Au Mali, il y a eu deux vrais mouvements capables de changer les choses: c’était la plateforme “An tè, a bana” et le CDR. Réellement, nous avons vu les jeunes s’organiser eux-mêmes afin de se battre pour leur avenir. Nous avons vu des jeunes qui ne soulevaient pas d’autres jeunes grâce à l’argent. C’était deux mouvements nés d’un esprit patriotique pour une cause bien définie. Mais, comme toujours, les divisions et les querelles sont venues, avec les guerres de vidéos pleines d’injures et de menaces, surtout face à l’argent qu’on a commencé à montrer à certains, ou face aux promesses de postes.
Tout ce qui commence bien au Mali finit par des querelles et des divisions, et c’est ici la plus grande déception. À cause de l’argent et des promesses de bourses d’études ou de postes, les jeunes n’arrivent pas à s’organiser pour une lutte commune et effective. Au contraire, ils se battent entre eux avec rage, chacun défendant son petit intérêt, les uns devenant ennemis pour les autres. Si les dents et la langue se querellent toujours, le ventre restera vide. Marcher chaque jour n’y remédiera point. Au moment des élections, presque tous cherchent à gagner quelque chose, à se faire remarquer de ces mêmes hommes politiques que nous critiquons tant, dans l’espoir d’obtenir une promotion. C’est lorsque les élections passent que certains (ils sont très peu) gagnent gros. Les autres réalisent alors qu’ils n’ont pas gagné assez, et c’est eux en grande partie qui gonflent les rangs de tous les marcheurs « professionnels » de la République.
Ils marchent avec tous, sans exception, et participent à toutes les prières possibles, dans l’espoir de gagner ce qu’ils estiment n’avoir pas eu. On a fait du Mali et des élections maliennes une sorte de casino : ceux qui perdent ont perdu, ceux qui gagnent perdront un jour. Puisque la roue de la roulette tourne sans cesse ; et elle tourne en faveur des propriétaires du casino que sont la classe politique et les religieux-politico-affairistes dans le cas précis du Mali. Nous n’avons pas d’électeurs réels, nous avons des joueurs qui vont aux élections comme à un risque. Le patriotisme malien est comme le bandit-manchot ou une tontine. Ainsi, on risque chaque fois de l’avenir du pays, voilà pourquoi le Mali est dans la tourmente perpétuelle.
Le comble est que nous savons tous où se trouvent la vérité et les patriotes, mais nous n’avançons jamais dans cette direction. Croire que ce sont les hommes politiques ou les religieux qui seront la solution c’est ne rien croire en fait. Les grandes marches deviennent une routine et font de moins en moins peur à ceux qui savent comment manipuler la jeunesse sur des bases religieuses ou avec de l’argent pour mieux les diviser. Les uns et les autres se serviront toujours des jeunes pour atteindre leurs objectifs privés. Il revient donc à la jeunesse d’en prendre conscience, de s’organiser, de taire les divisions, et de ne compter que sur elle-même dans sa bataille, pour ne pas être le lait de vache pour les uns et la viande de la même vache pour les autres. Ni la peau de prière pour tous. Unis, nous vaincrons tous ; divisés, nous perdrons tous.
SekouKyassou Diallo, Alma Ata, Kazakhstan.
Source: Le Démocrate