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Les djihadistes et le code de déshonneur

La culture des Touareg est articulée autour de codes ancestraux et s’inspire également de grandes figures telles qu’Aladi Ag Alla. Certaines brebis galeuses, en revanche, ternissent l’image des hommes bleus et nuisent à leur communauté. Sidan Ag Hitta est de ceux-là.

Le 29 septembre, le grand nom de la cause touareg Aladi Ag Alla, aussi appelé Alladen, s’est éteint à Tamanghasset. Cet homme au profil singulier avait initié la révolte des Kel Tamasheq dans l’Adrar des Ifoghas au milieu des années 1960 à la suite d’un incident mettant en cause son honneur. Ce dignitaire avait finalement été arrêté, puis emprisonné avant de s’évader. Bien qu’à l’origine d’un soulèvement ayant coûté la vie à de nombreux combattants touareg et s’étant soldé par l’intervention de l’Algérie et du Maroc, ce chef Ifoghas était respecté par ses pairs. Il n’avait pas hésité à défendre son nom et ses valeurs, quelle qu’en ait été l’issue.

Souvent jugés à tort comme un peuple violent, les Touareg obéissent à l’achak, un code de l’honneur très strict. Celui-ci comporte en effet toutes les règles non-écrites mais respectées par l’ensemble de cette communauté, permettant la stabilité des tribus nomades. L’achak implique notamment de suivre des principes moraux reconnus dans de nombreuses cultures, tels que le respect des femmes, des enfants et des personnes âgées. Le culte des anciens est également une valeur cardinale pour les Kel Tamasheq, ce code de conduite préconisant la déférence à l’égard des responsables et des hommes de culture.

Malheureusement, force est de constater que les valeurs morales et les codes ancestraux s’érodent et que certains trouvent leur compte en galvaudant ces principes qui font pourtant la grandeur du peuple touareg. L’insécurité croissante à Kidal et dans l’Adrar des Ifoghas ces derniers temps, allant de pair avec des exactions contre les civils, dont des personnes âgées, n’est heureusement pas représentative du peuple touareg. Elle est le fait de certains individus malintentionnés, peu regardants du code moral établi, et à la recherche de gains rapides et de notoriété.

Sidan Ag Hitta, la terreur de Kidal, semble exceller dans ce domaine. L’auteur des récentes menaces à l’encontre de la population kidaloise, ne sert pas sa communauté, assimilée malgré elle à un peuple sanguinaire et barbare du fait des agissements de certains bandits djihadistes. Comme me l’avait expliqué un ami tamasheq, celui qui ne respecte pas l’achak est appelé « anabaïou », « celui qui s’en moque » et est rejeté par les siens. Visiblement, Sidan Ag Hitta se moque de tout : de la vie humaine, du respect de la communauté et même des anciens. Il préfère le bruit des fusils automatiques et des femmes en deuil à la douce mélodie de l’inzad. Mais ce sont encore une fois les innocents qui en payent le prix.

Dans l’Histoire, les tribus et communautés touareg ont toujours connu des divergences internes, qui les empêchaient de rester unies face à un ennemi commun. S’opposer au terrorisme au nom de la sauvegarde de leur culture est pourtant aujourd’hui nécessaire, pourvu que les hommes bleus se saisissent de cette opportunité ! Certains noms comme celui d’Aladi Ag Alla seront chantés par les femmes et les enfants, d’autres comme celui d’Ag Hitta finiront par sombrer dans l’oubli.

Ismaïla Diarra
Sur Twitter : @idiarra661

LA REDACTION

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