Outre le renforcement des réformes structurelles, la revue a constaté l’amélioration de la performance de l’administration fiscale et de la gestion des finances publiques au terme du 1er trimestre 2015
Au terme d’une mission du FMI qui vient de s’achever dans notre pays, le chef de délégation du Fonds pour le Mali, Christian Jozs et le ministre de l’Economie et des Finances Mamadou Igor Diarra ont conjointement animé, vendredi dernier, une conférence de presse au ministère des Finances en présence du directeur adjoint du Département Afrique du FMI et des représentants de l’institution au Mali.
D’entrée de jeu, le ministre Diarra a expliqué qu’il a conduit une délégation à Washington du 24 mars au 7 avril 2015, dans le cadre de la troisième revue du programme économique du Mali, appuyé par la Facilité élargie de crédit (FEC) du FMI. Les entretiens se sont ensuite poursuivis à Bamako le 11 avril 2015 en marge de la réunion de la Zone Franc et à Washington du 12 au 20 avril 2015, en marge des réunions du printemps de la Banque mondiale et du Fonds.
Faisant le point de la situation économique, il a indiqué qu’en 2014, notre économie a enregistré une reprise avec un taux de croissance de 7,2% grâce à la bonne campagne agricole et au rebond du secteur secondaire. Les projections pour 2015, quant à elles, prévoient une croissance de 5% avec un taux d’inflation de 1,7% se situant en dessous de la norme de l’UEMOA.
S’agissant de la performance du programme, il a affirmé que la moitié des critères de réalisation et des indicateurs en fin décembre 2014, a été respectée. Mais le gouvernement demandera une dérogation au conseil d’administration du Fonds pour les critères non atteints, relatifs au plancher des recettes brutes et au plafond sur le financement intérieur net, a-t-il précisé. En outre, deux mesures sur trois faisant l’objet de repère structurel ont été mises en œuvre et le repère non réalisé a été reporté de quelques mois. Outre le renforcement des réformes structurelles, la revue a constaté l’amélioration de la performance de l’administration fiscale et de la gestion des finances publiques au terme du 1er trimestre 2015, a-t-il fait remarquer. Elle a entre autres permis d’intégrer de nouvelles mesures budgétaires dans un projet de budget rectificatif qui sera soumis à l’Assemblée nationale avant la fin du mois de mai 2015.
Budget rectificatif. Ce budget rectificatif fait ressortir une augmentation des ressources de 144 milliards de Fcfa, composées de recettes fiscales de 53 milliards de Fcfa et de dons budgétaires de 81 milliards de Fcfa dont 43 milliards au titre de l’annulation de la dette monétaire de la France, a-t-il indiqué. En plus, de nouvelles dépenses d’un montant de 164 milliards de Fcfa ont été intégrées et portent notamment sur la loi d’orientation et de programmation militaire, l’incidence des accords d’Alger pour la paix dans le Nord du Mali, et la mise en œuvre des engagements pris par le gouvernement avec les partenaires sociaux. Ces modifications porteront le solde budgétaire de base de -59 milliards de Fcfa, soit -0,9% du PIB contre un solde en équilibre dans la loi de Finances initiale approuvée en décembre 2014. Le déficit sera financé par l’appui des bailleurs de fonds et le recours au marché financier régional, a indiqué le ministre Diarra.
Il faut noter aussi qu’à la requête du Mali, le FMI est d’accord pour apporter diverses assistances techniques, destinées au renforcement des ressources humaines des impôts en matière de contrôle de la TVA des sociétés minières, au recrutement d’un expert long terme ayant un profil informatique pour appuyer l’informatisation des systèmes comptables au Trésor, à l’optimisation de l’approvisionnement en produits pétroliers et tarification pétrolière ainsi qu’à la mobilisation de ressources propres des collectivités territoriales (fiscalité locale, etc…) dans le cadre de la décentralisation.
Pour terminer, le responsable des Finances a remercié les autorités du Fonds pour leur appui constant à notre pays, leur capacité d’écoute, leur sens du professionnalisme et l’esprit franc et productif qui a animé les différents entretiens.
Les questions des journalistes ont porté essentiellement sur les mesures prises en vue du changement tant attendu dans la gestion des affaires publiques, les sanctions, la base de la relance de l’économie, l’augmentation du prix de l’électricité.
En termes de changement, Mamadou Igor Diarra a répondu que les problèmes du pays sont bien diagnostiqués et connus. Il reste à développer, en particulier, le capital humain c’est-à-dire les capacités des hommes et des femmes qui peuvent relever les défis auxquels nous sommes confrontés. Il a également mis l’accent sur le fait que depuis son arrivée aux affaires, son département a pris de nombreuses initiatives y compris le changement d’équipes au niveau de ses différentes structures. « Ce qui ne veut pas dire, pour autant, que ceux qui étaient aux commandes ont démérité », a t-il ajouté. Au nombre des initiatives figurent également le paiement de 200 milliards de Fcfa d’arriérés au titre de la dette intérieure, les communications internes du ministère sur la nouvelle approche qui selon lui doit prévaloir à savoir : la prise de conscience, la culture du résultat et de la suppression de l’impunité. Pour le ministre Diarra, « en matière de développement, nous devons d’abord compter sur nos propres forces même si nous bénéficions de l’appui des partenaires techniques et financiers ».
Par rapport aux sanctions, il dira que « les audits ont été faits, les mesures correctives ont été prises. Le gouvernement assure la continuité, mais dans un Etat de droit la justice doit faire son travail en toute indépendance ».
AMéNAGEMENT DES ESPACES CULTIVABLES. La base de la relance de notre économie est l’agriculture. Raison pour laquelle d’ailleurs, le budget 2015 rectifié met l’accent sur les efforts en faveur du secteur, a-t-il souligné. Non seulement le gouvernement va poursuivre le renforcement des interventions dans le domaine des semences et des intrants, mais aussi va contribuer au renforcement de l’équipement des agriculteurs au cours des deux prochaines campagnes et à l’aménagement des espaces cultivables. Il s’agit aussi de créer les conditions pour améliorer l’exploitation minière, favoriser le climat des affaires, faire en sorte que les talents émergent et attirer les investissements nationaux et internationaux, a-t-il ajouté
Pour ce qui est des erreurs passées, il a estimé qu’une série de procédures a été engagée et il s’agit, aujourd’hui, de nous tourner vers l’avenir. « La plupart des recommandations du Fonds ont été mises en œuvre avec l’adoption d’un nouveau décret qui couvre les secrets défenses et les achats essentiels de l’Etat, la régularisation de l’avion présidentiel, l’annulation de toute une série de contrats militaires qui n’étaient pas pris en compte dans le budget. Les recommandations non mises en œuvre, elles, sont en cours de l’être ». Le ministre de l’Economie et des Finances a saisi l’opportunité pour rappeler que la bonne gestion doit être l’affaire de tous avant de lancer un appel à « ceux qui vont s’aventurer à contracter des dettes à des conditions ne respectant pas la réglementation au niveau de l’administration car s’exposant désormais au non paiement ».
Quant à l’augmentation du prix de l’électricité, il a affirmé que, pour le moment, la question n’est pas à l’ordre du jour, en particulier, en ce qui concerne les couches les plus défavorisées
Le directeur adjoint du département Afrique, lui, s’est particulièrement réjoui du bon déroulement des discussions qui témoignent des efforts importants déployés par nos autorités pour renforcer la gestion des finances publiques et la qualité de la dépense. Les résultats encourageants au 1er trimestre montrent une nette progression, a t-il fait remarquer.
Le chef de mission, Christian Jozs, de son côté, a évoqué la situation économique du Mali et les prévisions sur lesquelles le programme est basé, la performance du pays à l’égard des critères et objectifs fixés en fin décembre 2014 et fin mars 2015 avant d’expliquer les mesures les plus importantes du programme.
Christian Josz a souligné que le contenu du programme en 2015, est basé sur la loi de Finances rectificative qui est ambitieuse en termes de recettes fiscales. « L’économie a connu la reprise à travers une croissance bien répartie, en 2014, dans les différents secteurs, et l’Etat a fait d’importants efforts au premier trimestre 2015 pour assurer une application stricte du respect des règles budgétaires et de passations des marchés. On note aussi une nouvelle dynamique au niveau des recettes douanières. Pour les critères qui n’ont pas été respectés, la mission a discuté avec le Mali de mesures correctrices afin qu’on puisse justifier une dérogation auprès du CA du Fonds.
Le gouvernement va ainsi adopter la loi de finance rectificative avant le CA (c’est à dire d’ici fin mai 2015), une loi ambitieuse, mais raisonnablement ambitieuse en termes de recettes et de déficit et qui représente une base solide pour aller de l’avant », a t-il estimé. Concernant les recettes fiscales, il a indiqué qu’en 2014, elles ont progressé de 0,2% du PIB. En 2013, elles étaient de 14,7% du PIB et en 2014, de 14,9%, affichant une progression par rapport à la taille de l’économie, mais inférieure aux prévisions parce que le programme vise, chaque année, une progression minimale de 0,5% du PIB. Pour 2015, les prévisions en recettes fiscales sont de 1,8% du PIB : un objectif ambitieux mais réalisable, selon le chef de
mission.
En termes de déficit, il a mis l’accent sur le fait que le déficit en 2015 est fixé à 3,2% (raisonnable) alors que le déficit total est plus élevé et se situe à 5% en raison du fait qu’en 2015, il y a lieu de payer des dépenses importantes de 2014, des arriérés importants aux fournisseurs de l’Etat datant des années 2012 et 2013.
La mission s’est réjouie des résultats de la revue et a estimé que le programme économique du Mali est sur la bonne voie.
F. MAïGA
source : L Essor