L’armée malienne a qualifié, samedi 2 avril, de « combattants de groupes terroristes » les 203 personnes qu’elle a neutralisées dans le centre du pays alors que certaines organisations et médias internationaux affirment le contraire. Plus de 200 jihadistes tués et une cinquantaine d’interpellations. Le bilan officiel de l’opération des Forces armées maliennes (FAMa), menée du 23 au 31 mars dans le village de Moura (centre), a de quoi renforcer le discours sur leur montée en puissance sur le terrain jihadiste. Toutefois, cette action antiterroriste fait aussi l’objet de très nombreuses allégations de violences commises par les soldats maliens contre des civils.
La semaine dernière, des images de cadavres baignant dans leur sang ont défilé sur les réseaux sociaux. D’autres montraient des hommes avec des armes enterrant leurs proches. Mais il est difficile de dire que ces morts sont de Moura, même si c’est une localité qui subit depuis plusieurs années le joug des jihadistes de la katiba Macina du Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (GSIM). Selon certaines sources, ils viennent régulièrement effectuer des prêches et se ravitailler.
Toutefois, RFI affirme qu’à ce stade, « on ne parle plus d’exactions, c’est un massacre » qui a été effectué par les FAMa dans ce village. Le média français cite notamment une source qui juge l’opération militaire malienne disproportionnée et indiscriminée.
Human Rights Watch dénonce de son côté « le massacre de plus de 300 personnes à Moura », se fondant sur plusieurs témoignages. « Ils ont été tués parce qu’ils portaient la barbe et un pantalon court », explique un survivant à l’organisation des droits humains, avant de préciser que les habitants y étaient obligés.
Mariko, Minusma, enquête…
A Bamako, l’opposant Oumar Mariko est, depuis le week-end dernier, dans le collimateur de la justice après avoir accusé l’armée d’« assassiner des gens » à Moura. Après ses propos très critiques, sa maison a été encerclée par des hommes armés tandis qu’il ne s’y trouvait pas.
Toutefois, l’armée dit avoir mené cette « opération d’opportunité aéroterrestre de grande envergure » à Moura « suite à des renseignements bien précis » sur « une rencontre entre différentes katibas ». C’est ainsi qu’elle a procédé à un « nettoyage systématique de la zone ».
Toutefois, l’armée malienne a rappelé dans son communiqué que le respect des droits de l’homme et le droit international humanitaire restaient une priorité dans la conduite de ses opérations antijihadistes. « Ceci s’explique par d’énormes efforts de sensibilisation et de formation sur les différents modules, de même que l’ouverture d’enquêtes à chaque fois que des allégations sont portées contre les FAMa », a-t-elle assuré.
Mais pour éclairer la lanterne de tout le monde sur les allégations d’exactions sur des civils, la Mission des Nations unies au Mali (Minusma) souhaite mener une enquête. « Tout est planifié, nous n’attendons plus que l’accord des autorités », selon la Minusma, qui veut par son action établir les faits et répondre à toutes ces questions.
Source : APA