l’Accord et la prolifération des groupes armés. Elle a également demandé la tenue d’une réunion de haut niveau de l’équipe de médiation internationale. La réunion, qui s’est déroulée sans la CMA, n’a guère permis de progresser dans la mise en place des autorités intérimaires, et aucune solution n’a été trouvée pour répondre aux revendications des factions.

Élections communales
7. Le 23 septembre, un groupe de parlementaires de l’opposition a introduit un recours en annulation contre la nouvelle loi électorale devant la Cour constitutionnelle, faisant valoir que la loi enfreignait, entre autres, la Constitution et la loi no 2015-052 du 18 décembre 2015. Le 13 octobre, la Cour constitutionnelle a rejeté le recours. Le 17 octobre, le Président a promulgué la loi permettant au Gouvernement de poursuivre l’organisation des élections communales selon le calendrier électoral que celui-ci avait fixé au milieu de l’année 2016. Les groupes armés signataires ont contesté cette loi, car ils estimaient qu’elle allait à l’encontre de l’Accord de paix, étant donné que celui-ci prévoit que la mise en place des autorités provisoires précéderait les élections. Le Gouvernement a avancé que la Constitution excluait un nouveau report des élections communales, qui ont déjà été différées à quatre reprises depuis 2009. Le 20 octobre, l’équipe de médiation internationale a rencontré le Premier Ministre, Modibo Keita, et a engagé le Gouvernement à poursuivre les consultations avec les groupes armés signataires. La MINUSMA a continué de dialoguer avec toutes les parties prenantes afin de parvenir à un consensus sur le processus électoral. Le 19 novembre, j’ai publié une déclaration dans laquelle j’engageais le Gouvernement à poursuivre un dialogue constructif avec toutes les parties prenantes pour apaiser les tensions qui pourraient survenir avant et après les élections.
8. Le 20 novembre, les élections se sont déroulées dans 92 % des 703 communes du pays et, sur l’ensemble des candidats qui se sont présentés, 31 % étaient des femmes. Des individus armés, notamment des membres des groupes armés signataires, ont causé des problèmes de sécurité et empêché la tenue des élections dans 43 communes des régions du nord et du centre, notamment dans la région de Kidal où des candidatures avaient été enregistrées dans deux communes. Les élections n’ont pas eu lieu dans 15 autres communes dans les régions de Gao, de Kidal et de Tombouctou, ni dans celles de Ménaka et de Taoudénit, où aucun candidat ne s’était présenté. Des assaillants non identifiés ont tué cinq soldats dans la région de Tombouctou dans une embuscade tendue aux forces armées qui transportaient les urnes. La MINUSMA a fourni une aide technique et logistique et un appui à la sécurité dans le cadre de ces élections. Par l’intermédiaire du panier de fonds du Programme des Nations Unies pour le développement, la communauté internationale a versé 10 millions de dollars pour le financement, entre autres, des dépenses de personnel, du matériel électoral et des programmes de sensibilisation.
9. Le 21 novembre, la CMA a publié une déclaration dans laquelle elle rejetait la légitimité et le résultat des élections. Les partis de la majorité présidentielle, le Rassemblement pour le Mali et l’Alliance pour la démocratie au Mali-Parti africain pour la solidarité et la justice, ont remporté 187 et 131 communes respectivement. L’Union pour la République et la démocratie, quant à elle, en a remporté 102. Au niveau national, le taux moyen de participation s’élevait à 43 % (23 % à Bamako et 60 % dans la région de Gao). Les femmes représentaient 30 % des conseillers municipaux élus dans les régions de Bamako et Gao et 29 % dans la région de Tombouctou. Le 26 novembre, le Gouvernement a indiqué qu’il commencerait par organiser des élections partielles dans les communes dans lesquelles les conditions opérationnelles et la sécurité le permettraient, et qu’il mettrait ensuite en place des autorités intérimaires dans les communes où aucun candidat ne s’était présenté ou dans lesquelles les conditions de sécurité demeuraient très précaires.

Mesures de défense et de sécurité
10. Après les affrontements qui ont opposé des groupes armés signataires entre juillet et septembre, la Commission technique de sécurité a décidé, les 29 et 30 septembre, qu’à compter du 17 octobre, à moins que les groupes armés aient notifié à l’avance les mouvements d’artillerie lourde à la MINUSMA, celle-ci confisquerait les armes en question; elle a décidé également que les convois de plus de cinq véhicules devraient être préalablement approuvés par la MINUSMA. Le 22 octobre, la Mission a constaté deux mouvements non déclarés rassemblant plus de 25 véhicules de la Plateforme à proximité d’Aguelhok (région de Kidal). Elle a intimé aux groupes armés signataires de cesser ces mouvements.
11. De nouvelles violations du cessez-le-feu commises par des groupes armés signataires ont été signalées dans la région de Gao. Le 1er décembre, la CMA a indiqué que l’un de ses membres avait été tué et plusieurs autres capturés lors de l’attaque de sa base de Marsi par le Groupe d’autodéfense des Touaregs Imghad. Le 3 décembre, un affrontement à Fafa qui a opposé la Plateforme et un groupe armé associé à la CMA a fait deux blessés parmi les membres de la Plateforme. Le 7 décembre, la CMA et la Plateforme auraient pris part à des affrontements armés à Talataye. L’équipe mixte d’observation et de vérification de la Commission technique de sécurité n’a pas pu enquêter sur les allégations de violations du cessezle-feu signalées par les parties signataires, en raison de problèmes de sécurité.
12. Le 14 octobre, les parties signataires ont décidé que le cantonnement commencerait dès que possible, chose très peu probable puisque les groupes armés signataires n’ont pas encore présenté leurs listes de combattants, la Commission pour l’intégration n’a pas adopté de critères pour leur intégration dans les Forces de défense et de sécurité maliennes et il n’y a pas de patrouilles mixtes pour assurer la sécurité des sites de cantonnement. Depuis le 31 octobre, les huit sites de cantonnement sont néanmoins prêts à accueillir 12 000 combattants, notamment les combattantes et les enfants associés aux groupes armés. Tout au long de la période considérée, la MINUSMA a poursuivi ses projets de lutte contre la violence communautaire aux alentours des sites de cantonnement dans les régions de Gao, Kidal, Mopti et Tombouctou. Le 8 décembre, la conférence des donateurs tenue à Bamako afin de soutenir le financement du programme national de désarmement, de démobilisation et de réintégration a permis de réunir 25 millions de dollars pour la réinsertion des ex-combattants au Mali.
13. À la fin de la période considérée, les effectifs de la Commission du désarmement, de la démobilisation et de la réinsertion, de la Commission d’intégration et du Conseil national pour la réforme du secteur de la sécurité étaient au complet. Le 16 novembre, le Gouvernement a désigné le président de la Commission du désarmement, de la démobilisation et de la réinsertion et celui de la Commission d’intégration. Les 2 et 8 décembre, il a nommé des représentants des parties signataires auprès des deux commissions et du Conseil national pour la réforme du secteur de la sécurité. La CMA et la Plateforme se sont opposées à la diminution du nombre de leurs membres parmi les personnes qui avaient été nommées, tandis que le Gouvernement s’est engagé à verser une rémunération aux membres de ces organismes. La MINUSMA a aidé le Gouvernement à élaborer un projet de critères d’intégration et a organisé un atelier visant à renforcer les capacités des membres de la Commission d’intégration et du Conseil national. Elle a également apporté un concours financier destiné à aider le Conseil national à rénover ses locaux et à les doter d’équipements.
14. La mise en place du Mécanisme opérationnel de coordination et l’organisation de patrouilles mixtes ont encore été retardées, faute notamment de critères régissant l’intégration des ex-combattants des groupes armés dans les institutions nationales chargées de la sécurité, de désaccords concernant les sites de cantonnement à Kidal et des revendications formulées par les factions armées, désireuses d’être associées aux patrouilles mixtes. En conséquence, les parties signataires ont repoussé les délais à maintes reprises. Toutefois, le 3 octobre, des éléments des forces armées maliennes, de la Plateforme et du Mouvement populaire pour le salut de l’Azawad ont mené des patrouilles conjointes dans les régions de Gao et de Ménaka. La CMA a dénoncé cette initiative, y voyant une violation de l’Accord. Le 5 décembre, une centaine de membres de la CMFPR-II ont brièvement occupé le site du Mécanisme opérationnel de coordination à Gao et ont demandé à être inclus dans les patrouilles mixtes. Après l’intervention de la MINUSMA, le groupe a accepté de se retirer. Dans une déclaration publiée le 8 décembre, la CMFPR-II et le Mouvement populaire pour le salut de l’Azawad ont dénoncé leur exclusion des patrouilles mixtes et rejeté toutes les mesures prises aux fins de la mise en œuvre de l’Accord qui ne prévoyaient pas leur intégration. Le 10 décembre, l’enregistrement des membres des forces armées maliennes a débuté au site du Mécanisme à Gao. Les opérations de contrôle, de tri et d’enregistrement des combattants de la Plateforme ont commencé le 11 décembre. Au 22 décembre, 200 soldats et 176 membres de la Plateforme avaient rejoint le Mécanisme à Gao et commencé leur entraînement en vue de rejoindre les patrouilles mixtes. Au moment de l’établissement du présent rapport, il était prévu que les combattants de la CMA arrivent prochainement. Le 20 décembre, une cinquantaine de membres de la CMFPR-II se sont brièvement rassemblés au camp du Mécanisme à Gao et ont demandé à être inclus dans les patrouilles mixtes. Après l’intervention de la Mission, ils ont quitté le camp. La MINUSMA et le Fonds des Nations Unies pour l’enfance collaborent étroitement et s’attachent à repérer et à protéger les enfants associés à ces groupes armés.

B. Autres faits nouveaux
15. Le Gouvernement a établi, avec le soutien de la MINUSMA, un ensemble de critères et des échéances visant à faciliter l’évaluation des progrès accomplis par les parties signataires dans l’application de l’Accord.
16. Le rétablissement de l’autorité de l’État dans le nord et le centre du pays est resté problématique. Malgré une augmentation de 4 points de pourcentage (de 33% à 37 %) du nombre de fonctionnaires déployés dans les régions du nord, le Gouverneur de Taoudénit était basé à Tombouctou, en raison des déficiences des infrastructures de la région, et le Gouverneur de Kidal n’a pas pu s’installer dans la région en raison de l’insécurité. Dans la région centrale de Mopti, le Gouverneur a conseillé aux fonctionnaires en poste dans certaines zones de s’acquitter de leurs tâches depuis la capitale régionale, les conditions de sécurité s’étant détériorées.
17. Au début du mois de novembre, le comité d’experts pour la révision de la Constitution a présenté au Gouvernement un projet portant révision de la Constitution, après avoir procédé à des consultations avec les partis politiques, les groupes armés signataires, des organisations de la société civile et de s chefs traditionnels. Il est proposé d’apporter un certain nombre de modifications à la Constitution, notamment avec la création d’un Sénat tel que prévu par l’Accord.
18. Le 4 novembre, le Président a chargé le médiateur de la République, Baba Hakim Haïdara, de présider les travaux du Comité en vue de la préparation de la Conférence de réconciliation nationale. Comme le prévoit l’Accord, la Conférence devrait faciliter la réconciliation nationale en s’attaquant aux causes profondes du conflit et faciliter l’instauration d’un consensus sur la voie à suivre. La Conférence était initialement prévue pour le mois de décembre, mais elle a été reportée.

III. Faits importants en matière de sécurité
23. Dans l’attente de la mise en œuvre des dispositions prévues dans l’Accord en matière politique et de sécurité, la situation est demeurée instable dans les régions du nord et du centre, compte tenu de la présence limitée des Forces de défense et de sécurité maliennes et des autorités de l’État. La MINUSMA, face aux attaques perpétrées contre les civils et le personnel des Nations Unies, s’est efforcée de maintenir la position plus déterminée et réactive qu’elle présente depuis l’adoption de son nouveau mandat, malgré son manque criant de moyens. A. Attaques asymétriques et autres
24. Les attaques asymétriques ont continué de prendre pour cible les forces maliennes, françaises et de la MINUSMA, usant de tactiques complexes, de véhicules piégés conduits par des kamikazes, de bombes d’accotement et d’obus de mortier. Au total, 25 attaques ont été perpétrées contre les Forces de défense et de sécurité maliennes et 29 autres contre la MINUSMA, contre 39 et 27, respectivement, au cours de la période précédente. En tout, 15 membres des Forces de défense et de sécurité maliennes ont été tués et 33 blessés lors d’attaques contre 52 et 72, respectivement, au cours de la période précédente. En outre, trois soldats de la paix ont été tués et 25 blessés, contre 13 et 32, respectivement, au cours de la période précédente.
25. Le 3 octobre, des assaillants ont tiré trois obus de mortier en direction du camp de la MINUSMA à Aguelhok, dans la région de Kidal. Deux véhicules militaires de la MINUSMA qui répondaient à l’attaque ont heurté un engin explosif, faisant deux morts et sept blessés parmi les soldats de la paix. Le 30 octobre, une attaque au mortier contre le camp de la MINUSMA à Kidal a endommagé trois hélicoptères de transport moyen. Ansar Eddine a revendiqué l’attaque, affirmant qu’elle visait les forces françaises. Le 6 novembre, un convoi logistique de la MINUSMA a heurté une bombe placée en bord de route et des assaillants armés ont ensuite ouvert le feu, tuant un soldat de la paix et en blessant huit autres. Deux civils maliens, qui suivaient le convoi mais n’en faisaient pas partie, ont également été tués. Le 29 novembre, des assaillants ont pénétré dans l’aéroport de Gao, au volant de deux véhicules chargés d’explosifs. L’un des véhicules a explosé, blessant deux agents de sécurité privés et détruisant des installations de la MINUSMA. Six appareils de la MINUSMA (cinq hélicoptères et un avion) ont également été endommagés. AlMourabitoun a revendiqué cette attaque. Le même jour, deux roquettes ont atterri près de l’aéroport de Tombouctou. Al-Qaida au Maghreb islamique a revendiqué l’attaque, affirmant qu’elle visait « l’aéroport des forces françaises ».
26. Le 13 octobre, des assaillants ont attaqué les forces armées maliennes après qu’un de leurs véhicules a heurté un engin explosif, à 35 kilomètres au nord-est de Diabali, dans la région de Ségou, faisant quatre morts et sept blessés parmi les soldats. Ansar Eddine a revendiqué l’attaque. Le 6 décembre, lors d’une autre attaque revendiquée par Ansar Eddine, huit assaillants ont pris pour cible la prison de Niono, dans la région de Ségou, libérant 93 détenus, dont, selon certaines informations, des membres de groupes extrémistes violents, et s’emparant d’armes, de munitions et de motocyclettes. Un gardien de prison a été tué.
27. Le 8 octobre, un chef d’état-major militaire du Haut Conseil pour l’unité de l’Azawad, Cheikh Ag Aoussa, a été tué à environ 300 mètres du camp de la MINUSMA à Kidal, lorsque son véhicule a explosé à l’issue d’une réunion de coordination de la sécurité qui avait eu lieu dans le camp. L’Organisation des Nations Unies a ouvert une enquête sur les circonstances de sa mort.

X. Observations
63. Le processus de paix au Mali se trouve à un moment crucial. En dépit des progrès accomplis au cours des 18 mois écoulés depuis la signature de l’accord, les parties signataires peinent à s’entendre sur les principales mesures provisoires à mettre en place, ce qui ralentit la mise en œuvre des autres dispositions. Étant donné la complexité et la difficulté du processus de paix, les parties signataires se doivent d’agir de manière rapide et décisive pour honorer leurs engagements envers le peuple malien. À moins de six mois de la fin de la période intérimaire spécifiée dans l’accord, j’engage fermement toutes les parties à mettre un terme immédiat aux combats et à reprendre un dialogue constructif. Les parties signataires doivent tirer pleinement parti du potentiel qu’offrent les mécanismes de suivi prévus dans l’accord, notamment en y faisant participer durablement des représentants de haut niveau, pour régler leurs différends et donner la preuve de leur attachement au processus de paix. Dans cette optique, il est crucial que la communauté internationale (l’équipe de médiation comprise), qui a apporté un soutien résolu à la mise en œuvre de l’accord, redouble d’efforts et use de tout son poids politique pour préserver l’engagement des parties signataires et obtenir des résultats immédiats sur le terrain. En cas d’échec du dialogue, j’invite le Conseil de sécurité à envisager, dans les mois à venir, d’imposer des sanctions ciblées à quiconque entrave la mise en œuvre de l’accord.
64. Je félicite le Gouvernement malien de la tenue de ses premières élections communales depuis 2009, malgré d’importants obstacles politiques, logistiques et de sécurité. Je regrette que le scrutin n’ait pas eu lieu dans les régions de Kidal, Ménaka et Taoudénit, ainsi que dans certaines parties des régions de Gao, Mopti et Tombouctou, en raison d’atteintes à la sécurité et d’actes d’entrave au vote, notamment dans des zones contrôlées par des groupes armés signataires. J’ai pris note des objections formulées par des partis de l’opposition et les groupes armés signataires. Toutes les parties prenantes doivent s’efforcer d’aplanir leurs divergences et de trouver un terrain d’entente. Seule une démarche interactive, constructive et sans exclusive permettra de parvenir à un consensus. Tandis que le peuple malien se prépare à des élections régionales et au niveau des districts ainsi qu’à un référendum constitutionnel en 2017, j’encourage vivement le Gouvernement à mener avec les parties prenantes un dialogue actif à même de donner lieu à un véritable consensus. L’Organisation est prête à continuer d’appuyer cet effort.
65. Les faibles progrès accomplis dans la mise en place des dispositions de l’accord relatives à la sécurité ont propagé l’insécurité de l’extrême nord au centre du Mali, les groupes terroristes et extrémistes violents y ayant renforcé leurs activités et leur présence. La hausse de l’insécurité dans les zones frontalières avec le Burkina Faso et le Niger, ainsi que les effets persistants du trafic de drogues sur les efforts de paix, démontrent, une fois de plus, la nécessité d’améliorer la coopération régionale face aux menaces qui pèsent sur la sécurité. Afin d’enrayer cette spirale de violence, je demande instamment au Gouvernement malien de redoubler d’efforts pour redéployer progressivement ses forces de défense et de sécurité et rétablir son autorité dans tout le pays. Les parties maliennes doivent absolument accélérer l’application des dispositions de l’accord relatives à la sécurité pour aider la population à retrouver la confiance dans le processus de paix et pour juguler la montée de l’extrémisme violent. J’encourage également les États Membres de la sous-région à intensifier leurs efforts pour régler les problèmes politiques et de sécurité du Mali par la médiation et une participation active aux mécanismes de suivi de l’accord. Étant donné la multiplicité des initiatives régionales, il importe que les États Membres coordonnent leur action, notamment dans la lutte contre le trafic de drogues aux côtés de l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime et dans le cadre de la Stratégie intégrée des Nations Unies pour le Sahel. L’ONU demeure déterminée à collaborer avec les mécanismes régionaux, notamment le Groupe de cinq pays du Sahel et le Processus de Nouakchott relatif au renforcement de la coopération en matière de sécurité et à l’opérationnalisation de l’Architecture africaine de paix et de sécurité dans la région sahélo-saharienne.
66. Je condamne énergiquement les attaques continues menées par les extrémistes violents et les terroristes contre les civils, les groupes armés signataires, les forces maliennes et françaises et le personnel de la MINUSMA, qui demeurent la cible d’opérations asymétriques. Je réitère que ces attaques dirigées contre les forces de maintien de la paix des Nations Unies constituent des crimes de guerre en droit international et je demande que leurs auteurs soient traduits en justice. Je tiens à exprimer mes plus sincères condoléances aux familles endeuillées et aux gouvernements concernés ainsi qu’au peuple et au Gouvernement maliens, qui continuent de subir des pertes.
67. La précarité des conditions de sécurité rend d’autant plus pertinentes les mesures provisoires énoncées dans l’accord de paix et atteste de l’urgence qu’il y a à les mettre en œuvre. J’exhorte le Gouvernement à prendre l’initiative politique de rassembler toutes les parties pour véritablement mettre en place les autorités intérimaires et établir le mécanisme opérationnel de coordination afin d’aider les groupes armés signataires à faire avancer le processus de cantonnement. Je me félicite de la récente nomination par le Gouvernement des membres des autorités intérimaires et des conseils transitoires ainsi que des conseillers spéciaux pour les régions septentrionales. J’engage les groupes armés signataires à se montrer constructifs pour régler les points en suspens afin de faire sortir de l’impasse la question des patrouilles mixtes.
68. L’ONU demeure prête à aider les parties signataires à mettre en œuvre l’accord de paix de manière pleine et effective, notamment grâce aux critères de suivi définis par le Gouvernement avec le concours de la MINUSMA. Je compte sur le Gouvernement pour veiller avec autorité à ce que les autres parties signataires s’approprient ces critères, ce qui donnera au processus un nouvel élan en vue d ’une mise en œuvre rapide et généralisée de l’accord. Toutes les parties doivent être mises à contribution. J’encourage les parties signataires à assumer à nouveau leur importante responsabilité et à s’employer activement à respecter ces critères dans les meilleurs délais.
69. Je regrette profondément qu’aucune femme n’ait été nommée au sein des autorités intérimaires, qu’une seule siège à un conseil transitoire et que deux seulement aient été nommées conseillères spéciales des représentants de l’État dans les régions septentrionales. Je constate en outre avec préoccupation que les femmes et les jeunes sont exclus de la mise en œuvre de l’accord. Or, tant les femmes que les jeunes maliens ont participé activement au processus de paix, notamment en tant que médiateurs au niveau local et membres des groupes de défense civile, pour protéger leur communauté des attaques armées. Leur responsabilisation et leur participation sont essentiels pour faire aboutir le processus de paix, prévenir les conflits et instaurer une paix durable. C’est pourquoi je prie instamment toutes les parties prenantes maliennes d’encourager plus activement les jeunes et les femmes à participer à tous les aspects de la mise en œuvre de l’accord, y compris les préparatifs de la conférence de réconciliation nationale, et à y jouer un rôle de premier plan. Je félicite les candidates qui, en se présentant aux élections locales du 20 novembre, ont traduit dans les faits la nouvelle loi en faveur de l’égalité des sexes, qui instaure un quota de 30 % de femmes sur les listes électorales. Je me félicite de ce que 30 % des élus de Bamako et de la région de Gao soient des femmes.
70. Les mesures provisoires doivent reposer sur des bases solides propres à mener le Mali sur le chemin de la paix et de la stabilité à long terme. J’appelle le Gouvernement à accélérer l’élaboration d’une stratégie nationale de réforme du secteur de la sécurité et la définition des critères d’intégration sur la base desquels les membres des groupes armés signataires pourraient rejoindre les institutions chargées de la sécurité. Le Gouvernement doit absolument préciser ses intentions en ce qui concerne la réforme du secteur de la sécurité pour que les groupes armés signataires demeurent attachés au processus de paix. Je me félicite des progrès accomplis dans la révision de la Constitution, dont j’attends l’aboutissement avec intérêt. La conférence de réconciliation nationale à venir sera une occasion cruciale de trouver des solutions politiques dans le cadre d’un large débat sur les facteurs du conflit et de fédérer tous les Maliens sans exception autour du processus de paix. J’encourage vivement le Gouvernement à permettre une véritable réconciliation englobant toutes les strates de la société. Pour ce faire, il demeure indispensable de remédier aux causes profondes du conflit. 71. La situation des droits de l’homme demeure préoccupante. Je condamne vivement les atteintes et les violations des droits de l’homme commises entre autres par les acteurs étatiques, les groupes armés et les groupes extrémistes. Je demande instamment à toutes les parties concernées de respecter le droit international des droits de l’homme et le droit international humanitaire, ainsi que les obligations qui leur incombent en vertu de l’accord de paix. Je me félicite de la réouverture de plusieurs bureaux régionaux de la Commission vérité, justice et réconciliation, tout en constatant avec regret les faibles progrès accomplis par le Gouvernement dans la lutte contre l’impunité. J’encourage le Gouvernement à mettre en service au plus vite les bureaux régionaux restants, notamment à Kidal, et à y dépêcher des fonctionnaires afin qu’ils puissent rencontrer les victimes. L’ONU se tient prête à contribuer aux travaux de la Commission ainsi qu’à l’établissement d’une commission internationale d’enquête.
72. Je demeure préoccupé par l’insuffisance des services sociaux de base dans le nord et le centre du Mali, où les besoins humanitaires sont pourtant chroniques. Je déplore le blocage des approvisionnements consécutif au déclenchement des hostilités entre le CMA et la Plateforme, qui a aggravé la situation humanitaire à Kidal. J’exhorte les parties signataires à régler leurs différends dans le cadre de l’accord et à ne pas les utiliser pour prendre les civils en otage. Il reste de moins en moins de temps au Gouvernement pour distribuer au peuple malien les dividendes de la paix, l’accord n’ayant pas encore apporté les bienfaits sociaux et économiques escomptés. J’encourage vivement le Gouvernement à poursuivre son action pour élargir la couverture des services sociaux de base dans les régions du nord et du centre afin que les populations touchées par le conflit bénéficient des dividendes de la paix. Il est essentiel d’améliorer la prestation des services dans les zones reculées et d’atteindre les personnes marginalisées pour éviter que certaines communautés ne se retrouvent laissées pour compte. J’engage le Gouvernement à appliquer la stratégie de développement pour le nord, dont la version définitive aurait dû être achevée à la suite de la Conférence internationale pour la relance économique et le développement du Mali, tenue en octobre 2015. En outre, j’appelle à nouveau le Gouvernement à progresser au chapitre du fonds de développement durable, auquel il avait annoncé une contribution de 450 millions d’euros pour la période 2016- 2018.
73. La MINUSMA continue de travailler dans un environnement extrêmement difficile, sous la menace permanente d’attaques asymétriques violentes. Dans le contexte politique et de sécurité actuel, marqué par les menaces, le trafic de drogues et le terrorisme, elle va probablement continuer de se heurter à d’importants obstacles opérationnels. Par conséquent, elle utilise une grande partie de ses ressources pour se protéger et maintenir sa présence. J’encourage tous les pays fournisseurs de contingents ou de personnel de police et tous les donateurs bilatéraux à redoubler d’efforts pour fournir à la Mission le matériel et les ressources dont elle a besoin, notamment les unités d’hélicoptères qui sont nécessaires d’urgence, mais aussi une compagnie de renseignement, de surveillance et de reconnaissance, des groupes d’appui aéroportuaire, une compagnie de forces spéciales, une compagnie de neutralisation des explosifs et munitions, un bataillon spécialisé en convois de combat, des policiers hors unités constituées, des véhicules blindés de transport de troupes et des véhicules de police blindés individuels. Je prie instamment le Conseil de sécurité de travailler activement avec les États Membres à cette fin. La diminution de la mobilité et de la capacité de procéder à des évacuations sanitaires primaires et secondaires découlant de l’absence des unités d’hélicoptères et autres moyens aériens endommagés lors d’attaques aura un effet négatif sur l’efficacité opérationnelle de la Mission.
74. Enfin, je tiens à nouveau à exprimer ma gratitude à mon Représentant spécial, Mahamat Saleh Annadif, pour les efforts inlassables qu’il déploie afin de faire avancer le processus de paix. Je rends hommage aux femmes et aux hommes de la MINUSMA et aux pays fournisseurs de contingents ou de personnel de police, que je remercie du dévouement dont ils font preuve dans des lieux d’affectation et des conditions difficiles. Je félicite les membres de l’équipe de médiation internationale de l’appui indéfectible qu’ils apportent aux parties maliennes. J’exprime ma reconnaissance à l’Union africaine, à la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest, à l’Union européenne, aux partenaires bilatéraux, aux organismes, fonds et programmes des Nations Unies, y compris le Fonds pour la consolidation de la paix, aux organisations non gouvernementales et à tous les autres partenaires qui n’épargnent aucun effort pour contribuer à la paix et à la stabilité au Mali.

 

Source: info-matin

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