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Mali – Soumaïla Cissé : « Nous verrons si je suis l’homme de 2018 »

Député, président de l’Union pour la République et la démocratie (URD), Soumaïla Cissé s’est incliné face à IBK au second tour de la présidentielle de 2013, avec 22,4 % des suffrages. Interview.

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Au mois de décembre suivant, à l’issue des législatives, son parti, l’URD, s’est hissé au rang de première force d’opposition avec 17 députés sur 147, contre 66 pour le RPM et 16 pour l’Alliance pour la démocratie au Mali (Adema). Il est donc devenu le chef de file de l’opposition, un statut créé par la loi du 4 mars 2015. À 66 ans, le député de Niafunké (sa ville natale, dans la région de Tombouctou) compte sur ce leadership pour s’imposer en 2018.

Et sur son expérience : il a été ministre des Finances entre 1993 et 2000, puis de l’Équipement entre 2000 et 2002, et a présidé la commission de l’Union économique et monétaire ouest-africaine de 2004 à 2011. Il nous a reçus dans sa résidence bamakoise de Badalabougou, dépourvue de groupe électrogène, pour un entretien haché par les coupures d’électricité.

Jeune Afrique : À mi-mandat, quel bilan faites-vous de l’action d’IBK ?

Soumaïla Cissé : Les choses n’ont pas bougé. Le président a été élu avec pour principal objectif de ramener la paix. L’accord d’Alger a été signé il y a plus d’un an, mais l’insécurité a explosé, et l’État a perdu pied dans le Nord – le gouverneur de Kidal vit à Gao, il n’y a plus d’éducation, plus de santé, plus d’administration. Je ne vois donc pas comment il pourrait organiser des élections sur tout le territoire.

Cette situation est porteuse de divisions et de mécontentements, de même que les problèmes quotidiens d’électricité, d’eau, de coût de la vie, etc. Le climat social est devenu délétère. Le plus grave, c’est que le président n’a pas été capable de donner un cap.

Cet état des lieux n’est-il pas exagérément sombre ?

J’ai parcouru le pays et fait ce constat dans beaucoup d’endroits. Dans le cercle de Goundam [région de Tombouctou], le préfet n’avait même pas de voiture alors que ce territoire est plus grand que le Sénégal. À Diré [40 km au sud de Goundam], les policiers n’ont pas même un gourdin ! Nous avons voté une loi de programmation militaire, mais on se demande où sont passés les équipements et les armes…

Aucune condition n’est remplie pour que le Mali puisse sérieusement envisager l’émergence

N’y a-t-il pas des raisons d’être optimiste alors que l’on attend un taux de croissance supérieur à 5 % ?

Quand on vient de très bas, on ne peut que monter ! En réalité, à cause du manque de sécurité, les investissements sont atones et des secteurs entiers ne fonctionnent plus parce que l’on ne peut plus aller dans certaines zones. En outre, notre économie, essentiellement fondée sur l’agriculture, est trop dépendante du facteur climatique et de la pluie. Nous vivons au jour le jour, et aucune condition n’est remplie pour que l’on puisse sérieusement envisager l’émergence. Il faudrait commencer par avoir une bonne gouvernance…

Avec quelles priorités ?

D’abord l’électricité ! Vous avez vu les nombreuses coupures qui ont interrompu cet entretien. La solution est d’ouvrir le secteur à la concurrence pour permettre à des investisseurs étrangers de venir. Ensuite, il faut développer les filières de production : nous avons du coton, mais il faut aller plus loin, transformer, fabriquer des tissus, etc. On peut aussi améliorer la production de riz, l’élevage, sans parler des filières minières.

Enfin, il faut soutenir les entrepreneurs maliens en simplifiant les procédures d’agrément et libérer l’initiative… En deux ans et demi, aucun gouvernement n’a organisé de réunion avec le secteur privé. IBK a été élu président du « moment sécuritaire », et, malheureusement, l’attente n’a pas été comblée. La prochaine présidentielle, en 2018, sera le « moment de la relance économique ». Nous verrons si je serai l’homme de ce moment-là.

Par jeuneafrique.com Publié le 02 septembre 2016 à 15h37

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