Le quartier de Yirimadio, en commune VI du district de Bamako, a vibré ce lundi 26 août 2019, sous les festivités d’un évènement. À quelques jours du délibéré final de la justice pour une affaire foncière qui lui était pourtant favorable, maitre Hamadoun Mahamoud Maïga, juriste et avocat international en état, décide de renoncer à son titre foncier de 3 hectares et demi situé à Yirimadio Kadobougouni d’une valeur de près de 100 millions, au profit des occupants illégaux. Il est parvenu à cette décision grâce à l’influence de sa sœur, Mme Sagara Bintou Maiga, coordinatrice nationale des associations des victimes de la répression des évènements de 2012. Beaucoup de distinctions lui ont été discernées pour cet acte honorifique et solidaire.
Après 13 années de tractation devant la justice, maitre Hamadoun Mahamoud Maïga a finalement donné raison à sa conscience, en octroyant gracieusement son domaine (en titre foncier) de 3 hectares et demi à une dizaine de familles qui y sont installées. Au cours de cette cérémonie solennelle, organisée par ses ex –adversaires devant la justice, maitre Maïga a reçu des remerciements incessants, de part et d’autre, sous le témoignage des autorités traditionnelles, religieuses et communales. Tout ça, grâce à la grande considération du social dont il a fait part dans cette affaire foncière.
Sa sœur, Mme Sagara Bintou Maïga, a été, elle aussi, chaleureusement remerciée, grâce aux démarches de bons offices qui ont conduit à cette conclusion.
Dans un discours lu par Souleymane Maïga, au nom de Mme Sagara, il indique que dès la tombée de l’information sur l’arrêt des poursuites judiciaires, ainsi que la décision de maitre Maïga de rétrocéder, à titre onéreux, les lots d’habitation concernés, « tous les chefs de famille présents et la chargée des négociations ont coulé des larmes (…) pour avoir accepté d’abandonner des millions de francs ( près de 100 millions de F CFA) au profit de la fraternité de l’entente et de la paix des cœurs et des esprits, et le temps court mis, pour prendre des grandes décisions ». Selon lui, M. Maïga a accompli, un acte de haute portée patriotique et musulmane. C’est pourquoi d’ailleurs, il a profité de l’occasion pour demander aux autorités présentes, de porter ce message fort, aux plus hautes autorités de l’État, pour que son exemple serve de levier aux populations maliennes et que de tels actes soient multipliés dans un pays où les problèmes fonciers a atteint une proportion inquiétante. Karamoko Dagnoko, plus connu sous le nom de professeur Dagnoko, habite le quartier de Yirimadio depuis 1978. Il est également président de l’association de sauvegarde et la réhabilitation de Yirimadio-Est (ASRY). Il a précisé que Yirimadio se trouve dans ce problème, depuis près d’une vingtaine d’années, où des titres sont nés de partout, menaçant la population de déguerpissement et de la démolition de leurs habitats. Il a noté qu’après le titre de l’État, celui du port sec, premier titre du domaine, trois autres réclament toujours la propriété de cette zone de Yirimadio. D’abord, celui de Bakary Coulibaly de l’EDM, suivi de celui Haidara de l’inspection et après celui du Diamanteur, Chaka Coulibaly. Concernant le cas présent, le professeur Dagnoko déclare que les mots lui manquent pour qualifier cet acte hautement social de M. Maïga qui malgré avoir gagné les neuf procès durant le temps du jugement (huit ans), a opté en fin, pour la fraternité et le social pendant que, les riches exproprient les pauvres du seul et maigre bien à leur disposition chaque jour. Il a lancé après, un appel aux plus hautes autorités de l’État de voir clairement la question du foncier au Mali, tout en ayant pitié des pauvres. Car estime-t-il, ne pas comprendre comment les habitants d’une localité depuis 1978 puissent être délogés, à cause de leur pauvreté, par des documents de 2006-2007. Pour dire sur ce point que l’action de Maïga est une véritable leçon de morale autant pour l’État que pour les prédateurs fonciers. Maitre Hamadoun Maïga a été honoré par trois distinctions de la commune, de la population et aussi de la coordinatrice nationale des associations des victimes. Ce volt-face, après plusieurs années de bataille juridique, s’explique par plusieurs raisons : d’abord à cause Dieu et du social, et après le long temps mis dans le jugement et d’autres procédures qui ont extrêmement fatigué toutes les deux parties. Ce n’est pas tout, maitre Maïga touché par tous les honneurs de la population à cette rencontre a également promis, non seulement de transférer administrativement le document au nom des habitants, mais aussi les soutenir et accompagner dans toutes autres difficultés auxquelles ils auront à faire face. Quant à la médiatrice, Mme Sagara Bintou Maïga, en tant que coordinatrice des victimes, elle a dit que tout ne doit pas être remis uniquement à la justice dans la mesure où, la justice même n’existe pas. Pour elle, laisser démolir ces foyers était synonyme d’augmenter encore plus le rang des victimes au Mali. C’est pourquoi elle a jugé nécessaire de jouer de son rôle de femme, celui de recoudre le tissu social au lieu de le laisser se disloquer. À la croire, ce recul de son frère, maitre Maïga donne un sens à son combat pour la cause des victimes au Mali. Elle a profité de cette occasion pour appeler toutes les femmes à revenir dans leur rôle traditionnel de restauration de la cohésion sociale, car selon elle : « avec une décision de justice ou non, une maison déjà habitée ne doit jamais être démolie ».
ISSA DJIGUIBA
Source : Le Pays