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Mali : Mah Damba, dans la tradition et au-delà

Fille du légendaire griot (djeli) malien Baba Sissoko, Mah Damba revient avec Hakili Kélé, un nouvel opus arrangé et réalisé par Thierry Fournel. Au fil de ces onze titres, celle qui fut la femme et la partenaire du joueur de ngoni Mamaye Kouyaté décédé il y a tout juste 10 ans, continue de faire preuve d’un singulier d’un esprit d’ouverture et d’un goût prononcé pour les rencontres musicales.

 

Bon sang ne saurait mentir. Si la sentence peut paraître expéditive, elle prend tout son sens dans le cas de Mah Damba. La chanteuse est née à Bamako au Mali dans la caste des griots, ces poètes et musiciens qui conservent de génération en génération, l’histoire des familles auxquelles ils sont attachés. Son père, le vénéré Baba Sissoko, fut le chef ultime des djelis du Mali.

Initiée très tôt au chant par sa tante paternelle, la djelimousso Fanta Damba, Mah gagne ses galons de chanteuse, de griote, d’interprète des épopées du mandingue. Sa rencontre en 1979 avec le joueur de ngoni (petit luth à 4 cordes) Mamaye Kouyaté et son mariage l’année suivante, donnent naissance à un duo très apprécié au pays et plus largement dans l’Afrique de l’Ouest, ainsi qu’à un premier enfant en 1981.

Appelé à se produire à Paris dans les fêtes des membres de la communauté malienne, Mamaye Kouyaté s’installe dans la capitale française en 1982. Mah Damba le rejoint l’année suivante. Ensemble, ils accompagnent les grands moments de la vie (naissance, circoncision, mariage…) des Maliens d’Île de France.

Si la chanteuse a du mal à se faire à la vie parisienne, et parle souvent de retour au pays, elle trouve dans son art pratiqué en couple, un lien fort avec son pays et une ouverture sur le monde qui l’entoure. « Notre tout premier concert hors de la communauté a eu lieu à Lille, au Macumba » se souvient-elle, avant d’ajouter que tous ces moments sur scène lui ont donné l’envie de l’élargir son univers musical, de l’enrichir de sonorités extérieures : « Il n’y a pas de frontière en musique. Si ma voix me permet de jouer avec d’autres, je dois y aller, je dois avancer sur ce chemin » lâche celle dont le grand-père jouait de l’accordéon.

Le statut de griot

Ce qui semble limpide à l’écouter parler aujourd’hui ne l’a pas toujours été comme se souvient Philippe Conrath. Le journaliste devenu organisateur d’Africolor, un des principaux festivals de musiques africaines en France et directeur du label Cobalt, avant de passer la main et de se retirer sur l’Île de la Réunion, avait construit dans les années 1990 une de ses soirées au Théâtre Gérard-Philippe de Saint-Denis, dans les environs de Paris, autour de Baba Sissoko et de sa fille : « Quand le concert a commencé, Mah n’était pas là. Son père était sur scène, chantant, racontant des histoires, des légendes comme il savait si bien le faire. Elle est arrivée avec 45 min de retard, et est montée avec ses musiciens directement sur scène. Mah Damba n’avait pas su dire non et avait accepté de chanter dans un baptême pour une famille malienne. Son statut de griot avait pris le pas sur son engagement, sur le temps du concert, explique-t-il. Pendant longtemps, jusqu’à ce qu’elle accepte de conjuguer les deux fonctions, on n’a plus travaillé ensemble. D’ailleurs, c’est quelque chose qui nous a beaucoup occupé dans les années 1990 : comment aller au-delà de la tradition ? » précise-t-il plus de 20 ans après.

« Même au Mali, le son évolue… » 

En 2007, elle collabore avec les chorales et l’orchestre des Metallos, qui regroupent jusqu’à une centaine de choristes et musiciens, partageant avec eux son répertoire chanté en bambara. Quand en 2009, son compagnon vient à disparaître des suites d’une maladie, elle reste à Paris avec ses deux filles Sira et Woridio, et son fils Guimba.

Quelques mois plus tard, elle enregistre À l’Ombre du Grand Baobab, un album nourri par son désir de rencontres artistiques : « C’est quelque chose que j’ai en moi. Même au Mali, le son évolue » précise la chanteuse quelque peu attristée pour le moins par les dernières évolutions de son pays : « On n’est pas né dans ça. Il faut qu’on arrête ça. » Dambe, l’un de ses titres dénonce les méfaits de la guerre « Ça ne fait pas partie de notre culture » conclut-elle.

SOURCE : RFI

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