Le génial créateur Mady Doucanssy vit un paradoxe. Ses modèles sont connus au Mali et en France où il réside. Peu de gens, portent ces dernières créations sans le connaître. Depuis 2013, il a entrepris de broder le bazin autrement. Ces œuvres traduisent des figures géométriques, parfois des fleurs. Ces dessins sont brodés, ou découpés dans d’autres tissus et cousus sur les robes, les chemises, les pantalons et les jupes bazin.
Le label Doucanssy se distingue par les caractéristiques suivantes: les couleurs chez les hommes et « les près du corps » ou moulant. Il utilise parfois du kaftan, tissu qui vient des pays arabes. Il prend avec philosophie ce paradoxe.
En effet, il s’est rendu compte que nombre de tailleurs reprennent ses modèles sur les réseaux sociaux, et dans des journaux. Pour se faire connaître il a pris part au Festival du bazin de la mi-octobre à Bamako. Il a pu défilé et présenté sa collection 2015 l’aboutissement et la version perfectionnée de plusieurs de ses créations. Ce choix lève le doute sur le vrai auteur de ses modèles.
En faite ce jeune franco-malien de 28 ans ne se limite pas à créer des modèles, il est entrain de mettre en place une vraie marque. C’est pourquoi toutes ses créations portent sa signature « DBN », qui signifie Doubai Noumouké. Il met en avant son origine forgeron dans sa marque. Le Noumoukè est bien connu de la clientèle. Très tôt il s’est lancé dans le commerce des habits et autres produits qu’il allait lui-même chercher jusqu’à Dubaï entre 2004 et 2009.
Le maître des ciseaux est très réputé dans la ville de Paris et ses environs dans le domaine de la vente des bijoux et des vêtements de luxe. Cette notoriété lui a permis d’effectuer de nombreux voyages d’affaires à Dubaï. Son entourage lui a collé le sobriquet de « Dubaï »Et de part ses origines maliennes il fait partie de la caste des forgerons, d’où le surnom « Noumouké ».
Piqué par le virus de la mode et du stylisme, il a emprunté la voie originale de valoriser le bazin. Il prendra des cours en coupe et couture au Centre Maridié Niaré de Bamako entre 2009 et 2012. Il se lance après dans la conception et la couture. Mady Doucanssy est fortement inspiré par les couleurs. Mais il se rend compte que les hommes n’aiment pas les couleurs vives, mais plutôt les couleurs sombres.
Il assène avec conviction son attachement au bazin : « je l’avais dans le sang depuis toujours, car je viens du Mali ; ce tissu charmant est une richesse et une identité culturelle.» Depuis des décennies ce produit est entré dans les mœurs vestimentaires des maliennes. Elles n’attendent pas une occasion particulière pour porter le boubou bazin, Cette étoffe est très répandue dans le pays. Le créateur Doucanssy a grandi dans le monde chatoyant du prestigieux bazin, qui lui a fait un nom dans le monde de la mode africaine. Lorsqu’on pense bazin, cela inspire les belles tenues traditionnelles portées par de grandes personnalités ouest – africaines maliennes et sénégalaises qui font voyager nos créations à travers des confections originales.
Autrefois nos parents avaient une seule manière de porter le bazin. Cette monotonie est torpillée par DBN. Il travaille à réconcilier la jeune génération avec cet héritage. Il souligne l’identité culturelle qu’est le bazin tout en gardant une note de modernité.
Le modéliste DBN, explique-t-il, donne l’occasion à chacun de se sentir unique, spécial et authentique. La technologie est au centre de son activité. Sa clientèle est une génération très poussée sur les réseaux sociaux. Le styliste dans l’air du temps et son équipe restent près de la cible grâce à Facebook, twitter, Instagram.
La mode au Mali souffre d’un mal terrible, « le plagiat ». Lors des balades chez les couturiers et même sur les enseignes au Mali, l’imaginatif tailleur a retrouvé énormément de ses créations dans leurs catalogues sans aucune mention du vrai créateur de ces modèles qu’ils copient sans haute. Le patriote Mady Doucanssy, réalise 80 à 90 % de sa production à Bamako. Il achète le bazin blanc, fait la teinture sur place, conçoit le modèle sur place et commence la couture à Bamako. Il a déjà eu l’occasion de présenter ses créations en Côte d’Ivoire ; au Sénégal. Il séjourne au Mali pour la première fois.
Y. D.
source : Essor