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Le tribunal de la Commune VI écarte la résolution de l’A.N dans l’affaire Bourama Tidiane Traoré Le « baga baga » des députés n’a pas marché

Le tribunal de la Commune VI retient le député Bourama Traoré comme accusé. Il sera jugé demain

Bourama Tidiane Traoré Bananzolé Bourama depute honorable assemblee nationale

Hier lundi 01 décembre 2014, le tribunal de la Commune VI du District de Bamako s’est déclaré incompétent à donner suite à la résolution adoptée par l’Assemblée Nationale, le jeudi dernier, exigeant  la libération du député Bourama Tidiane Traoré et l’abandon des poursuites à son encontre dans l’affaire d’agression physique qui l’oppose au juge M. Amadou Bocar Touré.

On se rappelle que le mardi 25 novembre 2014, le juge de Ouélessébougou, M. Amadou Bocar Touré, a été agressé dans son bureau par le député Bourama Tidiane Traoré dit “Bananzolé Bourama”, un élu du Rassemblement Pour le Mali (Rpm) à Kati. Depuis, “Bananzolé Bourama” est en détention, en attendant son procès. Une première audience avait lieu le jeudi dernier devant le tribunal de la Commune VI.

Après l’audience préliminaire du jeudi 27 novembre 2014, “Banazolé Bourama” était de nouveau à la barre devant le tribunal de la Commune VI du district de Bamako, hier lundi 01 décembre 2014. On se rappelle que le jeudi 27 novembre dernier, l’affaire avait été renvoyée au 03 décembre courant, cependant l’audience d’hier lundi 01er décembre 2014 devait plancher sur une résolution votée par l’Assemblée Nationale, jeudi dernier, et qui exige la libération du député et l’abandon des poursuites à son encontre.

C’est aux environs de 11 heures 40 minutes que l’honorable Bourama Tidiane Traoré a fait son entrée dans la salle d’audience du tribunal de la Commune VI du District de Bamako. Il était habillé d’un boubou blanc et tenait un exemplaire du Saint Coran en main.

Initialement annoncé pour13 heures, le procès a finalement débuté aux environs de 14 heures. L’honorable Traoré se présenta alors à la barre avec son Coran en main, entouré de six avocats  chargés de sa défense. Son adversaire, le juge Amadou Bocar Touré, n’était pas présent dans la salle, mais il était représenté par une dizaine d’avocats.

Les avocats de l’honorable Bananzolé Bourama ont, d’entrée de jeu, font valoir qu’un certain nombre de principes doivent être respectés avant d’interpeller un député à l’Assemblée Nationale et de le mettre sous les verrous. Notamment, le respect des dispositions de la Constitution du 25 février 1992. Cette précaution n’ayant pas été prise, les avocats de la défense estiment que l’article 62 de la Constitution autorise en conséquence la libération de l’honorable Traoré.

Dans leur réplique, les avocats de M. Amadou Bocar Touré ont rappelé que ce juge a été lésé et qu’il a besoin que justice lui soit rendue conformément à la loi. “Nous sommes surpris de nous retrouver aujourd’hui autour de la résolution de l’Assemblée Nationale. Vous n’êtes pas les juges de la mise en oeuvre de cette résolution. Dans un État sérieux comme le Mali, cette résolution aurait suffi pour que le président de la République dissolve l’Assemblée Nationale. À travers cette résolution l’Assemblée se substitue au pouvoir judiciaire”, a déclaré l’un des avocats de M. Amadou Bocar Touré, Me Malick Ibrahim.

D’autres avocats du juge Amadou Bocar Touré ont qualifié la résolution adoptée par l’Assemblée Nationale de tripatouillage de la Constitution qui est soumis à la justice et que celle-là n’a de valeur que devant l’Assemblée Nationale. En conséquence, ils ont déclaré que la résolution examinée est sans objet, qu’elle est une injure à l’endroit de la République et des institutions judiciaires. “La loi est dure, mais c’est la loi. Le tribunal de la Commune VI du District de Bamako n’est pas la Cour Constitutionnelle pour statuer sur la mise en oeuvre de cette résolution. C’est l’avenir du Mali qui se joue à travers ce dossier”, ont déclaré les avocats du juge Amadou Bocar Touré. Aussi ont-ils rappelé que le député n’est pas au dessus de la loi.

Me Malick Djibrila, un autre avocat du juge Touré, a souligné que l’Assemblée Natioanle n’a pas la compétence réquise pour demander la libération de l’honorable Traoré. Et qu’il n’appartient pas à l’Assemblée de dire à la justice de faire ce qu’elle doit faire.

Après des débats très animés, l’audience a été finalement suspendue par le juge pour 15 minutes, afin de statuer sur l’affaire. À la suite de cette suspension, le tribunal de la Commune VI du district de Bamako s’est décalré incompétent pour statuer sur la mise en oeuvre de la résolution de l’Assemblée Nationale. Comme prévue, les débats sur le fond de l’affaire auront lieu demain, mercredi 03 décembre 2014.

Tougouna A. TRAORÉ

 

La réaction des avocats des deux parties, après le verdict

À la fin de l’audience, nous avons tendu notre micro à Me Hamidou Daou, avocat de l’Association des Jeunes Magistrats du Mali, agissant pour la défense du juge de Ouélessébougou, M. Amadou Bocar Touré. Il s’est exprimé en ces termes : “Pour nous le droit a été dit. Parce que sans cette décision, nous craignions que l’Assemblée Nationale n’interfère à coup sûr dans l’activité judiciare. La conséquence pour nous aurait été comme si c’est un ordre que l’Assemblée Nationale a donné à un juge, qui lui enlève tout pouvoir d’appréciation, comme si c’est un agent d’exécution. Nous pensons que dans un État de droit, en vertu de la séparation des pouvoirs, cela ne sied pas dans le cas d’espèce. Et il est bon que chacun reste dans son rôle. Parce que l’autorité législative ne peut pas donner des injonctions à l’autorité judiciaire. Nous pensons que cette résolution était purement et simplement une injonction que l’autorité judiciaire ne devrait pas exécuter. Et, c’est ce qui a été le cas”.

Les avocats de l’honorable Bourama Tidiane Traoré à qui nous avons tendu notre micro se sont limités à dire ceci : “Le droit a été dit et nous n’avons pas d’appréciation par rapport à cette décision”.

Recueillis par Tougouna A. TRAORÉ

SOURCE: Nouvel Horizon  du   2 déc 2014.
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