Pour les uns, il est un Messie, un envoyé de Dieu pour mettre de l’ordre dans notre désordre. Un homme de Dieu pour lequel ils sont prêts à donner leur vie ; tandis que pour les autres, ce prétendu « Messie » n’est rien d’autre que Messi (Lionel), célèbre attaquant de la non moins célèbre équipe de football du Barça. Une fois dans votre surface de réparation, disent-ils, il est capable de dribler tout le monde pour sauver ses « intérêts ». Alors, l’imam Dicko : Messie ou Messi ?
Sous le règne d’IBK, il était puissant. Très puissant. Trop puissant. Ce régime d’alors, qui lui devait son trône, lui obéissait au doigt et à l’œil. Il faisait et défaisait les gouvernements, exigeait qu’untel soit bombardé ministre ou Premier ministre. Ou que tel chef de gouvernement soit démis de ses fonctions. Comme ce fût le cas de Soumeylou Boubeye Maïga. Et IBK obéissait. Par crainte de le voir, dès le lendemain, faire descendre ses partisans dans la rue.
Mais au lendemain du coup d’état du 18 août 2020, coup de théâtre : sous prétexte de retourner dans sa mosquée, il s’allie – à la surprise générale – à la junte militaire. Dont il devient, selon ses désormais ex-camarades du M5-RFP, le conseiller occulte.
La chute du Messie
Dans une interview, accordée à une Radio de la place, Cheick Oumar Sissoko, leader du Mouvement EMK (Espoir Mali Koura) l’accuse, ouvertement, d’avoir trahi le Mouvement de contestation.
« C’est lui qui aurait conseillé à la junte militaire, au pouvoir depuis le 18 août 2020, de ne pas mener la Transition avec le M5-RFP ».
Pire, l’influent imam Dicko est accusé, par ses ex-compagnons de lutte, d’avoir « trahi » les idéaux du peuple malien, portés par le M5-RFP, dans le seul but de pouvoir caser ses proches. Ils seraient au nombre de 17 au total. Au gouvernement et au CNT (Conseil National de Transition).
Depuis, la côte de popularité du « Messie » ou de « Messi » ne cesse de dégringoler au sein de l’opinion publique. Et comme si cela ne suffisait pas, la CMAS, le Mouvement politico-religieux, dont il est le parrain, prend de toutes parts.
Coordinateur général de la CMAS, son porte-parole et non moins beau-fils, ISSA CHAOS DJIM, pardon Issa Kaou Djim, est destitué de son poste.
Aussi, pour avoir sollicité et soutenu la candidature du colonel Assimi Goïta, vice-président de la Transition, à la présidentielle de 2022 – Et ce au mépris de la Charte de la Transition, dont l’article 9 interdit au président et au vice-président de la Transition d’être candidat aux prochaines présidentielle et législative – ISSA CHAOS DJIM semble s’être tiré une balle dans le pied. Plusieurs organisations de la société civile réclament sa destitution du CNT, dont il est le 4e vice-président. Avant d’être traduit devant les tribunaux pour avoir « poussé le vice-président de la Transition à violer la Charte de la Transition ».
Messi, malgré tout, influent
En dépit de ces accusations, et malgré le flop, pour le moins magistral de son « Manifeste » censé le remettre en selle sur l’échiquier politique national, l’imam Mahmoud Dicko n’en reste pas moins influent. Surtout, auprès de certains de ses partisans, qui lui sont restés fidèles ; mais aussi, auprès de certaines chancelleries occidentales et d’organisations de défense des Droits de l’Homme.
L’Organisation Mondiale des Droits de l’Homme l’a désigné, le 23 mars dernier, « leader de l’année 2020 pour l’Afrique de l’Ouest ». La remise officielle de ce prix est prévue pour le 30 mars 2021. La cérémonie est présidée par le colonel Malick Diaw, président du Conseil National de la Transition (CNT), l’organe législatif de la Transition.
Une seule question, désormais, sur toutes les lèvres : ce prix, aussi prestigieux soit-il, permettra-t-il à l’imam Dicko de regagner le coeur de ses concitoyens ?
Bien Mali(e)n, qui pourrait y répondre.
Oumar Babi
Source : Canard Déchaine