Pour la suite des choses, ce serait plutôt une lapalissade que de dire que les fruits n’ont été à la promesse des fleurs. Toute chose qui a largement contribué à rendre délétère la situation naguère précaire du pays. Pour ne pas dire que les choses ont commencé à aller de mal en pis avec un relent de défiance d’un côté, entre les différentes organisations de la société civile malienne et de l’autre côté, entre les acteurs politiques et ceux militaires. L’Imam Mahmoud Dicko aurait-il eu mauvaise conscience qu’il a été le principal acteur ayant conduit le pays dans cette situation incertaine ? En tout cas, le jeudi 4 février 2021, il a publié un document sous l’appellation de ‘’Manifeste pour la Refondation’’ et dans lequel il s’engage, après avoir fait une espèce de mea-culpa, à bâtir des passerelles entre acteurs civils et armés. En considération de cet acte sur fond de regret de la part de son auteur et eu égard aussi au style rhétorique de ce manifeste, nombreux sont les observateurs avertis de la scène politique malienne qui soutiennent que Mahmoud Dicko tente plutôt de se racheter auprès du peuple.
Dans son manifeste, le guide religieux écrit : « Mon esprit est tourmenté par le sort du Mali et de mes concitoyens. Les sources d’inquiétude s’amoncellent, mon âme affectée finit par déchirer mon cœur. Je ressens une tristesse infinie à la lumière de l’Islam, religion de paix, de tolérance et expression d’une existence hors de modèles imposés par autrui…. C’est aussi avec gravité que j’observe les risques d’échec du combat de ce noble peuple épris de paix et de justice pour une gouvernance vertueuse. Les gouvernants doivent vivre avec l’obsession de l’intérêt général, de la lutte contre l’impunité et l’intolérance, en faveur de l’égalité face à la loi et dans l’accès des services publics. Nul être non plus n’est parfait. Je me suis souvent trompé en soutenant des hommes qui, guidés par des intérêts égoïstes et matérialistes, n’ont pas su incarner le redressement du Mali tant souhaité. J’ai cru, comme en 2013, qu’une participation forte à un projet électoral pourrait, à elle seule, porter l’espoir de résolution de nos problèmes de gouvernance politique et sociale. Je me suis trompé. Je le regrette sincèrement… ».
N’est-ce pas là une espèce de mea culpa de la part de l’Imam Dicko ? Bien sûr que oui. Mais qu’à cela ne tienne, il n’abdique, pour autant, pas et envisage plutôt de changer son fusil d’épaule et de s’investir dorénavant sur le chantier de la réconciliation nationale, dénudé de toute prétention politique.
A cet effet, l’Imam Dicko promet dans son manifeste : « Je veux porter ici la voix d’un nouvel élan d’émancipation, d’une urgence à agir, à penser haut et vrai, devant l’histoire pour de nouveaux horizons, avec l’espoir que le génie malien entend l’écho de cette voix et élèvera à mes côtés, en pèlerin, notre destinée…. Depuis le 18 août 2020, j’ai laissé ma porte grande ouverte. J’ai inlassablement écouté et observé, mais la situation me paraît trop grave pour que je garde le silence. Si nous ne réagissons pas maintenant, activement et collectivement, l’État qui nous gouverne n’a plus de sens. Il faut sauver le pays. Nous devons agir sans relâche avec les forces vives de la Nation pour la restauration de l’autorité de l’Etat… Pour ce faire, je m’engage, librement, à me rendre partout où je peux être utile, là où nos citoyens se sentent abandonnés. Je m’engage à favoriser le dialogue entre tous pour nous réconcilier. Je m’engage à bâtir des passerelles d’échange entre les acteurs civils et armés, pour remettre au cœur des préoccupations, le vivre ensemble et la confiance entre les communautés. Je m’engage à aller à la rencontre de nos frères et sœurs pour porter la paix dans toutes les régions en fédérant toutes les énergies confessionnelles. Je m’engage à soutenir toute initiative en faveur du développement en faveur de notre jeunesse. Je m’engage à contribuer à la construction d’un nouveau pacte républicain entre tous les acteurs maliens. Il s’agit là d’un appel à un élan de croyance en l’avenir. C’est le chemin que je veux emprunter dorénavant. Je ne souhaite aucun projet de société autre que celui que les maliens veulent pour eux-mêmes. Je suis à vos côtés. « Il ne s’agit pas seulement de parler de paix, il faut y croire ».
El Hadj Mamadou GABA
Source: Le Soir de Bamako