Aucun secteur n’est épargné par les mesures préventives prises ici et là contre la propagation du nouveau coronavirus, y compris la prostitution ! Oui, la pros- titution bien sûr ! C’est un métier comme les autres non ? C’est de cela que notre apprenti écrivain essaye de nous convaincre. Avec les confessions de Koudy, il nous plonge dans l’univers du plus vieux métier du monde avec des «professionnelles» qui doivent rivaliser aujourd’hui avec des femmes mariées et des filles de «bonne famille». Nous vous proposons ici la suite (3e partie) de la confidence de Koudy. Bonne lecture !
Dans ce métier, on rencontre toutes sortes de mecs, des goujats aux saints. Il n’y a pas de sentiments dans les relations avec une prostituée. Mais, certains exagèrent. Ils viennent juste prendre le plaisir de leurs sous et repartent avec un certain regard de dédain. D’autres font la causette, nous racontent leur vie pour justifier leur présence. Les pires viennent juste pour le vice, pour assouvir leur perversité en exigeant des positions qu’ils ne peu- vent jamais oser dans le lit conjugal et laissent trop souvent des blessures superficielles au début qui iront en s’aggravant faute de pouvoir cicatriser correctement.
Certains sont des pingres qui veulent en avoir pour leur argent jusqu’au dernier centime. Mais, il y a aussi des hommes très généreux qui laissent des pourboires ou font des cadeaux. Ils sont généralement tendres et vous traitent en femme et non en fille de joie. Mais ces derniers sont rares et surtout ils ne fréquentent pas les prostituées des égouts, ils choisissent leur fleur du pavé. C’est à se demander ce qu’ils viennent faire dans nos lits. C’est avec le temps que j’ai compris que tous les hommes ne sont pas ac- crocs aux prostituées par vice ou par perversité. Certains cherchent de la ten- dresse, de la compagnie, de la douceur féminine, de l’expérience pour les plus timides. A l’image de Papou, un jeune opérateur économique que j’ai connu il y a deux ans. Un soir, il m’a embarquée pour un appartement meublé où nous avons passé la nuit sans baiser une seule fois. Au point que j’ai eu peur d’avoir à faire à un sadique impuissant. Mais, au fil du temps, j’ai appris à le connaître à travers nos échanges, ses confidences. Il est victime d’un mariage arrangé entre deux familles. En adolescent précoce, il était tombé fou amoureux d’une jeune fille de famille modeste, une camarade de classe. Malheureusement, ses pa- rents n’ont jamais voulu qu’il l’épouse parce qu’ils avaient un autre projet pour lui : épouser sa cou- sine, la fille de la sœur à son Papa. Une héritière de l’une des familles les plus fortunées du pays pour raffermir les liens familiaux. Donnée en mariage à 15 ans et vierge, Sirandou n’avait aucune expérience sexuelle. Elle lui faisait pitié.
– Nos expériences sexuelles tournent presque au cauchemar. J’ai le plus souvent l’impression d’avoir un tronc dans mon lit. Elle est insensible aux câlins, aux caresses ! J’ai l’impression de la violer en lui faisant l’amour.
C’est ce qu’il m’a confié. Certains clients nous avouent que leurs rapports sexuels avec leurs conjointes n’ont rien à en- vier à un âne qui veut posséder une ânesse. Sauf que dans le cas des ani- maux cela est naturel. Et ce sont leurs frustrations sexuelles qui conduisent beaucoup d’hommes à avoir des maîtresses ou à fréquenter les Call-girls et les filles de joie.
– Pourquoi n’épouses-tu pas une seconde femme ? Pourquoi ne prends-tu pas une maîtresse capable de tout lorsqu’elle est bien traitée et motivée ?, ai-je une fois demandé à Papou.
– Ce n’est pas facile parce que Sirandou me pose un cas de conscience. Nous sommes tous les deux victimes de ce mariage arrangé par nos familles. Elle ne connaît presque rien de la vie car mariée très tôt. Je me dis alors que prendre une seconde épouse plus expérimentée et plus éveillée, ce serait l’accabler une seconde fois. Malgré tout, j’ai quand même eu trois enfants avec elle. J’ai entretenu quelques filles pendant des années.
Mais, elles étaient de plus en plus exigeantes, et moins sérieuses aussi. J’ai dé- couvert qu’elles avaient des aventures dans mon dos, malgré tout ce que je leur offrais. Il y a même une qui est venue me faire une scène terrible dans la boutique de mon père devant les clients. Depuis ce jour, j’ai rompu avec toutes ces filles qui me trompaient en se prostituant clandestinement.
C’est l’explication qu’il m’a donnée. Mais, je ne com- prenais pas non plus son attachement à ma per- sonne. Et chaque fois que je le lui demandais, il détournait la conversation. Jusqu’à ce jour où il m’a invitée à passer le week-end dans un appartement meublé dont l’immeuble appartenait à l’une de ses relations d’affaires.
– Koudy, tu sais, si je n’avais pas peur des mauvaises langues, c’est toi que j’aurais prise comme seconde épouse, m’a-t-il avoué ce jour.
– Ah, bon !
– Oui, a-t-il poursuivi en me serrant contre lui.
– Et pourquoi, ai-je de- mandé
– Tu es spéciale et je me demande quelle est la rai- son qui t’a conduite dans la prostitution parce que, excuse-moi l’expression, tu n’es pas une prostituée comme les autres. Je t’ai observée à l’Espace Amazonie pendant de longs mois avant de t’aborder
– Ah bon ?
– Bien sûr
– Et qu’as-tu remarqué ?
– Que tu es différente de toutes tes camarades. Tu sais séduire tes clients sans les harceler. Et tu choisis aussi tes clients. Je t’ai toujours vu avec des clients distingués. Tu es dans ce métier, mais tu es paradoxalement très pieuse. Contrairement à la grande majorité des prostituées, je ne t’ai jamais vu boire ou fumer. Donc, tu m’as toujours intrigué. Et j’ai aussi remarqué que durant nos week-ends, tu ne loupes aucune prière. C’est pourquoi je t’ai approchée en me disant que peut-être je pourrais t’aider à sortir de ce trou. Et j’ai pris goût à ta présence. Sans te manquer de respect, ta compagnie me rappelle tout ce que j’ai vécu avec Nènè, celle qui fut mon grand et véritable amour avant que nos chemins ne se croisent. A tes côtés, je me sens un homme, je retrouve mes sensations romantiques. Rien que causer avec toi me permet d’oublier les soucis de la vie quotidienne. Et je pense que c’est cela aussi qu’un homme peut attendre de son épouse
Il a ainsi parlé pendant au moins une demi-heure. Une confession qui m’arracha des larmes. Maintenant, je comprenais beaucoup mieux son com- portement à mon égard. Il lui arrivait de me loger dans cet appartement meublé sans me toucher. Et souvent quand je lui disais que j’étais indisposée (j’avais mes règles), il souriait et me disait que ce n’était pas grave. Aussi il prenait soin d’apporter des provisions pour me permet- tre de faire la cuisine sur place.
Il venait avant tout pour dîner puis restait une grande partie de la nuit. Et, au moment de se quitter le dimanche nuit, il me donnait trois fois plus que ce qu’il me devait en me conseillant de me reposer et de bien prendre soin de moi. Et chaque week-end nous rapprochait davantage.
La dernière fois, il m’a demandé si j’étais intéressée par une formation ou si j’avais un projet. Et il m’a demandé d’y réfléchir sérieusement. Je n’en re- viens toujours pas.
Vous comprenez maintenant que toutes mes plaintes sur les difficultés du métier sont une manifestation de solidarité à l’égard de celles qui n’ont pas ma chance. C’est un devoir de parler en leur nom quand l’opportunité se présente. J’ai toujours prié Dieu de m’aider à tourner cette page sombre et humiliante de ma vie. Et je pense que Papou est un ange envoyé par Dieu pour me sauver de l’enfer de la prostitution.
Comment je me suis re- trouvée dans ce métier ? C’est une longue histoire. Et je sais déjà que les pré- jugés me sont défavorables. Mais, pour vous permettre de mieux me juger et me condamner, je me permets de vous parler un peu de l’essence de mon métier
A suivre
BOLMOUSS
SOURCE: LE MATIN