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L’entreprenariat en Afrique, un vrai parcours du combattant

L’expression américaine «Only the strongests survive» (seuls les plus forts survivent), prend tout son sens dans l’aventure entrepreneuriale en Afrique. L’environnement des affaires en général, les lenteurs administratives, l’environnement politique, culturel et social, sont autant de facteurs qui ralentissent l’entrepreneur africain.

Le jeune entrepreneur ou l’entrepreneur ayant déjà une expérience professionnelle avérée sont confrontés aux mêmes difficultés quand ils décident d’entreprendre en Afrique.
Le premier obstacle quand vous avez identifié un besoin de la société dans laquelle vous vivez et que vous avez décidé de mettre en place un projet d’entreprise pour répondre à ce besoin (demande, faiblesse), vous rencontrez la résistance de votre entourage à qui, naturellement, vous parlez de votre projet.
Généralement, on vous dit que c’est très risqué de laisser un poste dans une entreprise pour se lancer dans l’entreprenariat ou quand vous débutez votre carrière après les études, on vous suggère de plutôt chercher du travail.
Dans les deux cas, l’environnement culturel qui devrait être le premier levier de motivation de l’entrepreneur est défaillant. Jusqu’à très récemment, l’entreprenariat était vu en Afrique (francophone en particulier) comme une activité secondaire à un emploi principal. Alors que l’encouragement et la motivation au démarrage d’une entreprise sont des facteurs essentiels, car ils contribuent pour près de 40 % de la réussite de votre projet selon moi.
Le second obstacle, c’est l’environnement des affaires lui-même. Les économies africaines ne sont pas forcément formatées pour être des créatrices de richesses et des producteurs de valeurs ajoutées, même s’il y a depuis 15 ans une transformation structurelle importante de la configuration de ces économies à vocation consommatrices. Dans un tel environnement, l’entrepreneur est livré à lui-même. Il y a certes des institutions mises en place pour assister les investisseurs, beaucoup de campagnes de sensibilisation et des politiques publiques qui œuvrent dans ce sens.
Cependant, la réussite de toutes ces initiatives est intrinsèquement liée à une solide volonté politique en faveur de la productivité, de la transformation de produits bruts en produits finis, de la performance des politiques publiques et l’évaluation de leur mise en application, de la bonne gouvernance, de la solidité des institutions publiques, et de l’efficacité de l’administration publique. Cette volonté doit faire l’objet d’une priorité absolue. Force est de constater malheureusement que ce n’est pas encore vraiment le cas dans de nombreux pays africains… pour l’instant.
Le troisième obstacle est la capacité des «apprentis entrepreneurs» d’être structurés, sérieux, rigoureux, courageux, aventureux et résistants aux pressions et chocs extérieurs. Il existe deux catégories d’entrepreneurs en Afrique. Les entrepreneurs par défaut et les entrepreneurs par vocation
La probabilité de réussir pour les premiers est quasiment nulle, car pour eux, entreprendre est une période de transition en attendant de trouver le job parfait dans une entreprise de la place ou être nommé dans l’administration. En étant dans cet état d’esprit, il est clair que «l’apprenti entrepreneur» ne fera pas preuve d’abnégation, de sérieux, de résistance et de courage, dans l’aventure de construction du projet d’entreprise. Alors que ces valeurs sont essentielles pour espérer pouvoir réussir dans l’entreprenariat. Les entrepreneurs par vocation ont, au départ de l’aventure, 50% de chance de réussite, car l’entreprenariat est en effet une vocation. Il est nettement plus difficile d’entreprendre et réussir que de passer brillamment un entretien d’embauche et décrocher le job de rêve.
Le quatrième obstacle, qui en réalité ne représente que 20% des challenges à relever pour un entrepreneur africain, à mon sens, contrairement à ce que l’on pense habituellement, est le financement de son entreprise, à la création de l’entreprise, pendant la période de décollage et à l’atteinte de la vitesse de croisière (5 ans en moyenne).
Vu le contexte culturel et l’aversion à l’entreprenariat, les «business angels» africains n’existent quasiment pas. L’entrepreneur doit tout d’abord compter sur lui-même, donc sur ses propres ressources, ce qui fait défaut à la majorité. Le financement public est très limité. Le marché des capitaux en Afrique dans sa généralité n’est pas adapté au financement des PME et des startups. Les banques sont frileuses, car elles estiment que l’asymétrie d’informations est trop importante pour avoir une bonne visibilité sur la qualité de crédit des PME et des startups. Les fonds d’investissement ont des tickets d’entrée trop élevés pour les PME et les startups, et les institutions de microfinance proposent de faibles ressources de financement et des taux d’intérêt prohibitifs.
Enfin, le marché des obligations et des actions, comme partout dans le monde, n’offrent pas d’opportunités aux PME et aux startups. Dans l’UEMOA cependant, la Bourse régionale des valeurs mobilières vient d’ouvrir un compartiment PME, mais pour celles qui ont déjà atteint la vitesse de croisière et qui cherchent à passer dans «la cour des grands». On pourrait voir cela comme un début de solution pour les PME sur le marché des actions et des obligations. Cet environnement difficile dans lequel évoluent les entrepreneurs africains les a amenés à être très innovateurs, créatifs, afin de surmonter ces obstacles pour réussir.
En conclusion je dirai que quand l’on entreprend et réussit en Afrique, on peut entreprendre et réussir partout ailleurs dans le monde. On devient aguerri aux nombreux challenges possibles de l’entreprenariat.

Par Stanislas Zézé, PDG Bloomfield Investment Corporation

Afrique.latribune.fr

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