Mardi, le journal The Guardian a cité Agnès Callamard, experte des Nations unies en matière d’exécutions sommaires, affirmant qu’un responsable saoudien l’avait menacée de « s’occuper d’elle » si elle n’était pas maîtrisée à la suite de son enquête sur le meurtre du journaliste.
Les responsables saoudiens n’ont pas répondu à une demande de commentaire. Mme Callamard n’a pas répondu lorsqu’elle a été contactée par Reuters.
« Nous confirmons que les détails de l’article du Guardian concernant la menace visant Agnès Callamard sont exacts », a déclaré Rupert Colville, porte-parole des Nations unies pour les droits de l’homme, dans un courriel adressé à Reuters.
Le bureau des droits de l’homme de l’ONU a informé Mme Callamard de la menace, ainsi que la sécurité et les autorités de l’ONU, a-t-il ajouté.
Mme Callamard a déclaré au Guardian que la menace avait été transmise lors d’une réunion en janvier 2020 entre des responsables saoudiens et de l’ONU à Genève. Elle a déclaré avoir été informée de l’incident par un collègue de l’ONU, selon le journal.
Mme Callamard a dirigé une enquête de l’ONU sur le meurtre de M. Khashoggi en octobre 2018 par des agents saoudiens au consulat du royaume à Istanbul. Elle a publié un rapport en 2019 concluant qu’il existait des « preuves crédibles » que le prince héritier saoudien Mohammed bin Salman et de hauts responsables saoudiens étaient responsables du meurtre du journaliste du Washington Post et résident américain.
Elle a ensuite appelé à des sanctions contre les avoirs et les engagements internationaux du prince Mohammed.
Le prince nie toute implication dans le meurtre, mais a déclaré qu’il en portait la responsabilité ultime car il s’est produit sous sa surveillance.
Selon le Guardian, la menace présumée a été proférée lors d’une réunion entre des diplomates saoudiens basés à Genève, une délégation saoudienne en visite et des fonctionnaires des Nations unies. Après que la partie saoudienne a critiqué le travail de Callamard dans cette affaire, selon le journal, un haut responsable saoudien a déclaré qu’il avait parlé à des personnes prêtes à « s’occuper d’elle ».
« Une menace de mort. C’est ainsi que cela a été compris », a déclaré M. Callamard. « Les gens qui étaient présents, et aussi par la suite, ont fait comprendre à la délégation saoudienne que c’était absolument inapproprié. »
M. Callamard a critiqué la décision prise en septembre par un tribunal saoudien de condamner huit personnes à des peines allant jusqu’à 20 ans de prison pour ce meurtre, accusant le royaume de se moquer de la justice en ne punissant pas d’autres hauts responsables.
L’administration du président américain Joe Biden, qui a adopté une position plus stricte à l’égard des droits de l’homme en Arabie saoudite, a publié le mois dernier un rapport des services de renseignement indiquant que le prince Mohammed avait approuvé une opération visant à capturer ou à tuer M. Khashoggi.
Le gouvernement saoudien a rejeté ces conclusions et réaffirmé que le meurtre était un crime odieux commis par un groupe de voyous.
M. Callamard, dont le remplacement a été annoncé mercredi, occupe un nouveau poste de secrétaire général d’Amnesty International.
Reuters, 23 mars 2021