L’ex-directeur général de l’Institut national de prévoyance sociale (INPS) Bréhima Noumoussa Diallo, vient d’être accablé concernant sa gestion par un rapport “provisoire” de la Conférence interafricaine de prévoyance sociale (Cipres). Beaucoup de révélations sur des malversations financières, notamment sur les titres de propriété, des immobilisations acquises par l’Institut. Les griefs sont, entre autres, l’acquisition d’un appartement en France à Aubervilliers facturée à 426 372 050 FCFA au lieu de 192 195 401 FCFA ; le dossier de l’acquisition de 55 terrains nus dont celui de Kidal déclaré acheté à 38 millions FCFA.
Le rapport de la Conférence interafricaine de la prévoyance sociale (Cipres) fait des révélations qui accablent la gestion “catastrophique” de l’ex-directeur général de l’Institut national de prévoyance sociale (INPS), Bréhima Noumoussa Diallo. Ce rapport (il est provisoire) dont nous détenons copie dénonce certaines pratiques de malversations financières qui ont mis la structure à terre car ayant surtout contribué à détériorer la trésorerie de l’INPS.
Dans ce rapport, la Cipres a regardé à la loupe les titres de propriété des immobilisations acquises par la structure. Ainsi, des engagements avaient été pris pour l’acquisition de 55 terrains nus d’une valeur totale de 2,6 milliards de nos francs. Pour ce faire, une convention avait été signée entre un certain “Adama M’Pié Sanogo” et l’INPS par l’intermédiaire d’un notaire. Et des terrains ont été dans différentes régions.
Malheureusement, il ne ressort dans la comptabilité que 8 des 55 terrains acquis. En d’autres termes, le reste, soit 47 terrains, ne ressort dans aucune situation comptable tenue du service. “Cette omission ne reflète pas la situation exhaustive des engagements et donne une valeur incorrecte des immobilisations et des créances dans les états financiers. La non-prise en compte de ces terrains dans la comptabilité de l’Institut est justifiée par leur non-paiement”, précise le rapport.
“Le paiement des 8 terrains a été effectué par chèque en date du 7 novembre 2018 au nom de personnes désignées et non les propriétaires desdits terrains sur la base de la convention sus-évoquée. En outre, les titres de propriété de ces parcelles sont en possession du notaire et non de l’Institut bien qu’elles sont prises en compte dans son patrimoine. La garde des titres de propriété par le notaire est consécutive au non-paiement des propriétaires et des honoraires relatives à l’acquisition des 55 terrains pour un montant total de 265 millions FCFA, soit 5 millions de F CFA par terrain ainsi que le stipule la convention signée. Il n’existe pas l’assurance, qu’en l’état, l’Institut puisse justifier de son droit de propriété sur les biens en question”, souligne le rapport.
Ainsi, les 8 parcelles dont toutes disposent de permis d’occuper, ont coûté 293 millions de F CFA. Il s’agit de la parcelle n°12295 à Bafoulabé achetée à 40 millions FCFA, la parcelle n°12290 à Sadiola acquise à 39 millions F CFA, la parcelle n°12291 à Banamba achetée à 39 millions FCFA, la parcelle n°12292 à Nara achetée à 38 millions FCFA, la parcelle n°12294 à Mahina achetée à 38 millions FCFA, la parcelle n°12288 à Toukoto à 35 millions FCFA, la parcelle n°12228 à Dioïla achetée à 26 millions FCFA, le 9 octobre 2018.
Ce qui est révoltant, la parcelle n°12293 de Kidal a été achetée à la faramineuse somme de 38 millions FCFA. Ce coût d’acquisition parait très élevé.
“Il ressort de l’analyse des immobilisations acquises et de leur situation géographique que l’acquisition des 55 parcelles n’a pas tenu compte des conditions de placement définies par la Cipres. La mission n’a connaissance d’aucune évaluation de la rentabilité de la liquidité et de la sécurité avant les acquisitions. Les 10 sur les 55 parcelles acquises pour une valeur totale de 387 millions FCFA sont situées dans les régions de Kidal, Tombouctou et Mopti. En outre, les acquisitions sont intervenues au moment où l’insécurité sévit dans ces zones. La localité de Graolo où une parcelle a été acquise pour un montant de 37 millions FCFA demeure inconnue de la mission”, souligne le rapport.
Les dix parcelles sont : Abeïbara (39 millions F CFA), Boni (30 millions FCFA), Bourem (39 millions FCFA), Goundam (39 millions FCFA), Gourma Rharous (37 millions FCFA), Graolo (37 millions FCFA), Kidal (38 millions FCFA), Léré (38 millions FCFA) et Mandiakouye (40 millions FCFA).
Autres griefs : c’est l’acquisition d’un appartement en France, plus précisément à Aubervilliers dans la banlieue parisienne pour servir de logement au représentant de l’INPS. Cette acquisition a été émaillée d’irrégularités. Ainsi, la valeur réelle comptable pose problème. Deux actes notariés, selon le rapport de la Cipres, soutiennent cette opération avec des valeurs différentes pour le même appartement.
“Une attestation de vente établie à Paris par une étude notariale indique un prix d’achat de 293 000 euros, soit 192 195 401 F CFA tandis que celle établie au Mali par un notaire à Bamako fait ressortir un prix d’achat de 650 000 euros, soit 426 372 050 F CFA. L’absence de concordance entre les deux prix d’acquisition qui dégage un écart de 357 000 euros, soit 234 176 649 F CFA, laisse planer un doute sur le prix réel d’acquisition. Il a néanmoins été constaté que c’est le montant le plus élevé, celui figurant sur l’attestation de l’étude notariale de Bamako, qui a été comptabilisé”, dévoile dans le rapport.
Avant de préciser : “L’expertise commanditée par le vendeur dont le rapport date de 2015, fournie lors de la vente de l’appartement, a indiqué une valeur de 640 000 euros, soit 419 812 480 FCFA.
Cependant, cette expertise date de trois ans avant l’opération et elle n’a pas été réalisée par l’Institut au moment de l’acquisition de façon contradictoire. Cette situation a pu entraîner le paiement d’un prix d’achat supérieur à la valeur vénale compte tenu de l’utilisation durant les trois ans, avant l’acquisition à partir de l’expertise réalisée.
Aucune règle de la commande publique n’a été observée lors de cette acquisition, notamment celle relative à l’acquisition des biens par entente directe. Il est préconisé dans ce cadre une négociation des prix assorti d’un procès-verbal de négociation. Or, aucun document de cette nature n’a été communiqué”.
Cette opération, selon le rapport de la Cipres, a aussi entrainé le paiement de la somme de 85 millions FCFA au titre des honoraires de notaire, dont 65 millions FCFA pour le cabinet de notaire de Bamako et 20 millions FCFA au cabinet de notaire se trouvant à Paris.
L’éléphant était bel et bien dans un magasin de porcelaines.
El Hadj A.B. HAIDARA
Source: Aujourd’hui-Mali