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L’intégration régionale, l’avenir de l’Afrique

L’Economiste: Le Maroc est considéré comme faisant partie des grands partenaires de la BAD. Quel bilan dressez-vous de cette coopération?

– Akinwumi A. Adesina: Effectivement, le Maroc est un pays stratégique pour la BAD. Sur 50 ans de coopération active, la Banque africaine a apporté une contribution de plus de 10 milliards de dollars au Maroc. Pour l’heure, le montant du portefeuille au Maroc s’élève à 3,1 milliards de dollars, ce qui le propulse au premier rang des pays récepteurs en termes d’investissements, avec une part de 11%  sur le continent africain.

– Le Maroc oeuvre activement pour le renforcement de la coopération Sud-Sud. Quel est l’impact de cette stratégie?
– Tout d’abord, je salue la vision du Souverain concernant l’intégration régionale. Ses multiples déplacements en Afrique ont débouché sur de nombreuses conventions de coopération. Actuellement, le continent draine près de la moitié des investissements extérieurs du Maroc. Le dynamisme du secteur privé marocain a été bénéfique à plus d’un titre sur le reste du continent et particulièrement dans les secteurs de l’énergie et l’agriculture.
En matière de production d’énergies renouvelables, notamment à partir de l’énergie solaire, le Maroc dispose d’un champion national, Masen, leader sur le continent. Il jouera un rôle important dans la réalisation de l’un de nos grands projets dans ce secteur (10.000 MW) au niveau de la zone du Sahel, ce qui va permettre à 250 millions d’Africains d’accéder à l’électricité. Le même constat est valable pour le secteur agricole avec le fort engagement du groupe OCP. Sur le plan des infrastructures, le port de Tanger Med m’a fortement impressionné avec une conception et aménagement uniques en Afrique. Il ne s’agit pas d’un port à vocation seulement commerciale, mais également comme structure d’intégration pour sa région qui abrite des zones industrielles avec des grands opérateurs étrangers dans divers domaines: automobile (Renault), aéronautique, électronique, pharmaceutique… Ce port deviendra une zone logistique et de transit pour le reste de l’Afrique à travers le réseau routier.

– Que propose la BAD pour renforcer l’intégration au niveau du continent?
– L’intégration de l’Afrique est fondamentale. Sur le volet commerce, il faut saluer les efforts déployés pour la concrétisation du projet de la Zone de libre-échange continentale. Ce projet permettra d’augmenter le commerce intra-africain pour atteindre 52% en 2030 contre près de 15% actuellement. L’intégration régionale ne se limite pas aux flux commerciaux mais aussi aux interconnexions des réseaux énergétiques. Ce qui explique les actions initiées par la BAD pour encourager le développement de ces connexions. Une attention particulière est aussi accordée aux réseaux routiers. L’intégration des marchés financiers en commençant par une initiative concernant 4 grandes Bourses africaines dont celle de Casablanca.

– La BAD compte-t-elle soutenir le projet du gazoduc entre le Maroc et le Nigeria?
– Il s’agit d’un projet stratégique, car le gaz produit par Nigeria va permettre au Maroc de mieux optimiser la valorisation de ses phosphates. Une fois que le projet sera prêt, la BAD pourra contribuer à sa réalisation, car il s’inscrit dans les ambitions de notre vision stratégique.

– Et pour l’adhésion du Maroc à la Cedeao?
– Sur ce dossier, les négociations sont en cours.

Valorisation des richesses

En dépit de ses énormes richesses naturelles et humaines, l’Afrique n’arrive pas encore à sortir du sous-développement et de la pauvreté. Le patron de la BAD est conscient de cette situation, en avançant que les pays qui exportent des produits et matières à l’état brut ne peuvent pas sortir du sous-développement. Pour lui, le grand défi est d’assurer une gestion rationnelle des richesses de l’Afrique, à commencer par leur valorisation. Cela nécessite d’accélérer le processus d’industrialisation du continent. Un thème qui a fait l’objet des dernières assemblées annuelles de la BAD organisées cette année en Corée. Mais tout cela nécessite des compétences humaines biens formées. Ce qui explique l’importance qu’on devrait accorder à l’amélioration de la qualité des systèmes d’éducation.

Propos recueillis par Noureddine EL AISSI

L’Économiste

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